de Thomas Vincent ***

Avec : Thierry Lhermitte, Géraldine Pailhas, Pierre Curzi

Seul survivant d'un gravissime et rarissime accident, Paul, après deux mois d'hôpital en sort triste et affaibli. En plus de l'accident, il vit un drame épouvantable. L'idée de reprendre son travail de cadre supérieur dans une grande entreprise de Montréal ne l'enchante guère et il se sent totalement étranger à sa femme et ses deux fils qui ne lui adressent qu'une attention factice.

Au hasard de ses longues promenades solitaires (son médecin lui a conseillé de beaucoup marcher pour récupérer), il trouve un journal et répond à la première annonce d'emploi qu'il remarque. Malgré son CV inapproprié et quelques réticences du propriétaire de la boutique "Dog Dog Walk", il devient promeneur pour chiens. Ce changement radical va forcément bouleverser pas mal de vies et pas uniquement la sienne. Notamment  celle de sa très matérialiste, carriériste et ambitieuse épouse qui compte sur un procès juteux que Paul devrait intenter contre la société responsable de l'accident dont il a été victime.

Voilà un film très inattendu. L'affiche très laide, le sous-titre débile "il avait une vie de chien, il a décidé d'en changer", la bande-annonce totalement à côté de la plaque ne sont guère attirants. Mais Thierry Lhermitte semblant y promener son air absent et dégagé de la réalité m'avait bien plu. J'ai bien fait de voir ce film. Alors que je pensais assister à une comédie légère, un tantinet burlesque, j'ai découvert un drame d'une rare profondeur à propos d'un homme accablé de chagrin, revenu miraculé, de façon incompréhensible d'un accident incroyable. Cette résurrection, même si elle le met face à un chagrin insurmontable, semble lui ouvrir les yeux sur une réalité : son travail ne l'épanouit pas et surtout sa femme et ses deux fils ("une multi-nationale à eux trois") sont devenus de parfaits inconnus à ses yeux. 

Paul ne trouve plus aucun sens à cette vie. Il se laisse désormais porter par les événements, fait des rencontres providentielles. Notamment celle d'un avocat (Pierre Curzi, parfait en mode consolatoire de grande classe).

Et l'on suit Paul dans son errance tantôt douloureuse, tantôt plus douce. Mais constamment touchante. Et à ce titre Thierry Lhermitte révèle ici des trésors d'émotion qu'il nous avait jusque là bien cachés. J'ai plus le souvenir de ces rôles teintés d'ironie et de second degré. Le voir s'écrouler, terrassé de chagrin dans la rue et se recroqueviller sur lui-même, l'entendre dire "sans vous, je  me serais jeté dans le Saint Laurent" serre le cœur.

A noter, fait rarissime, Géraldine Pailhas très bien en peste arriviste et sans cœur. Elle fait cela très bien et va très très loin ici dans l'ignominie et les bassesses.

Un très joli film donc sur la dépression, les événements et les pertes inconsolables qui font que la vie ne sera plus jamais la même, la prise de conscience de l'importance des choses, de la futilité de certaines autres. Et un Thierry Lhermitte tendre, bouleversant et d'une admirable dignité dans ses choix...