L'ORNITHOLOGUE
de Joao Pedro Rodrigues **
Avec Paul Hamy
Synopsis : Fernando, un ornithologue, descend une rivière en kayak dans l’espoir d’apercevoir des spécimens rares de cigognes noires. Absorbé par la majesté du paysage, il se laisse surprendre par les rapides et échoue plus bas, inconscient, flottant dans son propre sang.
Etrange synopsis puisque Fernando ne flotte en aucun cas dans son propre sang. Il est échoué, inconscient et baigne dans la rivière. Deux randonneuses chinoises qui font le Chemin de Compostelle le tirent de ce mauvais pas. En remerciement, Fernando leur promet de les remettre sur le droit chemin car elles se sont fortement égarées. Mais elles estiment rapidement qu'il a un corps adéquat pour le bondage. Et elles n'ont pas tort, Paul Hamy est sublime... Mais revenons-en à notre ornithologue.
Dès les premières images on se love littéralement dans ce film et comme le personnage on observe une nature superbe, sauvage, comme si l'homme n'y avait pas encore mis les pieds et le bordel. La région est sublime et l'aspect documentaire gommé par la présence irradiante de l'acteur Paul Hamy de plus en plus solide et totalement seul dans la première partie, captivante même s'il se passe peu de choses, il se lave, mange, téléphone à son ami qui s'inquiète parce que Fernando est malade et doit prendre ses médicaments... On en saura pas plus.
Fernando est tellement concentré sur la contemplation des oiseaux qu'il ne prend pas garde aux rapides qui lui font perdre le contrôle de son embarcation. Le voilà perdu en pleine forêt.
Au cœur de la forêt, les deux chinoises qu'il rencontre, aussi sottes que mystérieuses, le mettent en fâcheuse posture. Mais il parvient à leur échapper et croise la route, le regard et plus si affinités d'un berger sourd et muet. Croiser la route de Fernando rend les gens sexuellement très énervés. On peut comprendre. Mais l'histoire entre Fernando et Jésus finira également en jus de boudin...
On ne comprend pas tout, mais c'est tellement beau et mystérieux qu'on se laisse porter par ce périple étrange qui passe de la contemplation à l'instinct de survie. Et puis la langue portugaise est tellement belle et l'on se laisse porter par l'étrangeté. Il ne faut pas être particulièrement cinéphile pour penser au cinéma du thaïlandais Apichatpong Weerasethakul.
Mais dans la dernière partie, le réalisateur s'égare dans un salmigondis mystico religieux absolument incompréhensible. Et de sublime le film se fait tout rikiki car si le réalisateur se place à des hauteurs religieuses et spirituelles inaccessibles, il est impardonnable qu'il abandonne en chemin le spectateur mécréant. Il a également la très très mauvaise idée de remplacer progressivement Paul Hamy qui porte le filme, par lui-même qui n'a strictement aucune présence, juste pour le plaisir sans doute de mettre lui-même sa langue au fond de la gorge de l'acteur Xelo Cagiao aussi peu charismatique que lui, dans une scène laide et qui n'a strictement aucun intérêt.
Pour comprendre qu'il s'agit d'une évocation de la vie d'Antoine de Padoue, alias Fernando Martins de Bulhões, Saint lisboète, je suppose qu'il faut deux masters en théologie ou avoir eu le dossier de presse ce que le commun des spectateurs n'a pas. Si Joa Pedro Rodrigues veut continuer à faire du cinéma pour la poignée de fans qui le suivent c'est son droit le plus strict, mais c'est vraiment dommage.
Reste les images d'une beauté à couper le souffle, une première partie intrigante et belle, et Paul Hamy.