de Frédéric Tellier ***(*)

Avec Gilles Lellouche, Pierre Niney, Emmanuelle Bercot, Marie Gillain, Jacques Perrin

Une affaire de pesticides aux conséquences dramatiques va réunir une prof de sport activiste, un avocat parisien au bout du rouleau et un brillant lobbyiste défendant les intérêts d'un géant de l'agrochimie.

Impossible de ne pas penser aux grands films américains à la Erin Brokovitch et plus récemment Dark waters dans lesquels de "petits" anonymes s'en prennent à de puissants groupes pharmaceutiques ou agrochimiques pour dénoncer l'ampleur des dégâts que leurs produits occasionnent. Ces industries sans morale nous empoisonnent. Leur seule motivation est le profit financier et la santé publique ne les concerne pas.

La toxicité des pesticides est ici le coeur du sujet. Elle est mise en doute par des rapports scientifiques tandis que les agriculteurs ou le voisinage multiplient des cancers. Il est saisissant de voir et surtout d'entendre tous les intervenants qui défendent la finance répéter à l'envi : "les pesticides sont moins dangereux que les bonbons que vous donnez à vos enfants". Dans le film c'est carrément un mantra que tous rabâchent entre eux, devant le moindre interlocuteur et dans les media.

Frédéric Tellier déjà très efficace dans L'affaire SK1 est ici aussi assez percutant dans sa dénonciation du capitalisme cynique même si l'on peut regretter que l'affrontement entre le Goliath incarné par Pierre Niney et l'avocat se résume en une seule scène certes assez magistrale comme un climax frustrant trop vite interrompu. L'insolence et l'obscénité face à l'incorruptibilité et la justice sont parmi les meilleurs moments du film.

Comme souvent dans ce genre d'histoire proche du réel est qu'on se fiche comme d'une guigne de la vie privée des personnages trop archétypale pour intéresser. Même si cela donne l'occasion et le plaisir de revoir Marie Gillain dont hélas le rôle aurait pu être coupé au montage sans perturber la bonne marche de l'ensemble.

Il est difficile ici de faire le poids face à Pierre Niney, absolument étonnant dans le rôle du lobbyiste froid et sans affect. Avec son visage, son corps, son costume parfaits de premier de la classe, il est cinglant, brutal tout en ne se départissant jamais d'un calme et d'une maîtrise de soi impressionnants. Jamais il ne sourcille ni n'exprime la moindre émotion pour nier l'évidence. Gilles Lellouche beaucoup plus convaincant dans ses derniers rôles de flic et notamment dans Bac nord endosse le costume un peu trop grand pour lui d'un avocat minable, border line et alcoolo sans réussir à s'imposer vraiment. Emmanuelle Bercot à quant à elle les épaules et la rage pour incarner une militante jusqu'auboutiste.

A noter la présence très cohérente et toujours aussi charismatique de Jacques Perrin dans le rôle symbolique et emblématique d'un homme militant usé par les combats vains qui peuvent mettre sa vie et celle de ses proches en danger.

Malgré quelques réserves, le film est efficace et passionnant et malgré aussi les aspects navrants de la nature humaine qu'il dépeint.