TESNOTA - UNE VIE À L'ÉTROIT
Dans la nuit, David et sa fiancée sont kidnappés et une rançon réclamée. Au sein de cette communauté juive repliée sur elle-même, appeler la police est exclu. Comment faire pour réunir la somme nécessaire et sauver David ? Ilana et ses parents, chacun à leur façon, iront au bout de leur choix, au risque de bouleverser l'équilibre familial.
Certes l'âme russe, comme les voies du Seigneur, est totalement impénétrable mais face à l'engouement général de la critique unanime, j'attendais un grand film inoubliable qui m'aurait secouée. La déception est à la mesure de l'attente. Même si secouée je le fus quand même... un peu.
La première heure est prometteuse et même vraiment formidable. Dès les premières images, la connivence, la complicité entre Ilana et son père enchantent par leur simplicité et leur authenticité. C'est très rare que deux personnages s'imposent d'emblée en quelques plans, quelques répliques. Un échange plein de tendresse suffit. Les scènes suivantes, d'abord avec le frère puis la mère convainquent également. Dans cette famille règnent l'amour et la complicité. La bonne humeur aussi malgré un quotidien qui ne semble pas idéal.
Le format de l'image réduit et carré dont il est beaucoup question et qui enferme les personnages en très gros plan est assez remarquable. Lorsque dès la deuxième scène on pénètre dans l'appartement exigu pour la fête de fiançailles où s'entassent une bonne dizaine de personnes, l'impression claustrophobique devient de plus en plus réelle. On est dans une chronique familiale. La vie est simple voire difficile mais il y a de l'amour. Et puis le fils et sa fiancée sont enlevés. On pense qu'on va s'orienter vers un thriller mais le réalisateur nous surprend. Pas question pour cette famille de faire appel à la police pour verser la rançon aux mafieux responsables de l'enlèvement. La "communauté" juive à laquelle la famille appartient se réunit mais la somme n'est jamais suffisante. Des profiteurs exploitent la situation pour la dépouiller du peu qu'elle possède.
Et puis la machine s'enraye. Les parents vont envisager une solution ébouriffante pour obtenir l'argent. L'inquiétude et la panique se lisent dans le regard d'Ilana cachée derrière sa mèche rebelle. Sa mère, impressionnée sans doute par l'horreur de ce qu'elle annonce à sa fille le fait alors que le sèche-cheveux est en marche. A peine si on l'entend. Dès lors malgré le courage, l'obstination, la rébellion d'Illana. Son énergie à résister, à retrouver le garçon qu'elle aime... un balourd qui passe beaucoup de temps à regarder des vidéos islamistes (si j'ai bien compris) sont admirables. Mais les scènes finissent par se succéder, se ressembler, se répéter et j'ai fini par ne plus bien comprendre les faits et gestes des uns et des autres, et surtout à ce qui pouvait leur passer dans la tête. On se demande alors comment le réalisateur va bien pouvoir conclure.
Belle pirouette. Il élude totalement et termine son film pourtant interminable (2 heures) par une phrase qui s'imprime à l'écran "après ça, on ne sait pas ce qu'ils sont devenus". Cela me semble un peu léger. Il laisse à la fois ses personnages et les spectateurs en plan. Plusieurs personnes ont d'ailleurs quitté la salle bien avant.
Malgré l'actrice Darya Zhovner épatante de bout en bout on est vraiment loin d'Andreï Zvyagintsev auquel ce petit malin est comparé partout (sous prétexte qu'il est russe).
Si vous voulez un avis plus pénétré et vous détendre avec moi, lisez l'avis de Didier Péron dans Libération "Le film est souvent époustouflant par ce vaste et profond travail de transfiguration qu’il accomplit, prélevant dans la bibliothèque des sensations vives la matière translucide et vibrante qui s’insinue en chaque scène, et dont on peut avoir le sentiment qu’à peine vaporisée tel un élixir de jouvence, on la voit aussitôt s’assécher et retomber en poussière sur des personnages statufiés".
Commentaires
La phrase de Didier Péron, comment dire ? Pas de quoi inciter le spectateur lambda à aller au cinéma. J'ai lu une blogueuse qui disait qu'il y avait des scènes difficiles à supporter. Ça me retient, surtout si c'est pour laisser les personnages en rase campagne à la fin.
Il n'y a rien d'insupportable à supporter je trouve mais j'ai perdu les personnages en route...et cette fin... bof !
Une comédienne exceptionnelle, un réalisateur manifestement doué qui fait passer ses idées par la mise en scène, mais surtout un film qui pose un vrai problème éthique : l'utilisation d'une vidéo de propagande islamiste, plein champ, sans filtre ni censure, où l'on voit des tchétchènes tuer en gros plan des soldats russes. Hyper contestable surtout pour le spectateur non averti que j'étais (tiens, j'aurais dû quitter la salle aussi à ce moment).
Ah ben quand même, heureusement qu'on est pas avertis de ce qu'on va voir (je parle, en général) :-)
Il n'y a pas que cette scène qui pose problème je trouve.
Son film tourne franchement en rond, on finit par ne plus rien comprendre aux sentiments des personnages. Elle se révolte ? Elle se révolte pas ? Et le futur marié qui apporte une enveloppe, il devient quoi ? Ils prennent l'oseille et ils se tirent ?
Et cette fin, un peu minable non ? Genre, on n'a plus de pellicule on arrête là !
De mémoire je ne sais plus si tu as vu les films d'Andreï Zvyagintsev, c'est quand même une autre trempe non ?
Ah oui, c'est beaucoup moins bien que Zvyagintsev. Mais la commission de classification du CNC aurait du mettre un avertissement pour signaler la vidéo... Sinon, je suis heureux de pouvoir à mon tour faire un travail de relecteur pour te signaler une coquille dans le titre de l'article (Testona), comme quoi la vidéo t'a peut-être traumatisé toi aussi. ;)
Je dois être devenue hermétique. La vidéo m'a juste servi à comprendre l'état du cerveau pas reluisant du petit ami.
Et merci pour la coquille. je rectifie dès que le service est disponible. Haut et Fort est "too busy" actuellement, et je ne peux accéder à ma page administrative.