HIPPOCRATE de Thomas Lilti **
Benjamin, sur les traces de son père, Grand Mandarin d'un hôpital parisien, entre pour son premier Internat dans le service même où officie son géniteur. Pour Benjamin rapidement confronté à la réalité des malades, de leurs familles et des collègues, les périodes de doutes et de certitudes alternent.
Vous vous doutez peut-être à quel point j'appréhendais de découvrir ce film et paradoxalement il m'attirait irrésistiblement. Imaginez : plonger dans la vie des internes, moi qui en ai côtoyé des dizaines depuis 4 ans, du meilleur (aaaaaaaaaaaaah Aurélien) au pire (pas de noms :-)), c'était un sacré défi, voire une épreuve.
Ce ne fut pas l'épreuve redoutée. J'ai bien retrouvé certains aspects de ce que j'ai vécu, certaines situations aussi. Et je ne doute pas que l'hôpital ou certains hôpitaux manquent de personnel, de moyens, de matériels au point de ne pouvoir effectuer certains examens vitaux dont le fameux ECG dont il est moult fois question dans le film ! Pour ceux qui ne pratiquent pas couramment le jargon de la faculté il s'agit d'un électro-cardiogramme, essentiel pour savoir si un patient qui souffre de douleurs abdominales n'est pas en train de nous faire un ptit infarctus. Pauvre Monsieur Lemoine dont l'alcoolisme a réduit la capacité de signal d'alarme qu'est la douleur ! J'ai bien retrouvé l'arrogance du "patron" qui tente de se justifier "protéger" en noyant la pauvre épouse d'un patient DCD d'informations dans un volapük hospitalier ! J'ai bien compris que le personnel exclusivement composé d'êtres humains... avait grand besoin de décompresser en dessinant des bites, des couilles, des chattes sur les murs de l'internat, en jouant au baby foot et en proférant des horreurs. Mais bon, rien de révolutionnaire ni de particulièrement émouvant ou éprouvant.
Le réalisateur, qui a été médecin et fils de médecin, s'inspire de son histoire personnelle. Mais si l'aspect documentaire du film m'a semblé très réaliste il est atténué par la partie romanesque à laquelle je n'ai absolument pas adhéré. D'abord l'erreur de casting. A aucun moment je n'ai cru en Vincent Lacoste interne. Non pas que je souhaite qu'il se cantonne dans le registre comique où il a excellé jusque là, mais franchement, il n'est pas crédible. Trop jeune, trop léger, trop enfantin !
Grâce au personnage d'Abdel (Reda Kated exceptionnel comme toujours quant à lui, le médecin Cécile... dont on rêve) on découvre une catégorie de "blouses blanches" que je ne connaissais pas : les FFI (Faisant Fonction d'Internes). Il s'agit d'étrangers, médecins dans leur pays qui doivent repasser par l'Internat pour obtenir les équivalences et on imagine quel atout ils sont pour un hôpital. De vrais médecins payés d'un salaire de misère !
Par contre j'ai été particulièrement agacée une fois de plus par le fait que tout le personnel se ballade partout avec leurs blouses blanches, dehors, à la cafèt, dans le parking, ils fument dehors, s'asseoient par terre... puis reviennent dans les chambres. Une seule fois, on voit Adbel se laver les mains ! Comme toujours et dans la réalité, ils entrent dans les chambres en huuuuuuuuurlant "Bonjour" au point de faire sursauter les patients parfois assoupis. Comme si l'hôpital était un endroit pour se reposer. Certains malades très vilains insultent les gentilles infirmières qui ne bronchent pas. Les patrons "couvrent" les erreurs des internes parce qu'"on est pas des surhommes". Ils mentent aux malades, à l'entourage. Ils remettent des patients en phase terminale de cancer en "état" pour libérer un lit et les envoyer mourir ailleurs. Ils réaniment à tout prix une dame de 88 ans métastasée de partout qui a pourtant expressément demandé de ne pas s'acharner. Ils effectuent 58 heures d'affilée de garde...
Bref tout un état des lieux forcément alarmant, so what ? Le personnel médical, les patients, les familles, subissent. Les pouvoirs publics ne font RIEN. Mais tous ces constats qui se veulent réalistes sont je trouve anéantis par les aberrations fictionnelles. Difficile en effet d'imaginer entre autre qu'un interne aille sonner à la porte de l'épouse d'un patient mort pour lui demander pardon d'une erreur commise !!!
Bon... mais sans doute n'ai-je pas le recul nécessaire pour apprécier ou détester ce film !
Commentaires
Je ne l'ai pas encore vu mais ce film fait grand bruit (je bosse dans la santé tu sais). Apparemment il est très réaliste et a bp plu aux jeunes médecins que je cotoie !
Ouais ça va jaser, commenter, s'offusquer...
et blablabla.
Beaucoup de bruit j'imagine...
Je prédis 10 millions d'entrées :-)
J'hésite beaucoup, je n'ai pas envie de me plomber le moral. Pourtant, j'ai entendu deux émissions de radio qui m'ont donné envie d'y aller.
Tiens j'ai pensé à toi : j'ai décroché une interview avec le réalisateur ce midi pour une des journalistes avec qui je bosse. Comme quoi, même sans le savoir, je bosse un peu sur le ciné !! Ca me rappelle mon mémoire ;)