CRY MACHO
de Clint Eastwood *
Avec Clint Eastwood, Eduardo Minett
Synopsis : Mike, star déchue du rodéo, se voit confier une mission a priori impossible : se rendre au Mexique pour y trouver un adolescent turbulent et l’amener jusqu’au Texas. Il lui faudra pour cela affronter la pègre mexicaine, la police et son propre passé.
J'aurais tendance à dire qu'il n'y pas grand chose à sauver de ce 39ème long métrage de Clint mais finalement j'ai trouvé quelques raisons de faire preuve d'un peu d'indulgence. La musique country m'a emballée, les paysages sont magnifiques, les chevaux sont beaux. Et l'affiche, je la trouve très belle.
Et puis il y a Clint, son sourire en coin, ses petits yeux rieurs. Mais quand il déplace sa grande carcasse vacillante, cela fait peine à voir. C'est même insupportable. Lorsqu'il est à l'arrêt ou assis, ça va. Dès qu'il bouge, dos voûté, démarche hésitante, ça fait mal.
Dans ce film il y a beaucoup d'animaux. Des chevaux sauvages à maîtriser, un coq batailleur, des veaux, des vaches, des cochons, des chèvres, un chien... Je n'ai jamais vu autant d'animaux dans un film clintisque ou alors j'ai oublié, ou ils sentaient pas bon. Je me suis surprise à penser qu'il aurait plutôt dû faire un reportage, un documentaire sur la vie des animaux en milieu rural texan. Ou bien, un documentaire sur la vieillesse, ce naufrage, qui n'est pas une partie de plaisir.
Mais non, il a choisi d'adapter ce roman de N. Richard Nash que pas mal de célébrités hollywoodiennes se sont disputées depuis des décennies. Roy Scheider, Arnold Schwarzenegger, Burt Lancaster, Pierce Brosnan ont paraît-il été sur le coup. Clint lui-même avait été pressenti pour interpréter Mike mais il y a quarante ans il se sentait trop jeune pour le rôle qu'il aurait bien confié à Robert Mitchum. Comme le temps passe vite, aujourd'hui, il est trop vieux pour ce rôle même s'il essaie de nous donner l'illusion qu'il peut encore dompter un cheval excité ou séduire une veuve de quarante ans sa cadette. Sans compter que lorsqu'il se rend au Mexique pour récupérer Rafaël, la mère du gamin (qui doit avoir 40 ans à tout casser) lui propose illico de partager son lit et plus si affinités sans que cette scène ait le moindre intérêt et la moindre signification pour l'histoire.
Pourtant, les premières images font le job. Comme souvent au volant d'une voiture originale (un pick-up truck chevrolet de toute beauté) Clint roule à deux de tension sur les routes du Texas au son d'une musique country qui convient aux images. Et c'est beau, l'ambiance y est. Ses maigres mains parcheminées sur le volant, Clint m'embarque...
Ecoutez...
La suite se gâte rapidement. Eleveur de chevaux depuis une grave blessure qui l'a fait renoncer à sa carrière de champion de rodéo, il se fait renvoyer sans préavis ni indemnités par Howard son patron. Un an plus tard, le même Howard le contacte pour qu'il aille récupérer son fils Rafaël au Mexique qui vit avec sa mère. Pourquoi Mike doit-il se charger de cette mission délicate ? Mike lui en doit une, mais ça ne tient pas debout et lorsqu'il arrive au Mexique, la mère de l'enfant (qui vit dans une luxueuse villa) lui annonce que son fils est un délinquant insaisissable qui vit dans la rue en pariant sur des combats de coq.
Mike le trouve dans la seconde et le gamin, aussi délinquant que Oui-Oui, se laisse facilement approcher et embarque sans broncher avec le vieux. Evidemment, sans délai et sans nuances les deux deviennent rapidement complices mais comme ils ont les flics et les sbires de la mère aux trousses (on se demande encore pourquoi puisque la mère n'a manifestement rien à faire de son fils, un enfant battu... je n'ai pas compris par qui) ils se réfugient dans un village. Ils volent et changent de voitures, se sortent de situations rocambolesques (une course poursuite à 30 à l'heure...) plus invraisemblables les unes que les autres et sont recueillis par une mexicaine veuve (ça tombe bien) généreuse, souriante, entourée d'enfants et toute prête aux derniers sacrifices. Euh, Clint moi aussi je suis veuve, généreuse et souriante...
Que Clint veuille une fois encore s'offrir une romance au cinéma, on peut comprendre et d'ailleurs il est plutôt touchant même s'il est à peine surpris que ce soit la dame qui fasse le premier pas. Mais ce road-movie neurasthénique avec passage obligé de transmission vers un gosse de 14 ans qui fait tout ce qu'il peut pour s'intéresser à ce qui lui arrive, est d'une candeur qui parfois met mal à l'aise de tant de naïveté et de balourdise. Bref, il est raté. Et puis, et ce n'est pas rien, le film est unanimement mal interprété (sauf par Clint). Le pauvre gamin (d'où sort-il ?) manque furieusement de charisme. Pour sa défense je dirais qu'il n'a pas grand chose à se mettre sous la dent que des dialogues assez pauvres qu'il récite sans conviction avec un air bovin (mes excuses à la famille).
Mais il y a Clint qui se réserve les quelques rares traits d'humour et nous ravit de quelques oeillades rieuses. Insiste-t-il volontairement sur sa démarche hésitante ? Depuis Gran Torino (13 ans déjà), on a tendance à l'enterrer et à parler de film testament. Ce ne peut, ça ne doit pas être celui-ci. The mule pas si ancien ou Gran Torino avaient une autre dégaine pour tirer sa révérence en se crucifiant sur l'autel de la rédemption (oui, ça ne veut rien dire, mais c'est venu comme ça). Cela va faire 30 ans que l'on nous parle de film testament, à peu près depuis Impitoyable. Forcément il y aura un dernier film parce que même Clint, la légende, n'est pas immortel. Mais nous qui l'aimons tant, réclamons autre chose que ce Cry macho.
Finalement je crois que même interprété par quelqu'un d'autre, ce film n'aurait pas grand chose à offrir. Au moins là, on peut une fois encore admirer le savoir faire, les couchers de soleil ocre, les vieilles bagnoles qui font rêver, des nuits à la belle étoile, et regarder Clint nous faire son clin d'oeil charmeur. Mais on attend mieux, beaucoup mieux que cette parenthèse pas enchantée pour s'occuper entre deux confinements !
En plus il a tout le bon matos qu'il faut. Allez, au boulot !
Commentaires
Salut. Quelques observations en vrac avant ma propre chronique...
*** ATTENTION SPOILERS ***
Pascale, tu peux effacer mon commentaire si tu trouves que j'en dis trop pour tes lecteurs à venir.
*** ATTENTION SPOILERS ***
J'aurais prévenu...
1 - La mère n'a manifestement rien à faire du fils, oui, mais je pense que l'idée d'emmerder le père lui plaît. Le gamin est sûrement battu par le gorille que la mère charge de suivre le retour de Clint, et je suppose que ce mec est aussi son amant. L'important, c'est qu'il n'a aucune raison d'aimer sa mère. Je suis d'accord avec toi pour dire que les scènes où celle-ci drague Clint sont lourdingues. Mais ça a un sens: au début, on aurait pu penser que le père dénigrait la mère pour récupérer le môme plus facilement et que ce n'était en fait qu'un salaud. Mais elle ne vaut guère mieux... et au final, Clint laisse le gosse choisir.
2 - Oui, la Mexicaine qui leur ouvre sa porte est un peu trop parfaite, mais elle a quand même le droit à quelques belles scènes... et ce n'est pas seulement une plante verte ! Tu as effectivement plein de points communs avec elle, mais tu n'es pas sur la route entre Mexico et le Texas... désolé...
Ah, et note que Clint est tout de même un peu interloqué quand il fait genre le galant qui refuse qu'une dame lui rende service et qu'elle lui fait dire: "Je fais ce que je veux".
3 - Le jeune acteur qui joue le gamin n'est pas excellent, mais j'ne suis pas sûr que beaucoup soit capable de regarder Clint dans les yeux sans bafouiller. Donc je dirais "moyen plus". Et je trouve que Clint a la classe de ne pas être allé chercher un visage connu.
4 - Est-ce que Clint insiste sur sa mécanique qui se détraque ? Je ne crois pas. Je pense que c'est même une bonne partie du sujet du film. En mode "Je ne suis plus le héros que vous avez connu, mais aimez-moi quand même".
Je suis d'accord en grande partie avec tes observations. Mais ce film n'est pas bon. Tout est mal amené.
La drague de la mère n'a aucun sens.
La sainteté de la mexicaine qui ouvre sa porte et son lit au 1er gringo qui passe, ce n'est pas bien subtil. Et comme les autres, elle ne joue pas très bien.
Pour le gamin, je n'avais pas envie d'une bouille connue mais celui là est vraiment moins que pas terrible.
Clint n'a aucun souci à se faire. Je l'aime toujours.
Ce qui me fait dire que peut-être il accentue sa démarche hésitante c'est qu'il se baisse et se relève, se couche par terre sans problème... et quand il marche, c'est la cata.
Dwight Yoakam ...
L'occasion de réécouter Buenas Noches From a Lonely Room ou quand les souvenirs viennent danser.
https://www.youtube.com/watch?v=gG4LKFoDDCc
Pour le reste pas grand chose à sauver.
++
C'est lui qui chante ???
Parce que côté acting, il fait pas d'étincelles. Lourdaud au propre comme au figuré. Mais je vais l'écouter, c'est trop beau.
C'est magnifique. Il était beau Dwight et il tournait bien...
Interprété et réalisé par quelqu'un d'autre, sur ce scénario-là, le film n'aurait aucun intérêt à mon sens. Il n'en gagne ici, malgré les incohérences que tu pointes (la drague incompréhensible de la mère alcoolo mexicaine est une scène terriblement gênante), que par la manière qu'a Eastwood de l'intégrer à ses thèmes de prédilection, et par sa présence même devant et derrière la caméra. Dès qu'il apparaît, le discours politique semble plus pondéré, plus apaisé et humaniste (le contraire de "l'affaire Richard Jewell") et dépourvu de toute héroïsation (le contraire de "American Sniper", autre figure déjà liée à l'univers très américain du rodéo).
Comme Martin, et comme toi quand je fais le bilan de ton texte, je ne déteste pas le film. Je lui trouve des beaux côtés, quelques passages nimbés dans la lumière du soir d'un personnage esseulé qui, depuis longtemps, marche main dans la main avec la mort, comme pour mieux la conjurer, à l'instar de bien d'autres depuis "l'homme des hautes plaines".
Absolument, sans lui devant et derrière la camera ça n'aurait pas grand sens et peu d'intérêt.
La scène avec ce personnage vulgaire, inintéressant et habillée comme pour aller au bois est une énigme.
Et oui le film est souvent agréable pour les yeux et les oreilles mais ce scenario !!!
Et ces acteurs de 3ème catégorie !!!
Les thèmes récurrents sont bien là mais c'est patapoutesque.
Allez zou, on attend le prochain.
" patapoutesque", comme c'est joli ! :-)
Merci, le mot est plus léger que l'idée :-)
Ta déception a dû être grande... Juste 1 petite étoile pour un Clint....
Oui :-('
1 étoile, un 6 coups aussi.
https://pbs.twimg.com/media/E6ADOczUUAMrdc-.jpg
La base.
Non, nous n'irons pas voir ce film ! Vous n'êtes pas la seule à être déçue, nous adorons Clint mais nous ne sommes pas maso...Nous espérons donc que ce ne sera pas son dernier, qu'il retrouvera une forme d'élan pour nous laisser une dernière oeuvre, un dernier clin d'oeil, avec grandeur et dignité.
Le mieux est quand même de se faire une idée par soi-même. J'adore Clint et je ne me serais pas contentée de l'avis des autres.
Ce matin à France Inter ils encensaient un film que je n'ai pas aimé (Olga).
Vu 'Finch' de Miguel Sapochnik avec Hanks. Un petit bonheur de film.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Finch_(film)
C'est gentil de me le dire mais je n'ai aucune chaîne payante.
J'adore Tom Hanks.
Téléchargement Finch, pas TV. ;-)
oui ben encore pire, ordinateur !
C'est vrai que ça commençait bien. Le vieux pick-up, les grands espaces, un coucher de soleil sur une musique country... Mon univers de prédilection... Mais effectivement, très vite, je me dis que l'histoire est bof, trop de raccourcis - ou invraisemblance comme tu dis... Je ne déteste pas - je me dis à chaque fois que ce sera peut-être le dernier Clint, c'est pour cette raison que je vais voir tous les Clint, mais je peux être difficilement passionné par cette pauvre histoire... Bref, j'oublie et j'attends le prochain Clint, j'espère toujours qu'il y en aura un prochain...
On est d'accord. En voyant les premières images, je me suis dit que les critiques exagéraient et que ça allait le faire. ça le fait pas du tout. Ou peu. Le trio des pas bons : Cry macho, 15 h 17, Hereafter.
Mais bon, on pardonne parce que qu'est-ce qu'on l'aime !
... et Firefox, ça fait 4.
Et Cry Macho est le meilleur des 4.
J'ai oublié La relève dans la série ratage.
Et je n'ai toujours pas vu... les dirty Harry...
Celui réalisé par Eastwood est peut être le meilleur, avec le Siegel. Le dernier réalisé par Buddy Van Horn est le moins réussi.
Merci de ces infos.
On va faire court : sur le podium des flops de Eastwood !
On est d'accord.