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LE DIABLE N'EXISTE PAS

de Mohammad Rasoulof ****

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avec Ehsan Mirhosseini, Shagahavegh, Kaveh Ahanger

Ours d'Or à Berlin, ce film évoque au travers de quatre histoires de citoyens ordinaires un des aspects de l'actuel régime totalitaire autoritaire iranien.

Si le réalisateur, condamné en 2019 pour propagande contre le régime et actuellement assigné à résidence, a choisi le format du film à sketches c'est que le court métrage est moins soumis à la censure dans son pays. En gros, plus le film est court moins la censure s'y intéresse. Il a donc "trompé" le pouvoir en prétendant tourner 4 courts. Bien joué.

L'une des grandes originalités du film est de n'être ni un plaidoyer ni un appel à la révolte. Un constat, pas simple mais encore une fois original car chaque protagoniste des différents segments du film est confronté à un moment ou à un autre à son choix et ses décisions morales, son libre arbitre. Je n'irai pas jusqu'à dire que le film est doux mais il n'est pas visuellement violent comme pouvait l'être La loi de Téhéran par exemple, et il expose clairement les faits. Son dernier film, déjà remarquable, Un homme intègre montrait davantage un homme prêt à tout pour résister et s'opposer.

Saluons une fois encore le courage de ces réalisateurs qui bravent les interdits, s'exposent pour continuer à s'engager, rendre compte au reste du monde et s'insurger contre l'insoutenable, ici, la peine de mort. Doit-on pour autant, parce que le réalisateur se met en danger et qu'il subit des pressions et des condamnations, s'extasier devant ce film ? Non évidemment. Il est des oeuvres courageuses et didactiques dont les bonnes intentions ne cachent pas un manque total de cinéma. Ce n'est vraiment pas le cas ici et je place ce film parmi les GRANDS films de cette année covidée.

Les deux premières histoires nous enferment, dans une voiture, un appartement, une caserne. Les deux derniers s'ouvrent sur la nature, les personnages ayant choisi de quitter la ville pour résister à la tyrannie.

Dans le premier segment, le plus sidérant, celui qui bouscule le plus, on découvre Heshmat un homme en apparence ordinaire même si lors de la première scène, j'ai cru qu'il cachait un corps dans un coffre... Il rentre chez lui, se douche, regarde la télé, va chercher sa femme au travail, très bavarde elle lui raconte sa journée. Puis il passe prendre sa fille à la sortie de l'école qui boude parce qu'il est arrivé en retard. Enfin, il se rend chez sa mère, fait son ménage, son repas. Heshmat est un homme doux, père, mari et fils exemplaire entièrement dévoué à sa famille. C'est aussi lui qui s'occupe de teindre les cheveux de sa femme. J'étais surprise qu'elle tienne tant à ses mèches puisque les chevelures sont constamment cachées sous un voile. Le réalisateur explique cette scène ordinaire qui est en fait incroyable et quasiment un acte transgressif : "Nous avons pris toutes les précautions dans la scène de la teinture. Ce n’est pas l’actrice qui expose sa chevelure, mais une doublure. Elle pourrait ainsi se défendre si cette scène lui était reprochée." Si l'actrice expose sa chevelure, elle pourrait être interdite d'exercer !!! Cette partie du film à la fois chronique familiale et documentaire sur la vie de la classe moyenne se termine de façon abrupte et saisissante. Un choc.

Le Diable n'existe pas (Sheytan vojud nadarad) (2020) de Mohammad Rasoulof  - Shangols

Dans la deuxième partie Pouya, jeune conscrit, ne peut se résoudre à tuer un homme comme on lui ordonne de le faire. On est sidéré d'apprendre que les exécutions des condamnés font partie des besognes dévolues aux soldats. Au fond il ne s'agit que de donner un coup de pied dans un tabouret... Cette idée révulse Pouya, le rend nerveux, angoissé, malade. On se trouve dans cette partie du film face à un véritable thriller. Comment Pouya va-t-il échapper à son "devoir" ?

Le diable n'existe pas un film de Mohammad Rasoulof sortie en salles le 1er  décembre 2021

Le troisième acte nous permet de rencontrer le TRES beau Javad qui lors d'une permission vient demander sa bien-aimée en mariage. Elle est interprétée fougueusement par la très belle Baran Rasoulof (fille du réalisateur). Lorsque Javad arrive il trouve la famille de sa belle en plein deuil. Un de leur très proche ami vient de mourir. Je vous laisse découvrir comment et pourquoi Javad était lié à cet homme.

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La dernière partie est une tragédie intime que j'ai trouvé plausible de rattacher à la deuxième. La réponse à la question : qu'est devenu Pouya pourrait se trouver ici. Une jeune femme moderne qui fait des études à l'étranger vient passer quelques jours en Iran chez un couple dont l'homme pourrait être son oncle. Le mystère est total jusqu'à l'explication...

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Tous ces récits finissent par se répondre et observent que dans une société où règne l'oppression, le seul fait de s'opposer, de dire non vous met en danger de mort. Le réalisateur déroule ses observations avec le plus grand calme, même si ça paraît étrange de le dire ainsi, c'est ce que j'ai ressenti. En mêlant chronique, thriller, mélo il réussit un film d'une cohérence dingue qui vous laisse ko. Il ne se contente pas de réussir un film dossier de l'écran mais réalise un authentique grand film dont le succès lui permettra j'espère de continuer à nous impressionner.

Bravo.

Iran : le cinéaste Mohammad Rasoulof sommé de se rendre aux autorités pour  purger un an de prison – Libération

Commentaires

  • Globalement je ne rate aucun film Iranien, et déjà cette année nous en a offert deux très beau. Je vais voir celui-ci ce soir !

  • Tu ne seras pas déçue c'est du grand et bon cinéma.

  • J'ai pris une claque. Un coup de coeur !

  • Nous avons pu voir ce film déjà en Mai, dans le cadre d'un festival. Un film à conseiller, parce que ce n'est pas qu'une oeuvre de fiction, mais avant tout un témoignage, comme nous l'avons dit sur notre blog !

  • Il faudra que je recherche votre avis mais pour moi c'est en effet un film immanquable.

  • Trop envie de voir ce film... Embouteillage de fin d'année ça attendra malheureusement un média maison je pense. En tous cas il est prometteur semble-t-il !

  • Ah les films de cinéma à la télé, c'est vraiment pas mon truc.

  • On se rattrape comme on peut... Mais je n'ai pas la télé -(ni redevance donc depuis de nombreuses années) ! Mais un vidéo projecteur avec un écran de 3m ;)

  • Ah mais chacun fait comme il veut, simplement pour moi rien ne remplacera la salle de cinéma.

  • Bonjour Pascale, quel film enthousiasmant! En ce qui me concerne, c'est le dernier film que j'ai vu et depuis, rien ne m'attire. Bon week-end.

  • Bonjour dasola.
    Oui c'est un film à voir.
    West side story est très enthousiasmant aussi. Je ne pensais pas pouvoir aimer à ce point.
    Bon week-end.

  • Même si le sujet est difficile les 4 histoires sont superbes. J'imaginais le placide papa et mari simple gardien de prison.... Petit bémol dans la 2eme histoire pour la facilité de l'évasion. Mais il n'est pas prisonnier, malgré les apparences mais militaires. Très jolie histoire que cette demande en mariage et ce lumineux marié et qui devient si fragile après l'apparition de la terrible vérité. Très belle dernière histoire qui fait un lien avec le debut. Les 2h30 passent vite et de beaux paysages de la campagne.
    Entièrement d'accord avec tes ****

  • Entièrement d'accord avec toi également :-) Décidément le cinéma iranien est surprenant.
    Je me suis fait la même réflexion pour l'évasion mais effectivement il est relativement lire.
    Le beau fiancé fait de la peine.
    J'ai fait un lien entre la 2ème et la 4ème histoires.

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