LE COEUR BATTANT de Roberto Minervini ***
Un couple d'éleveurs de chèvres du fin fond du trou du cul du Texas a choisi de scolariser leurs 12 enfants à domicile. Scolariser est un bien grand mot car les enfants sont éduqués à grands coups de Bible et de préceptes liturgiques effrayants et d'un autre âge.
Sara, la plus ado des filles de ces dévots indécrottables croise la route et le regard de Colby, son voisin de ferme, brillant cow-boy adepte de rodéo, et découvre qu'il serait agréable d' "have fun" avec le jeune homme. Evidemment les parents ne l'entendent pas de cette oreille bigote et la jeune fille connaît dès lors les tourments du doute et de la rébellion coupable.
Ni réellement documentaire ni réellement fiction, le film de Roberto Minervini observe le quotidien de cette vraie famille texane dans un entre deux fascinant et sidérant. On surprend la famille à table. Alors que chacun mange en silence, le père lit la Bible. Les aînés éduquent les plus jeunes et s'occupent d'eux en permanence. A charge pour eux de leur apprendre à lire, à écrire, à compter. Lorsque les enfants s'étonnent de ne pouvoir aller à l'école, on découvre que les parents y sont allés mais n'ont pas souhaité que leurs enfants soient pollués par une éducation qui ne leur convient pas.
Corvéables à merci, les enfants ne chôment pas pour faire fonctionner la ferme. Le père, distant et éternellement insatisfait ne se manifeste que pour exprimer son mécontentement à Sara. Lorsqu'elle découvre ou imagine que sa vie pourrait être différente, elle tente de s'en ouvrir à sa mère. Cette femme mielleuse et au-delà de la bigoterie, tout en douceur et manipulation invoque Jésus et assure à sa fille qu'elle trouvera le salut et ses réponses dans la prière.
Fanatique pratiquante, la mère semble avoir totalement lavé le cerveau de ses filles les persuadant que la femme a été créée par Dieu pour souffrir et être l'esclave consentante de l'homme. Ses rengaines qu'elle psalmodie avec une gentillesse sirupeuse font froid dans le dos.
Doux, contemplatif, mystérieux, psychologiquement violent, ce Coeur battant effrayant de bondieuseries est parfois éprouvant et on souhaite de tout coeur à Sara de s'en sortir...