Photo : Loic Benoit

C'est désormais une tradition et l'un des moments que j'apprécie le plus, lors du Festival Lumière, le réalisateur à l'honneur et parfois d'autres, sont invités à proposer leur version du tout premier film que Louis Lumière a tourné en 1895, la sortie de l'usine par les employés de l'époque. C'est donc Martin Scorsese cette année qui était charge de réaliser ce remake avec comme chaque fois, la plupart des invités acteurs et réalisateurs présents en tant que figurants. Devant le Hangar du Premier Film.

Quentin Tarentino, Paolo Sorrento, Michaël Cimino, Xavier Dolan, Jerry Schatzbert, Pedro Almodovar s'y sont déjà confrontés. Hélas, ce prestigieux rituel n'avait pas encore été mise en place en 2009 lors de la première édition à laquelle j'ai assistée..

Je suis arrivée presque deux heures en avance car en dehors des films c'est un des moments que j'attends le plus lors de ce Festival... J'ai attendu patiemment et ce fut une assez grande déception. Dès que le tournage a été terminé, je me suis dit que Marty ne semblait pas avoir "joué le jeu" comme Quentin Tarantino, Pedro Almodovar ou Xavier Dolan qui avaient fait participer le public, s'étaient beaucoup amusés avec lui.

L'année dernière, pas moins de cinq prises pour Pedro et entre chaque prise, pendant qu'il visionnait les rush, des acteurs comme Keanu Reeves ou Rossi de Palma venaient faire le show pour faire patienter le public. C'était drôle, festif et magique.

Pedro donnait ses indications, on l'entendait. Il s'amusait à parler français... Bref, peu de choses mais c'est ce qui ravit les personnes qui se donnent la peine de venir sur place.

Magique aussi lorsque le jeune Xavier Dolan a fait sortir tous les figurants équipés de leur portable pour filmer le public en marchant ou faire un selfie.

Cette année... pas de magie, pas de fête. Si l'on voit quelques sourires sur les photos, nous n'avons pas été conviés à participer à cette joie.

Avec le recul je me dis que finalement si, Marty était sincèrement heureux et chaleureux. Et vous pouvez retrouver les photos de cette après-midi sur le site du Festival.

Mais je pense qu'en fait c'est l'entourage dans lequel je me trouvais qui ne fonctionnait pas. Evidemment, c'est difficile de vivre ce genre d'événements seule car il donne vraiment envie de communiquer, de s'extasier... Et cette fois j'étais entourée de gens qui se bousculaient et dont les commentaires étaient navrants. Je me suis souvenue que chaque fois que je me trouvais dans une foule à la Mostra de Venise à quel point les commentaires étaient toujours bienveillants et chaleureux : "qu'elle est belle ! qu'il est beau ! qu'il ou elle joue bien dans tel film !!!". Ici c'était franco-français : "qui c'est ? connais pas ? Il est bossu non ? T'as vu sa robe ? T'as vu ses cheveux ?" Du coup ça a dû me gâcher un peu le plaisir.

Michèle Laroque désignée comme premier rôle du film, c'est surprenant. Surprenant et pas vraiment sympa aussi que tous les artistes, acteurs, réalisateurs présents, et pas trop des têtes d'affiche pourtant, soient aussi distants avec le public (sauf Tahar Rahim, le seul que j'ai vu aimable avec le public. Pour Raphaël Personaz, je comprends... ce n'est sûrement pas agréable de se faire appeler Nicolas Duvauchelle :-) et Clémence Poesy a accepté sans rechigner un selfie avec un monsieur.  Mais les français ne savent décidément pas faire le show comme les américains. ça paraît peut-être superficiel ou cliché comme remarques. Mais à force de festivaler, je constate que les étrangers savent qu'ils sont là pour se faire admirer et "subir" la foule. Les français font la gueule. Je ne suis pas une chasseuse d'autographes, je préfère les photos, je ne veux pas déranger. Mais j'étais estomaquée qu'Alain Chabat se fasse supplier pour signer la photo d'une fan ! 

Alors après le tournage, ils sont rentrés dans leur voiture officielle aux vitres teintées et sont repartis.

Nous aussi.

J'espère que c'est juste mon ressenti et que ce festival jusque là si convivial ne va pas mettre des barrières (au propre et au figuré) entre le public et les artistes, et des tapis rouges, et des paillettes comme c'est le cas à Deauville ou Cannes. J'espère qu'il va garder sa différence. Sa proximité.

Pour me consoler, j'ai acheté trois photos à la traditionnelle brocante cinéma.