VICE
d'Adam McKay ***(*)
Avec Christian Bale, Amy Adams Steve Carell, Sam Rockwell
Synopsis : Fin connaisseur des arcanes de la politique américaine, Dick Cheney a réussi, sans faire de bruit, à se faire élire vice-président aux côtés de George W. Bush. Devenu l'homme le plus puissant du pays, il a largement contribué à imposer un nouvel ordre mondial dont on sent encore les conséquences aujourd'hui…
J'avais détesté et rien compris au Big short du même réalisateur. J'avais même dit plein de vilains mots en écrivant tellement ça m'avait déplu. Je m'étais par contre bien bidonnée devant les Very bad cops malgré Will Ferrell qui n'est vraiment pas ma tasse. Cette fois je me suis régalée. J'ai bien ri même si je ne suis pas certaine d'avoir tout compris tant les arcanes et méandres obscures de la politique, d'autant plus américaine, m'échappe.
Dick Cheney je le connais de nom et parce qu'il a été le Vice de Bush pendant 8 ans. Je découvre avec ce film que c'est lui qui tirait les ficelles face à un Bush Jr. totalement incompétent et je me garderai bien d'aller vérifier ce qui est vrai de ce qui est faux dans ce qui nous conté ici. C'est à la fois amusant et parfaitement flippant. Je suppose qu'il doit y avoir une part de vrai, une part de faux. Ce dont je suis certaine c'est que le réalisateur ne doit pas voter républicain.
On pourrait accorder le qualificatif de Biopic à ce film puisqu'il évoque la vie d'un homme politique qui existe (mais encore vivant), des années 60 à nos jours mais on est bien loin des hagiographies habituelles. Loin s'en faut. Parti de bien bas, des caniveaux jusqu'au sommet du pouvoir, Dick Cheney s'est imposé avec un aplomb phénoménal, plus avec roublardise qu'intelligence (je parle uniquement de ce que j'ai retenu du film, pas de ce qui pourrait être la réalité). D'ailleurs le film commence par une phrase qui dit à peu près : "on va vous raconter l'histoire de Cheney, le type le plus obscur et discret qui soit. Mais putain, on a bossé".
Comment réussir à passer sa jeunesse à finir ses nuits le nez dans son vomi, se faire renvoyer de l'Université, devenir électricien pour finir par être Chef de Cabinet sous la Présidence de Gérald Ford, au côté de Donald Rumsfeld, Henry Kissinger, puis Secrétaire à la Défense sous Bush Senior et enfin le second de Bush Jr. jusqu'à l'arrivée d'un certain Barack Obama ? Le film nous dit que c'est sa femme qui a fini par le mettre face à un ultimatum : "tu sors le nez de ton caca, tu deviens un homme, un vrai, ou je te quitte". C'est d'ailleurs ce qui est le plus touchant dans le film, l'amour que ces deux là éprouvent l'un pour l'autre, le soutien indéfectible qu'ils s'apportent depuis plus de 50 ans. Mais l'ambition folle de Lynne Cheney qui remplacera même son époux à cause d'un de ces multiples infarctus qu'il accueille avec beaucoup de calme "là je crois qu'il faut m'emmener à l'hôpital tout de suite", lors d'une campagne pour une élection locale, a sans doute eu raison de la mollesse de son Dick...
Le réalisateur affirme : "Je ne connaissais pas vraiment Dick Cheney, mais en lisant des livres à son sujet, il a commencé à me fasciner, et je me suis passionné pour ses motivations et ses convictions. J'ai continué à me documenter, et j'ai été stupéfait par la méthode sidérante avec laquelle Cheney a conquis le pouvoir et estomaqué de voir à quel point il a redéfini la place actuelle des États-Unis dans le monde."
Alors sans doute la réalisation est-elle un peu voyante. Certes, mais je l'ai trouvée réjouissante et totalement inédite. Jusqu'à introduire un générique en plein milieu du film sur le mode "voilà ce qui se serait passé si..." (deux mamies derrière moi se sont levées pensant que c'était la fin... il faut le faire, on est pas toujours entouré de lumières...) pour reprendre le cours réel ou imaginé de l'histoire. Il faut dire qu'elle est complètement "à charge", que Bush est ridiculisé du début (son arrivée, ivre mort lors d'une soirée) à la fin et Cheney est dépeint comme un type pas très intelligent mais convaincant et très influent.
Lors des attentats du 11 septembre, c'est lui qui tire les ficelles. D'après ce que l'on voit les américains ne comprennent pas l'abstraction d'une organisation terroriste, d'un Etat Islamique qui les attaque et veut les détruire. Il leur faut un pays contre lequel se défendre et tirer. C'est l'Irak et ses supposées armes de destruction massive qui fera l'affaire (pour faire vite).
Tout est tellement énorme, machiavélique, relevant toujours de manipulations et d'un arrivisme forcené que ça en devient vraiment terrifiant. Mais le réalisateur choisit de nous faire rire. Tant pis pour la morale et la conscience. De mémoire, je ne me souviens pas avoir autant ri devant tant d'horreurs. Plus le film avance, plus on est convaincu de sa partialité et plus on prend du plaisir.
La performance du quatuor d'acteurs en tête de la distribution fait également merveille. Christian Bale plus vrai que vrai, pataud, lourdaud, quasi chauve est Dick Cheney et on sait qu'il n'hésite pas à s'enlaidir, grossir pour incarner un personnage. Celui-ci devait manquer de prothèses dentaires pour le faire accéder à la statuette suprême. Néanmoins, il est formidable. Tout comme Amy Adams, elle aussi empâtée, mais impressionnante en épouse amoureuse et à l'ambition démesurée. Steve Carell est un Rumsfeld roublard qui va se laisser dépasser par son élève. Et Sam Rockwell se régale manifestement à être un George Dabeuliou plus con que nature. Bravo au responsable du casting pour avoir perçu l'incroyable ressemblance.
Un film réjouissant et effrayant. Le monde se retrouve de plus en plus souvent entre les mains de bonshommes pas bien nets dans leur tête...
Commentaires
J'ai l'intention d'y aller, même si ce n'est pas joli-joli tout ça, surtout qu'il y en a un actuellement au pouvoir qui va encore plus loin ..
C'est un super film. Pour se remonter me moral on a qu'à se dire que c'est de la science fiction.
Bien sûr qu'il est sur notre liste des films à voir - au risque de ressortit déprimées par son contenu !
Bon weekend
La forme l'emporte sur le fond.
Mais pas plus déprimée en sortant du film qu'en y entrant.
Encore un film à prothèses qui me rappelle le "J. Edgar" eastwoodien. Sans doute différent sur le fond et la forme car je note que "la mollesse de son Dick" ne t'a pas échappée. ;-)
Avec un prénom pareil, l'homme ne peut que susciter la méfiance.
Moins de prothèses mais plus de kilos que pour J.Edgar il me semble.
Son prénom lui va à MERVEILLE.
Oui j'ai aimé et je suis sûre que le role que D.Cheney a joué lors du 11 septembre est tout à fait exact (avec l'autre tâche de dobeuliou
...) seul fait positif pour lui, l'affection qu'il porte à sa famille.
Et encore, même cette affection pour sa famille se discute...
Je trouve que c'est plus celle de l'épouse qui me paraît discutable. Son ambition démesurée fait parfois peur et ces idées encore plus(ou rire...) : les anglaises brûlent leur soutien gorge, nous on les porte.
Oui sa femme ses filles dont sa fille qu'il ne renie pas... c'est tout ce qui le rend sympathique voire humain. Sinon... grosse tâche aussi.
En fait le seul point positif réellement c'est qu il ne rejette pas sa fille qd celle-ci fait son coming out, alors que sa femme se crispe en pensant à la carrière de son mari!
Mais en effet autrement c'est une grosse tâche qui m'a écoeurée!!
Absolument. Et sa femme a vraiment les dents qui rayent le parquet. Elle ne pense qu'au pouvoir. Quel personnage ! Magnifiquement interprété par Amy Adams. Quel courage !
Super article. Effectivement, c'est un biopic loin des sentiers battus. En revanche, pour ma part, j'ai quand même préféré "The big short" ;)
Merci.
Je n'avais rien compris :-)
Parfois c'est gênant.
ça ne m'a pas vraiment fait rire mais j'ai plutôt aimé ce film. J'ai été gêné par la volonté de déconstruire le récit et aussi par les scènes de greffe du coeur. Pour ce qui est des acteurs, je te rejoins, un Rumsfeld formidable de bassesse, un W juste minable... Ces élites qui nous gouvernent et c'est pas fini...
Il n'y a pas de quoi éclater de rire mais la construction et les effets (ralentis, arrêts sur images) sont savoureux je trouve. Les scènes de greffe, je m'en passerais dans tous les films. Beurcke. Les acteurs sont au top.