3 JOURS À QUIBERON
d'Emily Atef *
Avec Marie Bäumer, Birgit Minichmayr, Charly Hübner
Synopsis : 1981. Pour une interview exceptionnelle et inédite sur l'ensemble de sa carrière, Romy Schneider accepte de passer quelques jours avec le photographe Robert Lebeck et le journaliste Michael Jürgs, du magazine allemand "Stern" pendant sa cure à Quiberon.
Cette rencontre va se révéler éprouvante pour la comédienne qui se livre sur ses souffrances de mère et d'actrice, mais trouve aussi dans sa relation affectueuse avec Lebeck une forme d'espoir et d'apaisement.
S'il fallait créer une catégorie pour chaque film, celui-ci serait classé dans la catégorie "film déprimant". J'en suis sortie infiniment triste avec la joie néanmoins de découvrir en sortant qu'il faisait encore jour.
Je comprends que Sarah Biasini, la fille de Romy Schneider soit dépitée par ce film où sa mère y est scrutée dans une des périodes sinistres de sa vie (le pire restant à venir...). Alcoolique, ruinée et dans une profonde dépression, l'actrice n'est pas montrée sous son meilleur jour. Elle allume clope sur clope, passe du rire aux larmes sans transition, s'endort par terre, transforme sa chambre d'hôtel en taudis, se jette au cou du premier venu et j'en passe. S'il s'agit de la réalité on n'a pas forcément envie de la connaître, plus de trente ans après la mort de Romy.
Le journaliste détestable qui l'interviewe creuse profond dans toutes ses failles. Il insiste grossièrement et ne cesse de dire à Romy qu'elle est Sissi alors qu'elle lui répète inlassablement qu'il s'agit d'un rôle. Le garçon semble ne pas saisir la nuance. On comprend que c'est sans doute une des raisons qui lui ont fait quitter l'Allemagne. Ses compatriotes ne lui pardonnant pas de ne pas se comporter comme Sissi. Non pas l'Impératrice, mais le personnage sucrée et lisse qu'elle a interprété à 15 ans !
Je n'ai pas bien compris l'intérêt de ce film qui semble s'acharner sur toutes les souffrances de Romy. Sa mère dont Hitler s'était amouraché, l'oblige à quitter l'école à 14 ans et l'offre en pâture au star-system, son père qui l'abandonne, son premier mari (père de David) qui se suicide, son divorce en cours avec le père de sa fille, ses enfants confiés à la belle-famille. Cette accumulation de malheurs décrite, même si la réalité dépasse encore cette fiction, me semble voyeuriste et déplacée voire obscène. Je trouve que Romy Schneider méritait mieux que cet instantané de sa déchéance.
Alors cette interview est-elle l'aboutissement du travail d'un journaliste qui s'acharne, prêt à livrer l'intimité de la star en pâture ou la manipulation de l'actrice elle-même qui entend régler ses comptes avec son pays d'origine et leur révéler : "je suis une femme de 42 ans. Malheureuse" ?
Je n'ai pas été bouleversée, j'ai été choquée, mal à l'aise. Je n'ai du coup aucun mal à imaginer le malaise de Sarah Biasini sa fille qui voit sa mère présenter ainsi même s'il ne s'agit pas d'un Biopic mais d'un instantané. Jusque quelques jours.
En outre, le film est très long, presque deux heures. Le noir et blanc très fade ajoute encore à l'impression d'étouffement ressenti. Les rares escapades en bord de mer ne parviennent pas à aider à reprendre son souffle. Et les digressions sur les états d'âme de la meilleure amie de Romy venue la soutenir et qui supporte mal le voyeurisme de l'interview ne sont guère intéressantes. L'actrice qui interprète cette amie est par ailleurs quelconque.
De cette parenthèse désenchantée de 3 jours seront tirés 600 clichés que leur auteur Robert Lebeck, grand ami voire plus de Romy, ne publiera jamais.
Ce qui me restera du film est une actrice qui s'est lancée dans ce pari insensé d'interpréter une des actrices sans doute les plus aimées entre toutes (je n'ai jamais entendu quiconque dire qu'il n'aimait pas Romy Schneider et nombre d'actrices s'y réfèrent comme d'un modèle). Marie Bäumer est extraordinaire. Non seulement elle ressemble à Romy de façon extrêmement troublante mais elle a réussi à prendre toutes les attitudes du modèle, sa façon d'allumer ses cigarettes, de balancer ou de baisser la tête, d'afficher un air triste à faire pleurer les pierres et faire surgir dans le même instant un sourire lumineux, enfantin, puis éclater de rire. Et sa voix douce et soudain brutale, son délicieux accent quand elle parle français.
Marie Bäumer est extraordinaire, le film, malsain.
Commentaires
'je n'ai jamais entendu quiconque dire qu'il n'aimait pas Romy Schneider'
Non rien :-)
Exprime-toi.
Pas fan ;-)
Pourquoi je ne suis pas surprise ? :-)
J'étais tentée mais je vais plutôt revoir ses films.
C'est préférable.
Il est difficile de parler d'un film que l'on n'a pas (encore) vu. Ce film a eu un grand succès en Allemagne, malgré l'image d'une Romy déprimée. J'ai lu une critique allemande qui dit à propos du film - un film sur l'autodestruction et l'interaction entre journalisme et vedettariat. (Je garderai d'ailleurs cette citation si jamais je ferai un post sur ce film.)
Romy a dit : le viol verbal reste malheureusement impuni. N'est-pas toujours valable à l'heure actuel ?
Ne sont-ils pas tous grossiers, les journalistes à sensation ? L'allemande des matchingpoints n'apprécie moyennement cet adjectif...Mais elle vous pardonne ;)
Désolée de vous avoir choquée. Je trouve les français arrogants et les allemands mal élevés surtout à l'étranger (comme l'un comme pour l'autre).
Bon, je vous accorde mon pardon bienveillant...
C'est très aimable. Je vais retirer la parenthèse. Mon but n'est pas de heurter mes lecteurs. Dire que ce journaliste est détestable est bien suffisant pour le caracteriser, quelle que soit sa nationalité.
Notre commentaire semble perdu...
C'était juste pour dire que je ne voulais absolument pas "censurer" votre post, mais juste apporter une nuance parce que je n'aime pas les clichés.
Vais-je aller voir ce film finalement ?...
A bientôt pour d'autres échanges ; c'est ça aussi l'intérêt de nos blogs, n'est-ce pas ?
La parenthèse n'avait rien d'intéressant. Je ne me sens pas censurée.
Tout va bien.