de Graeme Clifford ***

avec Jessica Lange, Sam Shepard

Biopic de l'actrice américaine Frances Farmer (1913-1970). 

Être lauréate d'un concours d'écriture à l'âge de 16 ans à cause d' grâce à un essai prouvant que Dieu est mort puis avoir gagné un voyage en Russie en 1935 ont fait le bonheur (fugitif) et le malheur (constant) de Frances Farmer. Cet écrit qui fait la fierté de sa mère et ce voyage en pays interdit ont valu à la jeune femme de faire l'objet de surveillance de la part de l'Etat qui l'a dès lors considérée comme communiste.

La petite provinciale de Seattle s'installe pour un temps à New-York car son rêve est le théâtre à Broadway. Un petit rôle dans une pièce et la voilà repérée par un découvreur de talents. Elle signe un contrat à Hollywood avec Paramount Pictures. Dès lors, sa vie va se transformer en cauchemar puis en enfer car, intelligente, indomptable mais aussi impulsive, elle ne parviendra jamais à se plier aux diktats imposés par les studios et sa mère, désormais très intéressée par la "réussite" de sa fille.

Son mariage hollywoodien arrangé par les studios fait long feu et l'hypocrisie ambiante l'horripile. Elle est arrêtée pour conduite sans permis, en état d'ivresse et violence envers un policier. Dès lors son parcours sera une succession de tentatives de destruction en règle de sa personnalité. Hollywood est présenté comme une machine à broyer. Après un premier séjour en hôpital psy, elle retourne chez sa mère, qui l'y renvoie après que Frances l'ait frappée. Elle s'en échappe grâce à l'homme qui sera toujours présent pour elle mais qu'elle rejettera avec la même constance. Puis elle y retourne pour 5 années. Soumise au système psychiatrique de l'époque, à 90 séances d'électrochocs, aux traitements choc à l'insuline qui consistent à provoquer des comas insuliniques censés guérir la schizophrénie, à une lobotomie trans-orbitaire et prostituée de force auprès des services médicaux... on se demande comment la jeune femme a survécu.

Vous l'avez compris, la vie de Frances Farmer est une épreuve permanente et le film est un Biopic tout ce qu'il y a de plus classique qui suit les évènements chronologiquement. Je me souviens qu'il m'avait fait forte impression lors de sa sortie en 1982 et je ne l'avais jamais oublié ainsi que la performance de Jessica Lange. Je comprends pourquoi. La réédition du film en DVD m'a donné envie d'apprécier à nouveau cette histoire dingue et l'actrice investie comme jamais dans le LE rôle de sa vie sans doute. Auprès d'elle, Sam Shepard dans le personnage (peut-être fictif) de Harry York totalement dévoué, amoureux, hérite du rôle de chevalier, de Prince, de sauveur. ça lui va infiniment bien.

Le film décortique le pouvoir d'Hollywood qui ne supporte pas qu'une jolie blonde ne se soumette. Frances sera bafouée par ses maris successifs, humiliée notamment par un rôle où on lui fait rejouer des dizaines de fois une scène où elle tombe dans la boue. Même sa maquilleuse/coiffeuse lui arrache pratiquement les cheveux de la tête pour la coiffer. Sans parler de sa mère monstre d'égoïsme et de frustration qui ne cessera d'enfoncer Frances dans l'horreur. On a l'impression que sa vie n'a été qu'une succession de rencontres avec la barbarie. Celle des hommes, de l'industrie cinématographique et de la médecine.

Je trouve que ce film vaut le coup pour le plaisir (douloureux) de faire la connaissance avec une actrice peu connue et apprécier la prestation de l'actrice qui d'ailleurs ressemble beaucoup à son "modèle" je trouve.

La réponse choc et particulièrement émouvante de Frances lorsqu'un inconnu lui demande la raison pour laquelle la police la recherche car elle s'est une nouvelle fois échappée :

"Franchement, je n'ai toujours pas réussi à comprendre ce qu'on me reprochait".
Nous non plus.