Mr. HOLMES de Bill Condon ***(*)
Avec : Ian McKellen, Laura Liney, Milo Parker
En 1947, Sherlock Holmes approche le centenaire et Ian McKellen semble parfois en avoir le double... il rentre du Japon et retrouve sa résidence du Sussex qu'il partage avec sa gouvernante qui ne l'apprécie guère et son jeune fils Robert au contraire très admiratif de l'ex détective.
A l'hiver de sa vie, Sherlock perd un peu le Nord et le Sud et est obligé de se servir de ses manchettes comme pense-bête. Avant de mourir, il souhaite écrire le récit d'une affaire qui le hante depuis 30 ans, mais cela se révèle compliqué à cause de cette mémoire défaillante. Aidé par le jeune Robert, Sherlock va rassembler ses souvenirs, retravailler ses déductions et finir par comprendre, comme une erreur commise toute sa vie, que trouver et révéler la vérité n'est pas forcément exemplaire ni idéal.
Ce film n'est pas du tout ce que j'en attendais. Le rythme lent, le scenario qui m'a semblé inutilement compliqué par l'enchevêtrement de plusieurs intrigues m'ont d'abord déroutée et peu à peu, gagnée par la mélancolie ambiante, je me suis laissée entraîner jusqu'à avoir le cœur étreint par une profonde et durable émotion, au point de rêver du film la nuit dernière. C'est tout à fait exceptionnel que je rêve d'un film même si j'ai passé et passe encore des moments passionnées avec Lui.
Sherlock Holmes est une véritable légende au point que des années après sa retraite on le reconnaît encore dans la rue, on lui demande des autographes jusqu'au Japon. La célébrité ronchonne un peu et assure que le Docteur Watson (mort depuis longtemps) est à l'origine de la légende. Ses nombreux écrits ont toujours transformé la réalité mais n'est-il pas vrai que si la légende est plus belle que la réalité, il faut imprimer la légende ? A ce titre, quelle déception pour une fan japonaise de découvrir que Sherlock Holmes n'a jamais porté le deerstalker et qu'il a toujours préféré le cigare à la pipe.
De nombreuses anecdotes de ce style parcourent le film discrètement. Sherlock Holmes se rend même dans un cinéma pour voir à la fois amusé et agacé l'adaptation d'une de ses enquêtes. Mais ce qui le dévore c'est cette très ancienne affaire Kelmot qu'il veut élucider. Et sur le chemin de l'enquête, le réalisateur explore avec beaucoup d'élégance et de finesse, la vieillesse, la maladie, la transmission, l'amour et surtout les regrets éternels qui font que parfois la vie est envahie de remords et de fantômes.
Et c'est cette impression de ratage qui rend le film infiniment troublant et mélancolique. Et la dernière demi-heure absolument bouleversante. La relation avec le petit garçon que la mère veut éloigner du vieil homme est forte et sincère. Leurs séances d'apiculture sont vraiment belles et chargées de sens comme la peur qu'il nous fait... Il y a cette vision poignante de ce qui reste d'Hiroshima où pousse peut-être une plante magique. Il y a cet acte de pure gentillesse, de pure générosité, si simple : écrire une lettre. Et puis, il y a ce moment sur un banc, où tout s'explique, où tout se perd. Le dialogue d'une beauté, d'une intelligence rares, les sentiments qui s'y jouent font de cette scène un sommet de délicatesse, de tristesse et d'émotion. C'est un crève-coeur pourtant d'une infinie douceur.
Dominant cette mythique évocation, dans une région filmée comme un paradis terrestre, il y a Ian McKellen vif, élégant, alerte puis usé, fatigué, décrépit l'instant d'après, tout en lassitude, et sensibilité, beau et légendaire comme son modèle. Pfiou.
Commentaires
Hey comme je suis contente de lire enfin un avis positif sur ce film ! Car il faut bien reconnaître que je n'ai lu jusqu'à présent que des avis très négatifs. Alors que j'en étais ressortie émue et touchée, même si je reconnais ses faiblesses aussi. Bref je suis contente de constater qu'il en fut de même pour toi et je me sens tout de suite moins seule sur ce coup-là ;-)
On parle surtout de la performance de Ian McKellen mais le film est vraiment magnifique.
Comme je le disais, j'ai été un peu déroutée au début, ne sachant trop où j'allais et puis après... ce charme, cette mélancolie.
J'attends ce film avec impatience. On vient d'écouter un autre Sherlock "écrit" par Watson après la mort du détective... Une vision nouvelle par Anthony Horowitz.
http://www.babelio.com/livres/Horowitz-La-Maison-de-Soie-le-nouveau-Sherlock-Holmes/526131
Il en fait couler de l'encre ce Sherlock. Ici le Dr Watson est déjà mort, donc, avant Sherlock !
Moi aussi bien aimé ce film pour l'ambiance anglaise, le portrait de Sherlock Holmes vieillissant (enfin... vieux, quoi), et l'attachement aux abeilles :)
Les mauvaises critiques viennent peut-être de la façon dont Sherlock apparaît dans les dernières adaptations tv/ciné? Après Benedict Crumberbatch et Tony Stark (je n'arrive jamais à me souvenir du nom de l'acteur), tout fringants et menant leurs enquêtes au pas de course... le rythme calme du film a pu frustrer...
C'est Robert Downey Jr :-)
Et effectivement ici c'est plus une réflexion sur la vieillesse d'un mythe qu'une enquête trépidante. Mais que c'est beau :