COPIE CONFORME de Abbas Kiarostami *
James Miller est un écrivain britannique qui donne une conférence à Florence (Italie) à propos de son dernier ouvrage qui évoque les relations entre l'original et la copie d'une oeuvre d'art. A l'issue de la causerie il retrouve une française qui vit à Florence et tient un magasin d'art. Elle n'a pu assister en totalité à la conférence à cause de son sale moutard qui tapait du pied parce qu'il voulait son hamburger avec double frite et ketchup ! L'homme et la femme se rendent à Lucignano, petit village comme la Toscane en recèle tant et devant lequel on ne peut que tomber foudroyé d'amour. Regardez :
Il s'agirait donc de distinguer l'original de la copie en s'interrogeant doctement devant un tableau et s'extasiant dans tel musée qui dévoile depuis deux siècles une oeuvre qui n'est en fait que sa copie ! Mais alors, on nous spolie ? Et si la copie était plus "belle", plus vraie, plus tout ce que vous voulez que l'original ? Et si le véritable original de la Joconde (pour parler d'un tableau que tout le monde connaît) était en fait Mona Lisa elle-même ? C'est-à-dire la personne ! Celle qui s'appelle Mona Lisa, hein ? ça vous la coupe sévère là non ? Et comme ici il s'agit d'un film, oeuvre du 7ème art, comment distinguer la réalité de la fiction ? Est-ce que l'une dépasse ou rattrape l'autre ?
S'il faut faire une dissertation je pourrais commencer par affirmer que "l’œuvre est dans le regard de celui qui la contemple" mais aussi qu'il n'existe rien qui "entende" autant de conneries bêtises qu'une oeuvre d'art et ajouter que ceux qui la contemplent feraient souvent mieux de se taire. Mais ce serait vraiment dommage car l'un de mes grands plaisirs dans un musée est bien d'écouter les commentaires pédants érudits des contemplateurs. Et ce film est l'illustration suprême de ces bavardages pontifiants mais ô combien hilarants. Sauf que m'ennuyer au cinéma est beaucoup moins plaisant que m'extasier devant la prétention, et me désoler de mon ignorance sans doute mais peu importe.
A quoi donc tient que j'aie trouvé ce film absolument assommant ? Pas à la caméra amoureuse de Monsieur Kiarostami ni à la Toscane en tout cas. Et puis les comédiens sont très beaux. Juliette Binoche est en effet plus belle que jamais, bien coiffée/décoiffée, bien (dé)maquillée, vêtue d'une robe en soie et d'un soutien-gorge très visible qui aura un rôle primordial..., elle est toujours championne du monde toute catégorie pour passer du rire aux larmes dans le même plan. Et William Schimell, chanteur d'opéra de son état, dont c'est le premier film, a beaucoup de prestance et énormément de culot pour passer son temps à repousser consciencieusement Juliette.
Mais ça ne tient pas la route, je n'y ai pas cru. Tout sonne faux dès leur première rencontre. Dans la première partie du film, l'homme et la femme sont censés ne pas se connaître mais ils partent ensemble en voiture (Abbas, champion du monde palmé des films en voiture) et je n'ai jamais vu deux adultes consentants être autant agacés par la présence, les remarques et les répliques de l'autre.
Dans la seconde partie, à la suite d'un malentendu, une serveuse de café les prend pour mari et femme. Ils ne démentent pas et se mettent à jouer le rôle d'un couple vieux de 15 ans qui a mille choses à se reprocher. S'ensuit une scène de ménage interminable où l'on se demande comment l'un et l'autre peut "encaisser" ce que l'autre lui dit sans le planter là sans autre forme de procès. Au milieu de cette querelle parfois surgissent des jacasseries autour de tel tableau ou telle statue au milieu d'une place.
Que le couple de la première partie ne finisse pas dans le même lit me paraît très sage, que le second se sépare, plus avisé encore.
Quant à Juliette, si belle... il m'a semblé pour la toute première fois qu'elle "récitait" son texte et qu'elle était atteinte des mêmes tics et rictus insupportables isabellhupperiens. A surveiller.
Mais je ne voudrais pas vous détourner d'un film devant lequel beaucoup s'extasie et je vous livre ci-dessous l'avis éclairé de Didier Péron de Libération (c'est du miel !!!) :
"Le babillage n'est probablement qu'un leurre pour dresser soudain dans le vide démeublé d'une fin d'après-midi le bilan moral des expériences et des émotions encloses dans le seul réceptacle mystérieux des visages que la caméra du cinéaste ne quitte presque jamais du regard une vérité immortelle se fait jour et, sans phrase ni pitié, nous transperce le coeur".
Il n'est pas interdit de rire.
Commentaires
Ah ah ah
Je me gausse, donc
Gausse toi, le babillage n'est qu'un leurre...
Probablement.
Mais le voile de l'illusion qui nous aveugle n'est lui-même qu'une tromperie nous éloignant de la vérité d'un certain côté
La vérité dont témoigne l'oeuvre ne peut en aucun cas se prévaloir d'une réalité qui ne tiendrait pas compte d'une approche visionnaire de l'artiste en tant que sujet, voyons.
Je ris donc !
Oui !
Rions en chœur improbables paillasses que nous sommes !
La Pyrénéenne : moqueuse ! C'était un piège. Tout cela est très sérieux.
Fred : j'aime bien mieux paillasser que bavasser.
Et si d'un certain point de vue on compare à langedep..eR ? Quoique tout à fait illusoire en permanence mais pas au même degré d'un autre côté.
Ce que nous faisons en aparté ne sera jamais révélé sous le toit de cette route qu'on se le dise clairement de tous les points de vue possibles
Entièrement d'accord avec ta critique détaillée. Sur mob blog je résume le sentiment que j'ai eu en disant que Copie conforme n'était pas un film, mais l'idée d'un film.
PFff. Un film sans coeur, sans émotion avec du blabla intello prise de grosse tête... Sans la Toscane je mettais même pas une étoile. Et toc !
L'avis éclairé du journaliste de Libération m'évoque cette question : mais qu'est-ce que la "vérité immortelle" ? Copie ? Original ? Là est la question n'est-ce pas ! Tout cela sonne d'un creux, c'est à se tordre de rire... Car enfin, ce film donne surtout l'impression que personne n'avait rien à dire... et quand on a rien à dire... on "babille" et on fatigue son entourage !
Oui, et il n'y a rien de plus simple que de placer des mots en 'isme' les uns derrière les autres pour donner l'illusion de faire du sens ! Ils étaient bien fatigants tous les deux ainsi que le journaliste... mais drôles quand même, finalement.
Tant mieux pour ceux qui font semblant d'être heureux en amour, il vaut mieux qu'ils ne comprennent rien au film de Kiarostami, ni sa beauté, ni son humour, ni sa réflexion sur le jeu de miroir entre l'original et sa copie. Ceci dit, ils doivent aussi faire semblant d'aimer l'Italie, où bien malins sont ceux qui distingueraient la copie romaine de l'original grecque. Quant à moi, en amour, "mes bras sont rompus pour avoir étreint des nuées" (Baudelaire), et j'ai été très touché par ce film. Ce qui me paraît être "intello" et cuistre c'est d'argumenter en ricanant.
François
Tant mieux pour ceux qui font semblant d'être heureux en amour, il vaut mieux qu'ils ne comprennent rien au film de Kiarostami, ni sa beauté, ni son humour, ni sa réflexion sur le jeu de miroir entre l'original et sa copie. Ceci dit, ils doivent aussi faire semblant d'aimer l'Italie, où bien malins sont ceux qui distingueraient la copie romaine de l'original grecque. Quant à moi, en amour, "mes bras sont rompus pour avoir étreint des nuées" (Baudelaire), et j'ai été très touché par ce film. Ce qui me paraît être "intello" et cuistre c'est d'argumenter en ricanant.
François
Permettez donc que je ricane encore un peu pendant que vous continuez d'étreindre savamment et avec émotion.
Je regrette je n'ai pas révisé mon ptit dico des citations sur l'amour alors seule une "pensée" de Woody Allen me vient là tout de suite : "L'intelligence artificielle se définit comme le contraire de la bêtise naturelle."
P.S. : et soignez moi ce hoquet !
Oui, Pascale, vous avez peut-être raison mais, avec mon intelligence artificielle et ma bêtise naturelle, je trouve la citation de Woody Allen sans rapport avec le sujet. Et vous interprétez bien mal celle de Baudelaire. Ceci dit vous pouvez continuer à vous lâcher, moi j'arrête là, les échanges aigris ne m'intéressent pas et je quitte la "Route du cinéma" où, quand moi j'ai le hoquet, vous m'avez tout l'air, vous, de faire du surplace.
Sans rancune, et sans ricanement !
Du Festival de Cannes à Lucignano et Cortona, en Toscane, un tour pour découvrir les lieux de “Copie conforme”:
http://coloritoscani.blogspot.com/2010/06/du-festival-de-cannes-lucignano-sur-les.html
Oh la la, il faut donc tout expliquer. Mais voulez-vous dire qu'avec votre premier commentaire pas méprisant pour un sou, vous souhaitiez engager un "échange" ?
La phrase de Woody n'a rien à voir avec le sujet (le film) certes, mais je voulais vous dire par auteur interposé (ça prouve la culture non ?) que votre intelligence me semble artificielle et votre bêtise naturelle. C'est plus clair comme ça ?
Sachez qu'en ricanant bêtement je suis tout sauf aigrie. Continuez donc à vous enivrer de votre suffisance.
Et c'est étrange, mais tout en sautillant sur place je me dis que vous repasserez par ici et que vous pourrez lire ceci : bon débarras !