Synopsis : En 1931, fraîchement éconduit par Hollywood et sommé de rentrer en URSS, le cinéaste Sergueï Eisenstein se rend à Guanajuato, au Mexique, pour y tourner son nouveau film, Que Viva Mexico !

Chaperonné par son guide Palomino Cañedo, il se brûle au contact d’Éros et de Thanatos. Son génie créatif s’en trouve exacerbé et son intimité fortement troublée. Confronté aux désirs et aux peurs inhérents à l’amour, au sexe et à la mort, Eisenstein vit à Guanajuato dix jours passionnés qui vont bouleverser le reste de sa vie.

Voir ce film un 14 juillet c'est assister à un véritable feu d'artifice cinématographique. Aussi agaçant que fascinant, Peter Greenaway en forme olympique et internationale semble avoir filmé son admiration pour le Maestro Russe les doigts dans la prise.

Sans doute pour évoquer quelques jours de la vie d'un cinéaste qui semble particulièrement barré, fallait-il mettre la réalisation au niveau, quitte à parfois franchement donner le tournis ! Mais à part une scène assez longue où un personnage (Lisa Owen dans le rôle de Mary Craig Sinclair la femme d'un des bienfaiteurs d'Eisenstein) tourne autour du lit dans un sens et la caméra dans l'autre sens, nous obligeant à fermer les yeux pour reprendre une vision nette et normale, c'est plutôt éblouissant.

En outre, Greenaway démontre qu'il n'y a pas besoin de la 3D et des lunettes qui pèsent un âne mort vont avec pour donner une impression de 3D : effet très bluffant. Il manie le split screen (écran divisé), mélange les images et photos du film avec celles de la réalité, use et abuse du name-droping ("lâchage de noms") jusqu'au vertige et j'en passe d'autres fantaisies et prouesses techniques.

Il est évident que pour voir et apprécier un tel film, il faut accepter de se laisser emporter dans le tourbillon incessant d'images somptueuses certes mais aussi frénétiques. Attention, rien à voir avec le filmage façon caméra à l'épaule, ici la caméra est souvent sage mais c'est la profusion d'images qui fait tourner la tête.

L'autre atout, l'autre audace, l'autre découverte tiennent à l'acteur qui interprète Eisenstein ! Une révélation, un peu comme dans une autre époque le fut Tom Hulce, qui hélas n'a pas transformé son prodigieux essai. On souhaite une autre carrière à Elmer Back qui s'est abandonné avec audace et abnégation à la logorrhée parfois assommante d'Eisenstein. Il joue de son physique ingrat mais pas tant que ça pour déverser ses plaintes, son dégoût de soi jusqu'à une scène très très longue, très bavarde et très explicite, exhibitionniste, à la fois drôle et inquiétante. Et pour une fois que ce ne sont pas les femmes qui sont nues, on ne va pas se plaindre.

Sa relation avec son guide au Mexique Palomino Canedo (Luis Alberti, excellent aussi) se transforme en une magnifique histoire d'amour sincère, partagée et forcément cruelle puisque les histoires d'amour finissent mal en général, mais aussi d'initiation au plaisir, à la sexualité et... à la sieste.

Eisenstein est touchant, extravagant, fatigant comme ce film en forme d'hommage cinématographique, comparable à nulle autre.