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VIOLETTE de Martin Provost ****

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Pendant la guerre Violette Leduc partage pendant quelques mois la vie de l'écrivain Maurice Sachs à la campagne.

Mais Maurice, homosexuel, repousse sans ménagement Violette éperdument amoureuse de lui. Et pour calmer ses ardeurs, il l'encourage à écrire. De retour à Paris, Violette survit grâce au marché noir et dans son minuscule appartement, elle remplit des pages et des cahiers. Elle souhaite manifester son admiration à Simone de Beauvoir dont elle a lu un livre et en tombe follement amoureuse. Simone de Beauvoir repousse cet amour mais reconnaît en Violette un écrivain hors du commun. Elle ne cessera jamais de l'encourager, de la stimuler et même de l'aider financièrement à son insu afin qu'elle puisse continuer à écrire malgré l'absence de succès en librairie. Leur amitié durera toute leur vie malgré le tempérament envahissant, gémissant de Violette.

Difficile de ne pas voir en Violette la petite soeur d'infortune de Séraphine tant le destin chaotique des deux femmes offre de similitudes. L'une et l'autre ont été malmenées par leur époque malgré leur talent voire leur génie et protégée par un bienfaiteur aimant et providentiel. Mais autant Séraphine était discrète et introvertie autant Violette est exubérante et exigeante. Capable de faire un esclandre dans une libairie parce qu'on n'y trouve pas son ouvrage "Il n'y en a que pour Julien Green ici !" ou de se lamenter de ne pas être éditée dans une collection suffisamment prestigieuse chez Gallimard.

Mais comme parfois ces êtres excessifs, exaspérants,  Violette, écorchée vive est infiniment attachante, émouvante. Elle se jette littéralement au cou des personnes qu'elle aime, toujours passionnément. Homme ou femme, peu importe, elle est une grande amoureuse insatiable obsédée par sa laideur mais néanmoins désirée par les hommes et les femmes rencontrés. Toujours encouragée par Simone qui l'exorte à se servir de sa vie pour alimenter ses écrits, Violette puise dans ses souffrances de toujours pour écrire. Son oeuvre commence d'ailleurs par ces mots et cette constatation terribles : "Ma mère ne m'a jamais tenu la main". Une mère extravagante, haïe et adorée, parfois envahissante puis soudainement absente dont elle dira pourtant : "je ne survivrai pas à sa mort". De sa naissance pas désirée, de sa bâtardise (son père ne l'a jamais reconnue) une tare pire qu'une souillure ou un vice à l'époque, Violette construit ses écrits douloureux avec des mots poignants : "Mon cas n'est pas unique : j'ai peur de mourir et je suis navrée d'être au monde". Et les titres de ses livres sont autant de cris déchirants où elle utilise ses propres expériences pour parler de l'homosexualité, du plaisir féminin, de l'avortement, de l'amour pas partagé : L'Asphyxie, l'Affamée, Ravages, La Bâtarde... Et Simone ne cessera de lui répéter qu'elle en parle comme personne à tel point que ses écrits jugés scandaleux peinaient à obtenir les faveurs des comités de lecture masculins de l'époque. "On me mutile" disait-elle lorsqu'on lui demandait d'édulcorer certains passages !

Les rencontres, les face à face des deux femmes, des deux actrices sont des moments extraordinaires. Sandrine Kiberlain dont il faut pourtant un peu d'imagination pour l'envisager en Simone de Beauvoir est étonnante. Elle apporte à son personnage beaucoup de classe, d'autorité et d'intelligence. Et Emmanuelle Devos (et là aussi il faut se pincer pour la considérer laide malgré une prothèse nasale) est l'évidence pour le rôle physique, border line de cette Violette tantôt enfantine tantôt tyrannique.

En plus de réussir un beau film sur une femme et l'amitié de deux femmes exceptionnelles, Martin Provost nous donne l'envie de découvrir l'oeuvre d'une artiste méconnue.

 
«Je n'ai pas travaillé, je n'ai pas étudié. J'ai pleuré, j'ai crié. Les larmes et les cris m'ont pris beaucoup de temps... Le passé ne nourrit pas. Je m'en irai comme je suis arrivée. Intacte, chargée de mes défauts qui m'ont torturée, j'aurais voulu naître statue, je suis une limace sous mon fumier. » 

Commentaires

  • J'ai lu au moins "la bâtarde" jadis et "l'affamée" je crois, ce n'est pas une prose facile .. j'ai l'intention de voir le film, surtout pour les deux actrices.

  • Je n'en doute pas. Il paraît qu'il pouvait y avoir des pages et des pages sans ponctuation.

  • Merci Pascale pour ta note, qui m'a poussé à aller voir ce film. J'ai beaucoup aimé le personnage de Violette et m'y suis retrouvée à bien des égards. Tantôt forte et exubérante, tantôt fragile et plaintive. Je crois bien que je vais aller m'acheter un de ses livres demain. L'as tu déjà lue ?

  • Non pas encore lue... mais j'en ai bien envie !
    Moi aussi j'adore les films littéraires !

  • Bon je te dirais alors ! J'ai été acheter "l’asphyxie" aujourd'hui !

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