JOJO RABBIT
de Taika Waititi ***
Avec Roman Griffin Davis, Thomasin McKenzie, Scarlett Johansson, Sam Rockwell
Jojo est un petit allemand solitaire. Sa vision du monde est mise à l’épreuve quand il découvre que sa mère cache une jeune fille juive dans leur grenier. Avec la seule aide de son ami aussi grotesque qu'imaginaire, Adolf Hitler, Jojo va devoir faire face à son nationalisme aveugle.
Jojo est un petit nazi de 10 ans. Il vit avec une mère merveilleuse résistante au nationalisme ambiant. Plutôt que de s'opposer à l'embrigadement de son petit monstre, elle le laisse participer à un week-end d'intégration qui a pour objectif d'apprendre à des pré-ados à tuer des petits lapins, manipuler des explosifs, ramper dans la boue, brûler les livres. Bref à devenir de bons petits nazis bons aryens. Jojo est accompagné et encouragé dans son apprentissage par son ami qu'il est le seul à voir : Hitler en personne.
C'est un film riche, drôle, émouvant, parfois brouillon mais dont les plus jeunes devront avoir les "clés" pour pouvoir l'apprécier et ne pas croire que les juifs sont des bestioles à cornes et queues fourchues. En effet, lorsque Jojo découvre Elsa, la jeune juive que sa mère cache au grenier, elle le laisse croire toutes les âneries qu'on lui inculque dans son "parti" et appuie même la caricature jusqu'à dessiner avec lui et représenter les juifs tels que les nazis les décrivaient. Mais lorsque Jojo demande à Elsa de lui parler des gens "comme elle"..., elle répond : "on est comme vous, mais on est humains". De belles répliques comme celle-ci, il y en a plein dans ce film qui souffre, hélas, d'un petit coup de mou au milieu et se ressaisit lorsque Jojo tombe nez à nez avec une paire de chaussures adorées qu'on aura pu admirer plusieurs fois auparavant, et se termine comme Elsa l'avait anticipé...
La première partie est drôle tout en dénonçant l'absurdité et la bêtise de la haine, du racisme et de la guerre. Les nazis avaient trouvé des proies faciles en lavant le cerveau de jeunes enfants pour en faire les jeunesses hitlériennes. Jojo va jusqu'à rejeter son grand-père qui n'a pas le bon goût d'être blond aux yeux bleus comme lui et sa merveilleuse maman. C'est Scarlett Johansson qui hérite de ce rôle vraiment très beau, presqu'irréel, telle une Mary Poppins dont même la guerre et l'absence de son mari parti au front n'entament ni la bonne humeur, la joie de vivre et la foi en l'avenir. Lorsque son idiot de fils endoctriné la traite de traître et de lâche parce qu'elle n'adhère pas au parti nazi, elle lui répond qu'elle aime son pays mais que c'est la guerre qu'elle déteste. Leurs conversations sont les moments les plus beaux du film tant cette mère magique fait preuve de patience, de tolérance et d'intelligence. Et notamment cet échange au bord de l'eau où elle accompagne son fils avec ses chaussures enchantées, là où jadis on dansait et on faisait la fête et qu'elle lui joue un sale tour vraiment drôle.
Evidemment Jojo va grandir et comprendre des choses vous l'imaginez bien. Entouré de cette mère idéale et d'Elsa (interprétée de façon lumineuse et intense par Thomasin McKenzie) la jeune juive qui a déjà vécu tant de drames malgré son jeune âge et est capable de les analyser. Bref, "il y a du bon dans ce monde Monsieur Frodon" et il n'est jamais inutile de le répéter.
Il y a donc des scènes très réussies : les conversations entre la mère et l'enfant, le week-end de formation, la scène où la Gestapo pénètre dans la maison de Jojo et où on assiste à une cascade de Heil Hitler en série, et tant pis si elle est copiée sur celle d'un autre film (très très ancien), le débarquement des alliés dans la petite ville où vit Jojo. Et des personnages très attachants comme celui de la mère, d'Elsa et aussi du Captain Klenzendorf interprété par le toujours impeccable (dans le rire comme dans l'émotion) Sam Rockwell.
Et s'il y a le petit quart d'heure de trop qu'on peut déplorer souvent, l'originalité du ton et du propos du film valent grandement d'y aller faire un tour.
Je n'avais pas fait le rapprochement que ce réalisateur avait commis Thor : Ragnarok le blockbuster marvelien le plus t(h)ordant que j'aie jamais vu.
Commentaires
Je plusssssssssssssssssssssoie ;-)
Je ne savais pas que les personnes de confession juive dormaient à la façon des chauves-souris, merci donc à Jojo pour l'info.
Hunt for the Wilderpeople du même réalisateur si tu ne l'as pas déjà vu.
De vrais vampires :-)
Je ne connais pas. Netflix ?
Jojo Rabbit un nom tout aussi thordant que Thor... Comme quoi, entre un blockbuster et un film plus "indépendant", il n'y a qu'un infime espace, comme entre une enclume et un marteau
Le nom du réalisateur n'est pas triste non plus.
Un garçon à suivre.
Jojo est lapin comme Thor est facteur.
Pfffff, j'ai honte là -)
Vous êtes en forme les garçons.
Thor est facteur... ah ah ah.
"bons petits nazis bons aryens."
Ta critique est vivifiante et très jolie, tu résumes bien le film. C'est vrai qu'il y a de jolies choses mais je me suis demandée quand même à quel public il s'adressait vraiment. A te lire, on dirait "à tous !".
Merci.
A tous, à condition d'expliquer aux plus jeunes (mais pas en dessous de 10 ans je crois) que les juifs n'ont pas de doigts crochus et ne dorment pas la tête en bas comme les chauve souris.
J'espère y aller, le thème m'intéresse et Hitler, ami imaginaire d'un gosse, fallait quand même y penser à celle-là !
Oui c'est original et il est plutôt encourageant Adolph pour un petit garçon pas très sûr de lui. Mais le naturel revient au galop...
:) très juste critique, j'adhère tu penses !
Oui, un beau moment avec une Scarlett lumineuse :-)
Le début a failli me faire fuir la salle. Je n'ai pas trouvé ça drôle (à de rares exceptions près, genre "shitlerism"). C'est très appuyé, souligné, surligné, stabiloté. Heureusement que les scènes entre le gamin et les dames de l'histoire (la maman mais aussi et surtout l'alter-ego d'Anne Frank) sont plus réussies. Le propos a beau être généreux, les bonnes intentions ne suffisent pas forcément à faire un bon film. Et, bon sang, que quelqu'un dise au réalisateur de rester derrière la caméra !
Je n'ai pas hurlé de rire. J'ai souri. Je trouve ça plutôt original, voire ambitieux.
Le réalisateur n'est pas toujours très juste mais il ne m'a pas choquée.
Les deux filles de l'histoire par contre, quel bonheur !
Et tu as raison. C'est Anne Frank :-)
Malgré les bons acteurs, nous ne n'avons pas encore vu ce film ; peut-être Hitler dans une comédie nous fait reculer...
Oh ce n'est pas uniquement une comédie. C'est ausdi grave et très émouvant. Et Hitler est traité comme il le mérite. Mais je comprends que la moitié allemande hésite.