WEST SIDE STORY
de Steven Spielberg ****
avec Ansel Elgort, Rachel Zegler, Ariana DeBose, David Alvarez, Rita Moreno
Maria et Tony vivent à New York dans les années 50, ils tombent amoureux au premier regard. Mais elle est d'origine portoricaine et lui irlandaise.
Ils font chacun partie de deux bandes rivales qui se disputent un bout de terrain voué à la démolition et à moins de vouloir déclencher la troisième guerre mondiale, leur amour est interdit. Devant l'hostilité de leur clan respectif, ils décident de quitter New-York ensemble mais avant cela Tony doit essayer d'empêcher une bagarre entre les deux clans. On connaît l'histoire et vous apprendrai-je que ce film est le remake du chef-d'oeuvre aux 10 Oscars de Robert Wise sorti en 1961 lui-même adapté d'une comédie musicale à succès quelques années auparavant ?
Il semble que ce film soit plus proche de la comédie musicale mais on était quand même en droit de chercher l'intérêt de refaire un film que j'adore et que pour ma part j'ai vu, revu et ratavu sans jamais me lasser. Je n'étais d'ailleurs pas pressée de voir l'étendue du massacre mais je n'ai finalement pas pu résister bien longtemps et je ne le regrette pas. Ce film c'est un grand spectacle enthousiasmant qui donne envie de sauter, de courir, de danser. Qui émeut aussi même si on connaît tous l'issue de l'histoire.
Sur fond de bêtise et de racisme toujours d'actualité, Steven Spielberg s'empare de ce Roméo et Juliette qu'il revisite à peine, transforme un peu et modernise un tantinet. L'orchestration est un chouya plus moderne mais la partition exceptionnelle et endiablée de Leonard Bernstein n'a pas besoin de grand chose pour être déjà fiévreuse, fougueuse, explosive. Les numéros de bravoure s'enchaînent dans des chorégraphies époustouflantes, quelques peu différentes de la version originale. Les textes de Stephen Sondheim (mort en novembre 2021) restent les mêmes.
Lorsque l'on fait connaissance des Jets et des Sharks lors du prologue, les deux groupes déambulent dans les rues de New-York et l'on voit qu'ils font peur aux habitants qui s'écartent sur leur passage. Ce sont des jeunes gens violents qui ont eu une enfance difficile pour les Jets et cherchent à s'intégrer pour les Sharks. Mais Tony sort de prison et souhaite ne plus être mêlé à cette violence. Il travaille dans la boutique de Valentina (veuve de Doc...) et le rôle est interprété par Rita Moreno (aujourd'hui nonagénaire, bon anniversaire !) qui tenait le rôle d'Anita la soeur de Bernardo, chef des Sharks en 1961. Le personnage d'Anita était déjà une révélation il y a 60 ans, c'est encore le cas ici. A l'instar de son aînée, Ariane DeBose est une bomba latina irrésistible. A noter d'ailleurs que les rôles des portoricains sont tous tenus par des latinos. Nul besoin de leur mettre du colorant sur le visage comme ce fut le cas pour George Chakiris (d'origine grecque) danseur exceptionnel et chef des Sharks. Ces considérations nationales faites, revenons en au fait que ce film est épatant.
Cette version ne détrône ni ne fait aucune d'ombre à celle de Robert Wise mais elle est bien plus qu'honorable et si elle est toujours grandement musicale, elle laisse une place considérable aux dialogues ce qui la rend peut-être encore plus sombre. Elle met davantage en avant les problèmes d'intégration, les disparités sociales, les injustices liées à la couleur de peau et donne encore plus de sens à la chanson Somewhere ("there's a place for us somewhere"... interprétée ici par Valentina (Rita Moreno) alors qu'elle l'était par Maria (Nathalie Wood). Cette portoricaine a donc épousé Doc un américain pure souche et dans son drugstore elle accueille aussi bien les Jets que les Sharks. Mais la chanson semble dire qu'il y a une place pour nous quelque part, nous les étrangers, alors qu'en 1961, Maria disait qu'il y a une place pour nous quelque part, nous les amoureux. La chanson en est encore plus émouvante d'autant plus interprétée par la voix hésitante d'une vieille (mais toujours très belle) dame.
Côté interprétation, disons que les garçons ne font pas d'étincelle et c'est, comme je l'ai déjà dit le personnage et l'interprète d'Anita qui remportent une fois encore la mise de la révélation. Maria (Rachel Zegler) est absolument adorable et charmante avec son accent à couper au couteau. Je craignais le pire pour le rôle de Tony sachant que Richard Beymer en 1961 me semble être un des pires acteurs de tous les temps. Après un temps d'adaptation, il ne joue pas très bien dans la première scène, Ansel Elgort s'en tire très bien et forme un couple cohérent avec Maria (là où ça ne fonctionnait pas du tout entre Beymer et Nathalie Wood selon moi) et il parvient à être émouvant et beaucoup plus convaincant que son pas très illustre aîné.
Le grand numéro America est aussi exceptionnel dans les deux versions. C'est électrisant, festif, drôle, profond et la chorégraphie époustouflante laisse pantois et quasiment essoufflé même sur son fauteuil. J'attendais le grand moment Stay cool, l'une de mes scènes, chanson, chorégraphie préférée dans laquelle le nouveau chef des Jets après un drame tente de calmer ses troupes. Elle est remplacée par un saisissant "pas de deux" entre Riff et Tony.
Ce film ne sert peut-être à rien mais Spielberg a bien fait de le réaliser car il fait du bien, interroge et émeut et c'est un spectacle flamboyant. J'espère que personne ne s'attaquera jamais à Singing in the rain par exemple mais franchement refaire West Side Story, une telle oeuvre sans l'abîmer, sans chercher à toute fin à la moderniser, avec tant de virtuosité, des décors, des images, des lumières éblouissants, bravo et merci.
Commentaires
Bonjour Pascale, j'hésite beaucoup à aller voir ce film même si je ne lis que de bonnes critiques. Peut-être au moment de Noël. Je garde un tellement bon souvenir du film de Robert Wise. Bon dimanche.
Bonjour dasola.
Tu risques d'être TRÈS agréablement surprise.
C'est une réussite.
Bon dimanche.
Damned :(
Oui c'était mieux avant et à la télé.
Mieux avant non. Pire aujourd'hui, sans doute, à la Tv ou pas.
Une copie est toujours plus pâle que l'original. Les mots même de 'remake' ou de 'reboot' me donnent de l'urticaire disait Mocky, je suis un tantinet de son avis.
Bon dimanche.
Désolée pour l'urticaire, ça gratte et ça fait mal.
Mais parler des films qu'on a pas vus, c'est gênant pour te répondre.
Ici je ne parle ni de remake ni de reboot et je suis ravie d'avoir vu ce film.
Mais on ne sera jamais d'accord car tu préfères les plate-forme sur ton grand écran. C'est ton droit le plus strict mais tes interventions à 90 % moqueuses ou désagréables commencent à me fatiguer.
En cliquant j'ai fermé les dents et serré les yeux avec l'appréhension de lire (comme chez certains ronchons) du "c'était mieux la fois d'avant". Et puis finalement, pluie d'étoiles sur cette nouvelle "West Side Story" ! Et je suis d'accord sur TOUT ce que tu écris, y compris sur le fadasse Beymer bien mieux servi ici par cet Ansel (inconnu e mes services), qui a trouvé une charmante Gretel en la personne de mademoiselle Zegler. Une version virtuose qui, comme tu l'as très bien écrit, ne fait pas d'ombre au film de Wise (plus ample que le Spielberg, plus expérimental aussi, et plus de son temps), et s'offre comme une ode au cinéma classique (où fourmille quantité de clins d'oeil pour cinéphile, et je parle à une adoratrice de "an affair to remember"). Ce que propose Spielberg est moins une entreprise de démolition qu'une formidable campagne d'embellissement, rêvant d'un lieu où il y aurait une place pour tous, une place pour les deux films qu'on pourrait se passer à la suite tant on ne se lasse pas de leurs chansons.
Voilà :-) cette version n'empêchera pas de voir et revoir encore le Wise malgré ce pauvre Tony (Beymer) qui n'a même pas réussi à causer du tort au film. Je suis la première surprise d'avoir tant aimé. C'est pareil et différent. Les chansons, les chorégraphies. Et les différences : super idée pour la scène de l'Officer Krupke dans le commissariat et la nouvelle interprétation du sens de There's a place for us, entre autre.
America : c'est splendide.
Le clin d'oeil à MON affair to remember ?... je lirai sans doute chez toi où tu l'as repérée.
Quand je vois New York et une chapelle, je pense désormais à Nickie et Terry.
Comme a chaque fois, je verse ma larme sur "Somewhere", mais je dois dire que c'est l'ensemble du répertoire qui m'a cueilli cette fois. Spielberg descend dans la rue et ça fait un bien fou à l'America, Tonight est magique, à deux ou à quatre, Cool sur les quais est très cool aussi, et puis cette explication sur A boy like m'a pris a la gorge. Beau boulot de Newman pour cette revisite de l'orchestration, et surtout Kaminski, quel génie!
Ah ok. Moi aussi quand je vois New York et surtout l'Empire State building, ça me donne envie de donner rendez-vous à Nick et de m'y rendre.
C'est vrai que j'ai l'impression aussi que la version Spielberg est plus émouvante mais n'enlève rien à celle de 1961 revue hier tout à faire par hasard dans le poste. ça fait du bien.
Je vais y aller. Mais pas tout de suite... mais pas trop vite...
Pour tout dire, j'en suis presque à espérer qu'il sera toujours visible début janvier !
Bon je pense que ce n'est pas le genre de film sur lequel il faut se précipiter pour qu'il soit encore à l'affiche mais je pense que début janvier, ça devrait le faire.
Je suppose qu'il restera au moins jusqu'à la fin des vacances scolaires.
Absolument. C'est un drame mais c'est festif.
Bonjour Pascale,
J'attendais ton avis avec impatience, même si j'avais déjà le mien (je suis allée voir le film le jour de sa sortie). ;-)
Et je partage ton opinion à 100% (y compris sur le fadasse Richard Beymer).
J'avais lu que Ansel Elgort était le moins convaincant du casting, et je l'ai trouvé fabuleux. Beaucoup plus moderne et moins cucul que Richard B, tout comme la relation entre Tony et Maria d'ailleurs.
La transposition que Spielberg a faite des scènes mythiques comme America, One hand One heart et Gee Officer Krupke est très intelligente et sert parfaitement le film.
Bref, je vais retourner le voir ! :-)
Bonjour Karine, C'est vrai que les scènes revisitées sont particulièrement réussies et qu'Ansel remplace avantageusement ce pauvre Richard Beymer (mais c'est quoi cette erreur de casting ???).
Pas impossible que je retourne le voir car ce film fait trop de bien aux yeux, aux oreilles et au cœur.
Beaucoup aimé également, mais je lui préfère néanmoins la version de 1961 (mais on est ok Beymer est très mauvais), le côté Broadway lui donne un cachet supplémentaire, et Spielberg a un peu abusé niveau "soleil couchant".
Oui, Spielberg réussit son pari en faisant un film qui fait volontairement écho aux maux de la présidence Trump. Bravo à lui car ce n'était pas gagné ! Le film n'est pas parfait (j'ai trouvé toute l'ouverture assez ratée), mais "America" est une fabuleuse réinvention de la scène d'origine et, comme tu le dis, Ariana DeBose, qui éclipse tout le monde, est une bouleversante Anita. Deux version cinématographiques vont dorénavant co-exister et dialoguer à travers le temps et c'est une bonne nouvelle pour le film de Wise et Robbins.
Oui la scène d'ouverture n'égale pas la version 61. Disons qu'il y va crescendo :-)
J'ai beaucoup aimé la réinterprétation de Somewhere.
Je me demande si ceux qui vont découvrir cette version vont se pencher sur l'ancienne. Je l'espère car elle reste quand même un summum.
Moi jaime les jolies images, les contre jour et les soleils couchants.
Le pauvre Bremer fait l'unanimité contre lui.
J'ai été voir West side story au théâtre du Chatelet, cadeau de ma meilleure amie pour mes 27 ou 28 ans ! Mais je n'ai toujours pas vu le film, ce qui fait que je verrai peut-être ce Spielberg avant l'original ! Il est dans ma liste, et je suis très encouragée à aller le voir par les critiques comme la tienne! Il va rester un bon moment à l'affiche donc ça sera surement en janvier :)
ah super, ça va être une sacrée découverte. En voir un te donnera envie de voir l'autre sans aucun doute. :-)
Nous partageons votre enthousiasme !
Difficile de résister :-)
La version de 1961 est passée hier soir à la télé. Quel monument, tout de même (malgré la présence du fade Tony). Les chorégraphies de groupe sont mes passages préférés. C'est grandiose.
Mais savoir que les comédiens sont doublés dans les chansons rend ces scènes un peu moins réalistes que dans la version 2021, je trouve.
Je crois que les deux films peuvent tout à fait coexister, il y a de place pour tout le monde.
:-)
Je suis tombée dessus par hasard. Il était tard mais on est happé immédiatement.
Oui les deux versions peuvent exister. Quel spectacle !
Qu'elle était belle Anita.