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MONSIEUR

de Rohena Gera ***(*)

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Avec Tilotama Shome, Vivek Gomber

Synopsis : Ratna est domestique chez Ashwin, le fils d'une riche famille de Mumbai.

En apparence la vie du jeune homme semble parfaite, pourtant il est perdu. Il vient d'annuler son mariage car il ne se sentait pas suffisamment amoureux de la femme qu'il devait épouser, qui de toute façon venait de le tromper...

Ratna de son côté a été veuve à 19 ans. Et quel que soit l'âge, en Inde, la vie d'une veuve est considérée comme finie. Mais Ratna, contrairement à Aswhin, n'a pas renoncé à ses rêves. Elle travaille dur pour payer des études auxquelles elle n'a pas eu droit à sa petite sœur et en plus de son travail chez Ashwin elle tente de suivre des cours de couture.

Je suis ravie de terminer l'année en évoquant un aussi beau film. La réalisatrice démontre qu'il est possible de parler de sujets sensibles voire révoltants tout en douceur, sans faire de bruit, sans pathos, sans tomber dans le misérabilisme tout en n'éludant pas la noirceur et l'injustice. Bravo.

Elle fait de son héroïne une jeune femme qu'on ne plaint jamais malgré la tristesse de sa condition de "bonne" dans un milieu où on ne la regarde pas. Les gens comme elles sont invisibles et doivent le rester. Mais sa détermination et le fait qu'elle ne s'apitoie jamais sur elle-même en font un être infiniment touchant et admirable.

Ratna et Aswhin vivent sous le même toit mais font partie de deux mondes que tout oppose. Leur cohabitation ne va pas tarder à faire jaser des deux côtés de la condition sociale. Les jeunes gens s'observent même si Ratna tente de se faire le plus discrète possible en n'apparaissant aux yeux d'Aswhin que pour lui servir ses plateaux repas (une fois je plus je recommande de voir ce film APRES avoir mangé). Mais elle s'inquiète pour lui, tout aussi discrètement, lorsque par exemple elle le voit s'approcher trop près du bord du balcon de son appartement luxueux qui domine la ville. Parfois elle ose quelques mots, rassurants, consolatoires. Comment ne pas tomber sous son charme pudique et réservé ? De son côté, Aswhin ne se comporte pas avec Ratna comme un homme de sa condition le devrait. Il la voit, il la regarde, il l'écoute et lui parle...

Oui, ce film a un côté très fleur bleue peut-être pas réaliste mais il fait chaud au cœur, il est réconfortant. J'y ai cru et je me suis laissé embarquer par cette belle histoire impossible dans un pays qui m'est totalement inconnu.

La réalisatrice n'élude pas les moments où la ségrégation se fait plus visible, une scène où Ratna entre dans un magasin et où sa tenue vestimentaire la trahit, une autre où son "patron" lui adresse la parole qui devient une source d'humiliation, l'exploitation d'un "maître" qui doit lui apprendre la couture... Mais elle aborde ces moments simplement, sans chichi et sans forcer le trait ou accentuer la sensation d'injustice. Ce qui l'intéresse d'abord ce sont ses deux personnages pas tout à fait comme les autres dans une société où les castes sont très marquées.

Voici ce qu'elle dit de son film : "Mon film traite d'une travailleuse domestique résidant à domicile, et leur situation est particulièrement complexe. Parce qu'ils vivent à la maison, ils connaissent très bien la famille ou la personne pour qui ils travaillent, mais il y a toujours une nette ségrégation à la maison. L’employée de maison ou la femme de ménage ne mange pas dans les mêmes assiettes, n’utilise pas les mêmes verres ni la même tasse de thé que les chefs. Elle ne prend pas non plus de pause assise sur le canapé, même si personne n’est à la maison. Elle est censée s'asseoir par terre ou sur un tabouret ou un banc, si celui-ci est fourni, dans la cuisine. Il existe très peu de lois, ou du moins de lois observées, concernant leurs droits, leurs horaires de travail, leurs vacances, etc. La plupart de ces travailleurs sont sans papiers et peuvent être embauchés et licenciés à volonté".

En tant que spectatrice romantique, je n'attendais qu'une chose, que Ratna et Ashwin cèdent à leur attirance réciproque et fassent front devant les conventions, les interdits et les jugements de leur entourage. Mais Rohena Gera est plus subtile... et la toute dernière scène est magique. Un mot, un seul est prononcé...

Les deux acteurs sont deux soleils.
C'est BEAU et je vous invite vivement à découvrir ce film.

Commentaires

  • Vous êtes donc une spectatrice romantique ?
    Comme nous avons fait de beaux voyages en Inde, nous aurons le plaisir de retrouver ce pays fascinant dans ce film, il nous tente bien aussi par son sujet !

  • Follement.
    On voit ce pays différemment. Jusque là le cinéma ne le montrait qu'enseveli sous des clichés. L'histoire et les acteurs sont beaux.

  • Pas encore vu Monsieur.... Mais ton article donne envie de le découvrir.... Sans doute la semaine de la rentrée scolaire ! Pas tentée par Mon Père ? L'ai vu aujourd'hui en fin d'après midi. Dramatique mais bien apprécié.

  • Si. Tentée, mais sans plus. J'ai un peu une overdose de misère et de problèmes familiaux...
    Ce Monsieur m'a TRES agréablement surprise, cueillie, emballée.

  • SPOILER. J'adore la fin, quand tout est dit puisqu'elle a prononcé son nom .. J'ai terminé l'année par ce film, et je l'ai beaucoup aimé. Tu en parles très bien, c'est ce que j'ai ressenti aussi.

  • Ah oui gros spoiler :-)
    Je ne m'attendais pas à ce qu'elle le prononce.
    J'avais le cœur plein en sortant. Un film qui fait du bien.
    Monsieur 2 (elle le rejoint à New York).

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