CORPORATE
de Nicolas Silhol **
Avec : Céline Sallette, Lambert Wilson, Stéphane de Groodt, Violaine Fumeau, Alice de Lencquesaing
Synopsis : Emilie Tesson-Hansen est une jeune et brillante responsable des Ressources Humaines, une « killeuse ». Suite à un drame dans son entreprise, une enquête est ouverte. Elle se retrouve en première ligne.
Elle doit faire face à la pression de l’inspectrice du travail, mais aussi à sa hiérarchie qui menace de se retourner contre elle. Emilie est bien décidée à sauver sa peau. Jusqu’où restera-t-elle corporate ?
Pour moi un "film d'entreprise" est plus terrifiant qu'un film d'horreur. Voir ces gens évoluer dans des couloirs, dans des bureaux, à la cafèt', à la machine à café... me file des frissons d'angoisse. Pour m'être retrouvée un temps dans ces endroits déshumanisés malgré tous les efforts pour faire chic, convivial ou efficace et ergonomique, chaque fois que je vois un film où les gens "travaillent", où les téléphones sonnent, les photocopieuses photocopient, je suis au bord du malaise. Je n'ai pas été victime de harcèlement moral car j'ai toujours pris mes jambes à mon cou pour me tirer à temps. Mais c'était un autre temps, une autre époque, un autre siècle où l'on pouvait démissionner et retrouver un emploi l'instant d'après. Aurais-je été si radicale aujourd'hui ? Peu importe, mais il se trouve que cette histoire je n'y ai pas cru.
Bien sûr, j'ai cru au suicide de l'employé dont on veut se débarrasser sans le lui dire, on entend suffisamment parler de ces drames actuellement. La méthode de la RH (responsable des ressources humaines) est simple. Elle reçoit les personnes posées sur un siège éjectable et a pour mission de les faire démissionner d'elles-mêmes. Elle leur fait des propositions qu'elles peuvent refuser mais qui rendent les choses difficiles et contraignantes pour l'employé, comme de proposer une réaffectation à la limite de mobilité qui supposerait 4 heures de transport quotidiennes. Par exemple.
Le vocabulaire et la méthode utilisés m'ont paru affligeants. On a l'impression que la RH, d'une intelligence exceptionnelle se retrouve face à des crétins qui ne comprennent rien au manège savamment élaboré et cèdent à la première menace à peine dissimulée. Les tournures de phrases de psy de comptoir : "j'entends ce que vous dites... c'est à vous de me le dire... je ne peux décider à votre place... la réponse est en vous...", m'ont profondément agacée. En moins de temps qu'il n'en faut pour dire "crève connard", l'interlocuteur est retourné comme une crêpe et prêt à signer son arrêt de mort. Quelques irréductibles, plus crétins encore mais d'un autre genre, s'accrochent à leur agrafeuse comme des perdus, même s'ils sont placardisés. Je sais que ça existe, mais ici, je n'y ai pas cru.
Tout comme je n'ai pas cru à la rédemption, à la prise de conscience de la RH aussi rapides que spectaculaires. Une salope peut-elle en deux temps trois mouvements (car le film est construit de telle sorte qu'on a l'impression qu'il se déroule sur quelques jours... ce qui ne plaide pas en sa faveur) se transformer en madone, en justicière de la cause perdue prête à tout sacrifier : son travail, son train de vie (elle gagne 100 000 €uros par an...) et tutti quanti. Evidemment, il existe des Edward Snowden et des Erin Brokovitch mais ça ne court pas les couloirs de la Défense, si ?
Comment croire aussi au fait que la Responsable de l'Inspection du Travail chargée de l'enquête devienne copine avec celle sur qui se portent les soupçons... et cerise sur le pot de départ, l'emmène sur les lieux d'un contrôle inopiné dans une entreprise. On fait réaliste et plausible ou pas mais les deux fonctionnent difficilement. Il est possible évidemment, il s'agit d'une fiction, que ces deux personnes sympathisent, why not ? Mais de là à emmener la RH à talons hauts sur le toit d'un immeuble en construction pour virer 30 mecs qui travaillent au mépris de certaines règles de sécurité... Au secours !!! J'ai bien cru que les deux nanas allaient être jetées par dessus bord.
En un mot comme en cent, ça se veut réaliste et ça finit rapidement par ne plus l'être, trop d'incohérences, de raccourcis, d'invraisemblances tuent le réalisme et, on ne parvient pas non plus à entrer en empathie avec la victime, sa famille, car tout est froid.
MAIS, dans ce film il y a Céline Sallette et une nouvelle venue Violaine Fumeau qui font un super travail. Elles sont de la plupart des plans et contrairement à ce que fait ce monsieur, les deux actrices sont amoureusement filmées (sans avoir besoin de les mettre à poil sous la douche) et très investies dans leur rôle/mission. Céline Sallette et son beau visage, son regard d'acier, ses tailleurs de working girl implacable est impressionnante.
Commentaires
Moi j'ai trouvé très intéressant et réaliste les deux tiers du film mais comme toi le côté "justicière" m'a agacé.
Elle ne veut pas endosser mais est prête à faire couler le titanic enfin juste l'équipage avec elle (sa phrase à l'inspection du travail: "je ne veux pas être seule à payer")c'est pas très plausible tout ça
Moi le côté "j'u crois" a duré un quart d'heure.
La remarque "je ne veux pas être là seule à payer"... grande classe pour la madone des 7 douleurs !
Je râle souvent au cinéma, surtout français, pour le côté irréaliste. C'est si dur d'avoir l'air plausible ? Il y a pourtant matière à du bon cinéma avec la réalité, les Américains y arrivent.
Oui c'est incroyable de ne pas réussir à rendre ça plausible. ici la fiction gêne la crédibilité je trouve.
J'ai un gros coup de cœur pour Céline Sallette, et à chaque film que je vois et dans lequel elle participe, elle est parfaite. Si j'étais réalisatrice, elle serait d'office dans mon viseur. Tiens, j'ai un peu l'impression de vivre dans le même genre d'endroit que ces protagonistes : je travaille dans une de ces grandes tours que tu affectionnes tant. Il y a dix ans, on était les uns sur les autres. Maintenant, les couloirs sont quasi vides, un vrai no man's land. La nouvelle mode : passer tout dans "le cloud". Ils nous font végéter et attendent que les plus jeunes se cassent. Moi, je suis déjà trop "vieille" pour avoir envie de chercher ailleurs, alors j'attends de voir la suite.
Oui elle est incroyable.
Tu me fous le bourdon avec ton histoire !
Bonjour Pascale, c'est le premier film que je suis allée voir après quinze (!) jours sans mettre les pieds dans une salle de cinéma faute d'envie. Et donc, j'ai plutôt bien marché même si je suis d'accord avec tes réserves. Les deux rôles féminins sont les plus intéressants car les plus fouillés. Je me suis demandée à quoi servait le personnage joué par Stéphane de Groodt. J'ai aimé l'avertissement dans le préambule: les personnages sont fictifs mais les méthodes de management ne le sont pas. Bon dimanche.
Bonjour Dasola. J'ai eu cette "crise" il y a peu mais elle n'a duré que 8 jours.
je pense que nous sommes assez d'accord même si leur soudaine complicité est un peu too much...
En revoyant l'affiche (très moche) je me suis demandée pourquoi Stéphane de Groodt s'y trouvait. Il est moins important que l'assistante de Lambert qui n'a pourtant qu'une scène. Myster8.
Ah ça pinaille, ça pinaille... Eh bien j'ai marché comme un seul home de bout en bout. J'adoré destester la RH, bien débinée par cette madame Columbo en jupe courte (Sallette et Fumeau excellentes comme le reste du cast). J'ai aimé aussi ce retournement (bien que prévisible je te l'accorde) qui ne me semble pas si invraisemblable au vu de la situation (qu'est_ce qu'on lui propose ? d'aller se jeter du haut d'une tour plus haute avec vue sur Central Park ?) Sans doute Silhol y va-t-il sans modération dans sa charge, mais pourquoi pardonne-t-on les excès des Américains (toujours cités en exemple alors qu'à bien y regarder ils n'ont pas la main moins lourde dans leurs réquisitoires, genre "in the air" avec Clooney pour n'en citer qu'un du même genre) et est-on si exigeants avec nos petits films films français pourtant aussi bien ficelés que celui-là (ça m'a rappelé "assurance sur la mort" de Wylder, c'est dire) ?
Bref, j'ai bien d'attendre d'avoir vu le film avant de venir lire tous ces reproches injustes.
Personnellement je n'ai fait aucune comparaison avec un quelconque film américain.
J'ai trouvé ce film bien mais sans plus... Et je pense qu'un inspecteur du travail, en jupette ou pas, qui emmène le premier pékin l'accompagner dans un contrôle serait viré sur le champ.
Les reproches ne te conviennent pas mais ne sont pas "injustes" :-)
Je sais, je réagissais juste aux évocations des précédents intervenants (sur Erin Brokovich... pas sûr de l'ortho de la dame, pas taper).
Je te suis sur la visite du chantier qui m'a fait tiquer aussi, mais momentanément, sans me gêner plus que ça, car je comprends tout à fait l'intention de l'auteur derrière : sortir la RH de son décor, se déplacer sur d'autres contextes soumis aux mêmes contraintes des deux côtés (le pinaillage de la loi contre la pression sur les chefs de chantier pour tenir les délais). On pourra sans doute trouver encore bien d'autres détails de procédure inadéquats dans le film, mais ce qui compte le plus à mes yeux, c'est ce que nous raconte Silhol sur son personnage, ce qu'il nous dit du milieu qui l'a fait et ce qu'il lui fait, ce qu'il nous dit (et comment il nous le dit) de sa vision de la réalité en entreprise. De ce point de vue, sur moi le film fonctionne totalement.
La sortir de son bureau c'est une chose... emmener "l'accusée" sur le chantier en est une autre. Petite erreur de jeunesse.
Pour le reste, disons que mon urticaire géant face à ce milieu m'a fait décrocher sans doute.
"Comme un seul homme", et "j'ai bien fait d'attendre", je corrige sinon je sens que je vais me le prendre dans les dents. ;-)
'J'adoré destester' L'accent sur adoré, ça sent la faute de frappe + que celle d'ortho, je dis rien. ;-)
Saperlotte, c'est pas possible ! mon clavier efface les mots au fur et à mesure ! "J'ai adoré détester", c'est pas l'accent qui coinçait, c'est l'auxiliaire qui s'était fait la malle !
J'ai bien cru à un moment que ce n'était pas toi qui avais écrit le commentaire :-)
Tu as un clavier coréen aussi ???
Oui, du Nord.
Aïe.