FESTIVAL INTERNATIONAL DU PREMIER FILM D'ANNONAY 2016 - HECTOR de Jake Gavin ***(*)
PREMIER FILM HORS COMPÉTITION
Hector est sans abri de longue date. Quinze années à vivre dehors dans la banlieue d'Edimbourg s'associant parfois quelque temps à des compagnons d'infortune comme Dougie, vieil homme très ronchon et Hazel une toute jeune fille. On ne connaîtra pas les histoires des uns et des autres.
Seul Hector nous mettra peu à peu sur la voie des raisons dramatiques (et pas forcément utiles pour faire aimer ce personnage) qui l'ont conduit à mettre quelques précieux trésors dans une valise et à prendre la route. Depuis, il prend ce qui vient, accepte les sourires, un petit déjeuner, les mots gentils comme des cadeaux et ignore, comme s'il les attendait ou les comprenait, les manifestations de rejet, l'agressivité et la méfiance des autres.
Comme chaque année, il se rend à Londres à pied et en stop où un refuge offre le gîte et le couvert pour quelques jours aux sans abri. Mais avant, il passe à l'hôpital faire quelques examens et apprendre qu'il doit se faire opérer au début de l'année suivante.
Cette année n'est décidément pas comme les autres car pour la première fois en quinze ans Hector essaie de reprendre contact avec sa sœur et son frère.
Décidément le froid humide et pénétrant de l'hiver, les paysages un peu désolés mis en images animés par un photographe, sont propices aux belles histoires d'hommes, des histoires de mélancolie comme disait Léo Ferré. Hector est un film-route qui serre le cœur car il parle de la misère humaine mais aussi de générosité, de fraternité sincère et de bêtise, de violence,de haine et de cruauté faciles. Hector est terriblement attachant, il ne se plaint jamais, il avance et souffre avec humilité et dignité. Le soin qu'il prend à rester un homme propre, se laver les dents, les cheveux, se brosser énergiquement les ongles comme derniers signes de son humanité sont des scènes touchantes qui en disent long.
Pour interpréter cet homme en errance et en souffrance, il fallait un acteur immense. Peter Mullan offre à son personnage une densité, une intensité, une profondeur démentes sans effet par l'authenticité et la puissance de sa présence. Son beau visage est un voyage, un paysage (formule lue et approuvée par le Directeur Artistique, merci chef !). Plonger dans son regard bleu délavé c'est voir toute la grandeur et la misère d'un homme, d'un être humain. J'avais envie que le film ne s'arrête pas, envie de continuer le voyage avec la crainte de le voir s'arrêter parce qu'Hector n'est pas bien en forme. Toutes ces années d'errance, de souffrances qu'il s'est infligé l'ont si profondément marqué, ravagé !
Mais pas la grâce de son interprétation solide et humble, Peter Mullan anéantit les faiblesses et facilité du scénario et portent certaines scènes à des sommets de drôlerie (une conversation et un fourire avec son frère) et d'émotion (les retrouvailles avec sa sœur).