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UN HÉROS

d'Asghar Farhadi ****

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Avec Amir Jadidi, Mohsen Tanabandeh, Sahar Goldust

Emprisonné à cause d'une dette qu'il n'a pu rembourser à Braham son ex beau-frère, Rahim se voit accorder une permission. Il veut mettre à profit ces deux jours pour tenter de convaincre son créancier de retirer sa plainte tout en lui promettant de lui rembourser une partie de sa dette. Braham refuse, il estime que Rahim est malhonnête.

Les Cahiers, les Inrocks et Libération n'ont pas aimé ce film, c'est plutôt bon signe. Laurent Delmas de France Inter trouve que le cinéma d'Agshar Farhadi ronronne... Donnez-moi tous les jours du cinéma qui ronronne ainsi. En effet, à l'heure du bilan annuel, je peux dire que le cinéma iranien pourra être élu LE cinéma de l'année. Après La loi de Téhéran, Le diable n'existe pas, ce film a toutes les chances de figurer au palmarès annuel de cette route. Comme ses collègues réalisateurs Asghar Farhadi fait l'objet de pressions de la part du gouvernement iranien qui aimerait les faire taire. Et comme ses collègues il a l'art de nous raconter des histoires de personnages ordinaires tout en nous parlant de son pays, de la société iranienne.

La mésaventure du personnage s'inspire d'un fait divers réel dont le cinéaste s'empare de façon à nous scotcher aux basques de Rahim son "héros" parfois opaque et insaisissable. Le jeune homme est père d'un petit garçon bègue. Rahim et Farkhondeh, l'orthophoniste du gamin sont très amoureux. La jeune femme a trouvé un sac de pièces d'or qui pourraient permettre à Rahim de payer une partie de la dette. Mais Bahram ne veut pas de cet arrangement. Il veut la totalité de la somme. Rahim décide donc de rendre les pièces d'or à sa propriétaire. C'est cet acte honnête et généreux qui fait de lui un héros. La télé, les réseaux sociaux et une association d'aide aux victimes se saisissent de l'histoire de Rahim. Une collecte est même organisée pour financer sa libération. Mais il n'envisage pas de retourner en prison et espère que sa nouvelle notoriété sera un atout.

Les rumeurs, les fake news, l'influence des réseaux sociaux, la manipulation du directeur de la prison puis les mensonges et magouilles de Rahim, l'utilisation du bégaiement de son fils (bouleversant) pour amadouer l'opinion publique rendent le film de plus en plus anxiogène à mesure que le "héros" s'enfonce dans les ennuis. Cela semble de plus en plus inextricable. On ne sait plus toujours très bien où on en est tant l'écheveau dans lequel le réalisateur place son personnage se complexifie au fil du temps. Et la personnalité insaisissable de Rahim ajoute au trouble.

La famille est le pivot qui permet à Rahim de se tenir debout. Infatigables soutiens, sa soeur, son beau-frère, sa "fiancée" l'épaulent et le protègent sans faillir. Quitte à commettre de redoutables erreurs. Les scènes intimes sont admirables. Les autres personnages sont également bien campés et parviennent à exister avec profondeur. Comme le créancier qui est plutôt un brave type ou la responsable de l'association caritative d'une grande intégrité.

A noter une scène introductive que j'ai trouvée de toute beauté. Rahim se rend sur le chantier d'un tombeau antique sur lequel travaille son beau-frère. L'ascension pour arriver au sommet du mausolée à l'aide d'escaliers qui m'ont paru précaires semble laisser augurer que les heures qui vont suivre ne vont pas être une partie de plaisir pour Rahim. L'acteur d'une incroyable beauté affiche d'abord un sourire angélique d'innocent qui se fige peu à peu pour se transformer en masque de dureté. Je l'ai déjà dit, son interprétation rend son personnage parfois énigmatique et pas forcément sympathique. On avait déjà pu voir cette beauté dans La permission autre film iranien impressionnant.

Un héros : une dette déshonorante - Cinéma - Le Télégramme

Coups de théâtre et suspense maintiennent l'attention de bout en bout. L'interprétation est au diapason. Bravo !

Commentaires

  • On va essayer de trouver une séance, votre critique confirme le talent de ce metteur en scène
    Passez de belles fêtes de fin d’année

  • Je vous encourage à faire le maximum pour voir ce film.
    Je vous souhaite de très agréables fêtes également.

  • Je vais essayer de le voir avant la fin de l'année. (moi aussi quand je vois certaines critiques, je me dis que je peux y aller sans crainte).

  • Merci :-) Encore un excellent film venu d'Iran.

  • Bonjour Pascale, j'en redemande des films qui "ronronnent" comme cela. Remarquable de bout en bout. Bonne fin d'après-midi et bonnes fêtes.

  • Bonsoir Dasola.
    Les critiques méritent des baffes parfois. J'étais complètement "stressée" pendant tout le film. Pas du tout ronronnante. Bonne soirée et excellent Noël.

  • J'adore ton coup de gueule en début de chronique (Ceci dit tu n'es pas seule, Positif a aimé je crois). Complètement d'accord avec toi sur le cinéma iranien. Tu m'as donné très envie de le voir. Je vais essayer de le mettre au planning.
    D'ici là, bon sapin et champagne à bûche que veux-tu. ;-)

  • C'est pas vraiment un coup de gueule... mais franchement leur façon d'aimer le cinéma m'exaspère. Il n'y a pas que l'élite qui voit des films.
    Ah oui, il FAUT le voir celui-là. Un de plus.
    Je déteste le champagne mais je peux me débrouiller sans. C'est chez moi cette année. On teste à gogo. 8 sur 12 négatifs. On attend les 4 derniers résultats.

  • Je ne sais pas ce que les Inrocks, Libé, les Cahiers et Laurent Delmas ont contre ce film (de toute façon je ne jure que par Michel Ciment de Positif, même si je lui en veux de ne pas aimer Verhoeven), alors que c'est sans doute le meilleur Farhadi depuis "Une Séparation" (bon certes, je n'ai vu que "Le Passé" entre les deux). Un film fort, édifiant, au propos universel et doté d'une mise en scène sèche mais travaillée, et ô combien en prise avec son récit. Bref, comme tu l'as écrit, à mettre au rang de coups de maîtres iraniens de cette année.

  • J'avais moins aimé le Passé et n'avais pas du tout apprécié les enfants de Belleville mais contrairement à tout le monde j'avais été embarquée par Everybody knows.
    Le cinéma iranien c'est quelque chose ! Comme le cinéma coréen on sait qu'on va vivre une expérience.

  • C'est vrai que le cinéma iranien nous offre de belles découvertes. Très belle 1ere scène sur ces échafaudages ( en bambou ??) qui nous donne le vertige et nous permet de découvrir un peu l'Iran.
    Au départ on a envie d'aider ce pauvre Rahim mais il devient un peu exaspérant à tout faire pour emmêler cette situation.
    Je crois que je viens de voir plus de film iraniens en quelques semaines ( 3 films et sans doute un 4ème d'ici quelques jours) que dans tout le reste de ma vie....!

  • ça m'a vraiment fait flipper cette première scène !
    Oui il peut être agaçant avec son sourire permanent.
    Le cinéma iranien devient incontournable et en effet un nouveau film va sortir ces jours ci.

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