de Fabrice Gobert **(*)

Avec Laurent Lafitte, Chiara Mastroianni, Pio Marmaï

Synopsis : Antoine Leconte est un homme de pouvoir arrogant et dominateur, tant dans son milieu professionnel que dans sa vie privée.

Aux commandes des programmes d'une grande chaîne de télévision il est le type puant par excellence, incapable de dire "merci", "s'il vous plaît"... il méprise tout le monde. A peine s'il voit son entourage lorsqu'il parcourt les couloirs et grommelle un vague truc pour répondre aux bonjours qui fusent ! La femme qui partage sa vie et qu'il trompe copieusement avec tout ce qui porte une jupe très courte autour de lui, est sans doute devenue alcoolique à son contact. Elle a écrit un roman qu'Antoine lit sans son accord. Il se reconnaît parfaitement dans le personnage odieux qu'elle décrit et compte bien tout tenter auprès de ses avocats pour que le livre ne paraisse pas.

Un soir Antoine est victime d'un malaise passager qui ressemble à s'y méprendre à un infarctus. Le lendemain, pour avoir exclu sans cérémonie le gars qui présentait la météo, ce dernier lui tire dessus dans l'ascenseur. Lorsqu'Antoine se réveille tout le monde lui semble bizarre voire suspect. Personne n'a la même version que lui des évènements. Il ne parvient plus à rentrer chez lui. Certains qui le tutoyaient le vouvoient, certains qu'ils croyaient ses amis ne le reconnaissent plus comme tels et d'autres qu'il avait malmenés semblent l'apprécier.

A devenir fou...

A force de chercher, Antoine trouve des explications à toutes ces étrangetés entre complot et cauchemar et évidemment je ne vous en soufflerai mot.

Ce genre de film est totalement fait pour moi. J'ai beau en voir le nombre que vous savez... je plonge comme un bleu et il est bien rare que je découvre le pot aux roses avant le mot fin. Je me suis donc laissé torturer les méninges par Fabrice Gobert en me disant lorsque s'installe le moment de flottement qui s'éternise qu'il ne fallait pas qu'il rate sa chute. Et ouf, lorsque je commençais à m'assoupir en soupirant qu'il serait temps de conclure, que l'affaire devenait répétitive, le réalisateur se ressaisit et ne rate pas sa sortie.

J'avais apprécié l'autre long métrage du réalisateur Simon Werner a disparu où déjà il jouait avec nos nerfs et notre perception, mais je n'ai pas vu la série Les revenants qui avait grand bruit je me souviens.

Ici donc, comme ceux du personnage principal nos nerfs et nos convictions sont mis à rude épreuve. On se demande pourquoi les autres personnages se comportent comme ils le font, comme s'ils s'étaient tous donnés le mot et cherchaient à faire une blague dégueulasse et pas drôle à Antoine. Ce n'est pas un séjour à l'hôpital qui peut rendre fou, amnésique et incohérent, quoique... Antoine a beau être le gars ignoble qu'il était et qu'il est toujours car sa façon de vouloir une fois encore imposer à tous son point de vue est aussi odieuse qu'avant son séjour hospitalier, on finit par se dire que personne ne doit être traité comme ça. Il ferait presque pitié.  Lorsqu'on se met à croiser tel personnage qui interprétait un autre rôle au début du film puis un autre encore qui a un comportement totalement opposé à celui qu'il avait précédemment, on perd carrément le nord et le sud. Lorsqu'on retrouve le champion de boxe SDF, la collaboratrice infirmière et j'en passe... on se frotterait presque les yeux pour tenter de se réveiller du cauchemar.

D'autant que le réalisateur a le sens de l'environnement pour rendre le mauvais rêve d'Antoine encore plus anxiogène. Tout est froid et gris et lors des séances Fight Club... le hangar dans lequel des hommes se tapent dessus à poings nus pour se prouver qu'ils existent encore est carrément sordide.

La description du monde du travail et d'une chaîne de télé en particulier est assez déprimant mais sans doute bien vue.

On regrette donc cette baisse de régime qui endort et complique tout, mais on applaudit la pirouette finale simple et évidente et on apprécie le double jeu des rôles secondaires et la performance de Laurent Lafitte parfait dans l'arrogance extrême avec son air hautain comme dans la fragilité avec un regard doux et perdu.