MOI, OLGA
de Petr Kazda, Thomas Weinreb ***
avec Michalina Olszanska, Martin Pechlat, Klara Meliskova
Olga a réellement existé dans les années 70 en Tchécoslovaquie.
Bien qu'issue d'une famille bourgeoise, Olga se sent différente et inadaptée à son entourage. Fugueuse très tôt, elle est placée dans une institution où les autres filles la maltraitent. Sa tentative de suicide échoue. En la récupérant à l'hôpital après un lavage d'estomac, sa mère lui lance : "il faut beaucoup de courage pour se donner la mort. Tu n'auras jamais ce courage." Devenue adulte, Olga vit dans une cabane insalubre et vient régulièrement demander de l'argent à sa mère dentiste qui lui prescrit à sa demande mais sans hésitation des médicaments. Olga découvre par ailleurs qu'elle est homosexuelle, ce qui n'arrange pas son intégration au monde. Ses différents emplois se soldent régulièrement par des renvois.
Olga n'est qu'une petite brindille de haine et de souffrance. Les textes qu'elle écrit et qu'elle lit en voix off sont d'une beauté et d'une brutalité sans appel. Si le monde ne comprend pas Olga, elle le lui rend bien et n'a que mépris et aversion pour lui.
Les nombreuses ellipses et scènes inexpliquées n'aident guère à comprendre la personnalité de la jeune fille. Elle vomit puis, jetée par terre, elle est rouée de coups dans le ventre par les autres pensionnaires (est-ce un hôpital ? est-ce une maison de redressement ?) et ensuite on découvre des toilettes sans doute pleines de sang (le film est en noir et blanc). Olga a-t-elle subi un avortement à force d'être battue ? On ne sait pas, on ne comprend pas tout mais malgré le malaise qu'Olga crée par sa démarche, son regard, ses silences elle nous ensorcelle quasiment.
Austère et froid le film ne nous donne ni la possibilité de juger ni d'aimer Olga. Mais on perçoit à de nombreuses reprises, l'incapacité de la société et de la psychiatrie de l'époque d'aider cette jeune femme contre elle-même et contre les autres. Même lorsqu'elle en fait la demande "j'ai besoin de repos, enfermez-moi", on lui répond qu'un hôpital psy n'est pas une maison de repos et qu'une thérapie c'est long. Olga est-elle malade ? Est-elle "folle" ? Elle-même aura ces mots "je suis folle, mais ma folie est clairvoyante". Et pourtant, lors de son procès, elle demandera à son avocat de ne surtout pas plaider la folie. Olga se veut responsable de ses actes et souhaite infliger une punition sévère à la société, au nom de tous les souffre-douleurs. Sa plaidoirie lors de son procès est un coup de poing.
Dans le dernier quart d'heure, les réalisateurs semblent opter définitivement pour la schizophrénie d'Olga dont le discours devient totalement irrationnel. La toute dernière image, plus glaçante que tout le reste du film est affligeante de cruauté.
Quant à Olga, elle est interprétée par une actrice de 24 ans Michalina Olszanska absolument hallucinante. Evidemment elle est présente à quasi chaque plan, mais il est impossible de détacher son regard du sien. Et son incroyable ressemblance avec un autre personnage ajoute encore au trouble, comme si Mathilda, seule à crever, était revenue se venger.