NEWS OF THE WORLD de Paul Greengrass ****

Avec Tom Hanks, Helena Zengel

Je tenais absolument à voir ce film, parce que Tom Hanks, parce qu'un western, mais aussi parce que Paul Greengrass et la petite Helena Zengel qui m'a déjà tant fait pleurer... J'ai donc bénéficié hier d'une connexion partagée sur la plate-forme maudite.

Si je suis ravie d'avoir pu voir le film, cela m'a vraiment confortée dans l'idée que voir de tels oeuvres sur un écran qui ne lui est pas destiné est décevant. Il donne plus que jamais l'envie de retourner dans les salles. Comment sur un écran de télé ou d'ordinateur est-il possible d'apprécier, les grands espaces, les aventures et la musique ? En ce qui me concerne c'est impossible. Il manque tant de choses, l'ampleur, l'image et le son irréprochables. Sur grand écran, ce film mélancolique, tendre et humain doit être encore plus envoûtant.

Voilà cinq ans que la Guerre de Sécession a pris fin. Le capitaine vétéran Jefferson Kyle Kidd autrefois imprimeur avant d'être enrôlé sillonne aujourd'hui le pays en qualité de rapporteur publique. Pour quelques pièces il informe ses concitoyens en leur faisant lecture des journaux. Il choisit ses sujets, potins, épidémie, catastrophe. On peut compter sur Tom Hanks pour assurer le show en super stand-uper qu'il est ici. Et pourtant tellement sobre à la limite de l'effacement parfois. Ses lectures se transforment parfois en véritables spectacles.

Sur la route il rencontre une petite fille blonde en fâcheuse posture. Le capitaine et elle ne parlent pas la même langue. Il finit par comprendre qu'elle a été enlevée six ans auparavant et élevée par une tribu d'indiens Kiowa. Lorsqu'il veut remettre Johanna (le prénom indiqué sur ses papiers) aux autorités, personne ne veut prendre la petite en charge. Il décide de la ramener lui-même auprès de ce qui lui reste de famille, un oncle et une tante qu'elle ne connaît pas. Pour cela, il faut entreprendre un voyage de plusieurs semaines à bord d'un charriot et évidemment apprendre à se connaître mais aussi à communiquer, chacun ne parlant pas la langue de l'autre. Johanna entreprend le voyage contre son gré. On l'a compris, ces deux êtres pas destinés à se rencontrer ont également été détruits par la vie. Lui par la guerre, elle parce qu'elle est deux fois orphelines. Sa famille américaine comme sa famille indienne ont été massacrées. Ils vont s'apprivoiser à force de douceur et de patience. Pourquoi cet homme solitaire décide-t-il d'accompagner la petite ? Parce que dira-t-il plus tard à qui le lui demande : "Elle a besoin de rire et de rêver. Elle a besoin de nouveaux souvenirs."

Un environnement hostile autant par les caprices de la nature (impressionnante scène de tempête de poussière qui aurait eu toute sa place sur grand écran) que par la sauvagerie des hommes qui paient les dégâts collatéraux de plusieurs années de guerre fratricide. Le sud clame déjà des slogans tels que "Texas first", le racisme est toujours bien présent : "l'Amérique appartient aux blancs", "A bas l'abolition de l'esclavage !" Bref l'Amérique est divisée et le Capitaine, Tom Hanks, notre James Stewart du XXIème siècle, observe navré ses contemporains traumatisés. Mais les hommes sont toujours impardonnables lorsqu'ils envisagent de laisser parler leurs plus bas instincts dès qu'une petite fille blonde passe à leur proximité. L'acheter pour quelques dollars ne les rebute pas. Plus tard Johanna sera même attachée, comme livrée symboliquement à sa condition féminine.

Tout en affrontant les dangers qu'ils rencontrent dans un environnement souvent violent, l'homme et la petite fille apprennent à se comprendre et à communiquer. Je ne vous le cache pas, j'ai trouvé cette relation magnifique, tout en douceur dans une histoire souvent contemplative. La profonde humanité qui se manifeste entre les deux personnages laisse admiratif.

Bien qu'il m'ait rendu encore plus triste de ne pas être entrée dans une salle de cinéma depuis bientôt 7 mois, ce film de deux heures m'a semblé bien court. Sans doute parce qu'il est un vrai film de cinéma, un beau western tourné dans les paysages majestueux du Nouveau Mexique, dans la lignée de Hostiles ou True Grit, même si la référence à La prisonnière du désert de John Ford vient immédiatement en tête.

Et puis on peut compter sur Tom Hanks pour rendre le voyage passionnant. Il est parfait. Accompagné dans ce voyage initiatique par la petite Helena Zengel qui, après Benni, ne choisit pas la facilité. Je la revois, je l'entends à nouveau hurler "maman" dans la forêt. Ici, sous une pluie battante elle observe et s'époumone pour que sa tribu qui passe de l'autre côté du fleuve la retrouve. Un rôle, un personnage une nouvelle fois déchirant.

Vivement le 19 mai.