THE HOMESMAN de Tommy Lee Jones ***(*)
La vie est dure pour Mary Bee Cuddy en 1855. Seule, c'est-à-dire sans mari, elle vit de l'exploitation de sa ferme sur cette terre un peu désolée du Nebraska au rude climat.
Pieuse et généreuse, la jeune femme est désignée par sa "communauté" pour accompagner trois femmes qui ont perdu la raison. Leurs maris sont désormais incapables de les prendre en charge et elles trouveront refuge en Iowa auprès d'un pasteur et de sa femme qui acceptent de les recueillir. Pour parvenir à destination, plusieurs semaines de la traversée d'une région rendue dangereuse par le climat, les indiens et/ou les rôdeurs sont nécessaires. La rencontre inopinée de Marie Bee avec Georges Biggs, vagabond qu'elle sauve de la pendaison à condition qu'il accepte d'accompagner les quatre femmes dans leur périlleux périple se révèle providentielle. L'homme également appâté par 300 dollars promis se résout à contre cœur au voyage.
Tommy Lee Jones semble apprécier les curieux équipages. Dans son exceptionnel Trois enterrements déjà, il ramenait au prix d'un long périple, la dépouille de son ami Melquiades Estrada, stupidement assassiné par un ranger bas de plafond lui aussi du voyage, vers son Mexique natal. Ici il embarque ses personnages dans un étrange chariot/prison à travers les étendues désertiques, infertiles et hostiles du Nebraska balayées par les vents. Cette surprenante guimbarde n'est pas la seule bizarrerie du convoi. Les cinq "paroissiens" qui l'occupent ont chacun des particularités bien définies. Les trois "folles" dont on découvre en flash-backs douloureux les origines de la folie ont été confrontées à des épreuves inhumaines traumatisantes voire barbares. Mary Bee vieille fille malgré elle n'en peut plus de sa solitude et serait prête à épouser le premier venu. Qu'on lui oppose régulièrement sa dureté, son autorité sans tenir compte de sa détresse est particulièrement cruel. Quant à Georges Biggs, dont on n'est pas vraiment sûr du nom, il est une figure un peu mystérieuse du grand Ouest qui survit de façon marginale après avoir participé à une des guerres contre les Indiens.
On parle souvent de westerns crépusculaires lorsqu'il s'agit des films de Clint Eastwood, de John Ford ou de Peckinpah. Celui-ci en est un autre tant il véhicule de tristesse et de mélancolie et ne néglige pas pour autant les aspects classiques du genre. Dans des décors naturels à tomber de beauté malgré leur aridité, Tommy Lee Jones joue un vieux cow-boy bourru. Il ne s'épargne pas et il est génial dans ses excès. Sa première apparition en caleçon, sa danse indienne à deux reprises et son manque total d'empathie pour ses partenaires de voyage, au début en tout cas, le rendent antipathique, pathétique, ridicule et humain forcément, plus qu'humain.
Et des scènes magistrales d'émotion comme celle où les trois "folles" l'entourent dans une rivière, celle où Marie Bee vieille fille (Hilary Swanks, remarquable, à des années-lumière du glamour hollywoodien) le supplie de l'aider à garder sa dignité..., un moment hors du temps, hors de la réalité, au milieu de nulle part dans un hôtel de luxe, un climax bouleversant incroyable et inattendu élèvent ce road-movie parsemé d'embûches.
Et comme dans Trois enterrements, ou No country for old man dans lequel il n'était "qu"'acteur, deux westerns "modernes" comparés à celui-ci qui se situe davantage aux origines, Tommy Lee Jones se fait le chantre de la cause féministe en brossant le portrait de femmes fortes ou fragiles incapables de trouver leurs places dans un monde d'hommes particulièrement odieux... Etonnant.
Commentaires
je suis d'accord sur tout.Et je n'ai cessé d'y penser de la journée même pendant le "pas très interessant" dernier Cronenberg
Je vais de ce pas voir le Cro !
Je vais y aller incessamment sous peu ..
Film envoûtant je trouve anéfé.
Bonsoir,
ah enfin un film qui m'attire en ce moment je ne suis pas trop ciné...
Bisous bisous et bon WE avec du soleil qui revient.
Le western peut-il être autre chose que crépusculaire depuis la fin des années 50 ? C'est une question qui peut se poser devant ce soleil qui n'en finit plus de se coucher sur le genre ; et ce n'est pas moi qui vais m'en plaindre ! Dernière confirmation, "The Homesman" est en effet tout ce qui a été décrit ci-dessus et pourtant il m'a manqué ce petit plus d'intensité qui est anesthésié par la musique belle mais démonstrative de Beltrami. Très beau film néanmoins !
Je suis d'accord, il lui manque le petit truc en plus qui fait que...
Pour info, il s'agit d'un scénario que Paul Newman - ton Paulo - a tenté vainement de réaliser faute de financement.
Ah oui je sais :-(
Merci de ME rendre ce qui m'appartient... "MON" Paulo, j'apprécie :-)