EVOLUTION
de Kornel Mundruczo ***
avec Lili Monori, Annamaria Lang, Goya Rego
Un groupe silencieux nettoie à grande eau, brosse, récure une salle sinistre. Ils restent silencieux mais on les sent troublés.
Il y a de quoi. Cette pièce qu'ils décrassent et désinfectent est une chambre à gaz et le camp vient d'être libéré par l'armée russe. Des murs et des cavités d'évacuation ils extraient de longs filaments. Ce sont des cheveux. Et puis, horreur et bonheur suprêmes, des égouts ils sortent un bébé, vivant et le médecin le déclare en bonne santé. Quelques décennies plus tard, le bébé est une vieille dame à la santé chancelante qui reçoit Lena sa fille qui aimerait se libérer du poids des souvenirs flottants de sa mère. Le petit fils Jonas quelques années après à Berlin ne sait que faire de sa judéité. Il fait tout, même inconsciemment pour casser cet héritage de la douleur et du chagrin.
Vous l'avez compris, ce film n'est guère réjouissant même si la fin nous laisse à penser une fois de plus (au cinéma) que l'avenir de la Planète est dans les mains et le coeur des enfants. Jonas, rejeton miraculé de la Shoah finalement (si sa grand-mère n'avait été sauvée, il ne serait pas là) tombe amoureux d'une jeune fille au crâne rasé. On comprend qu'elle doit ce look à son père qui lui a rasé la tête. On la voit, dans une scène discrète, remettre son voile avant de rentrer chez elle. Imaginer une réconciliation entre les juifs et les arabes n'est pour l'instant qu'un rêve de cinéma que le réalisateur met en scène avec douceur.
Les avis divergent mais c'est la partie centrale qui m'a le moins plu. Elle est très bavarde et la conversation des deux femmes est parfois abstraite voire absconse. Et on comprend mal pourquoi Lena s'agite en tout sens pour finalement ne pas faire grand chose. Tout comme ce moment évoquant le déclin physique de la vieille dame qui ne m'a pas paru indispensable. Ce segment s'achève néanmoins par une séquence apocalyptique dans un appartement dont on se demande comment le miracle du cinéma peut permettre de tels moments.
Cette partie est par contre encadrée par deux histoires qui m'ont semblé beaucoup plus percutantes émotionnellement. Notamment la première qui dans un plan séquence d'une demi-heure quasi silencieux donne à comprendre sans la montrer toute l'horreur de ce qui s'est passé dans les camps. La caméra qui s'échappe et s'élève peu à peu au-dessus du camp est bien plus éloquent que bien des discours.
La dernière partie consacrée au jeune Jonas, élève victime de harcèlement d'une infinie douceur apporte la lumière à ce conte sombre. La beauté et la force de cette séquence doivent sans doute beaucoup à son jeune interprète époustouflant de justesse et de naturel, le jeune allemand Goya Rego dont on trouve encore peu d'informations sur les internets mondiaux. Espérons que ce beau rôle lui ouvre les portes d'une belle carrière.
Commentaires
Il m'intrigue ce film, suffisamment pour avoir envie de le voir.
Il est fort ce film et secoue.
Complètement d'accord avec toi sur cette partie centrale un peu inerte. Mais dans l'ensemble le lien entre les trois parties n'est pas très probant, il pourrait s'agir de trois courts distincts que ça le ferait aussi... Sur l'ensemble une déception malgré un premier segment très très réussi
Je suis d'accord on sent mal le lien entre les 3. Le lien entre le bébé et le jeune garçon n'est pas flagrant. Neanmoins je suis ravie d'avoir vu ce film.
La 1ère partie est complètement dingue.
J'ai été saisie par le premier chapitre, glaçant et virtuose, qui m'a hantée longtemps après. J'ai aimé la maitrise des plans séquences des deux autres mais sans réussir à rentrer dedans. J'avais beaucoup aimé white dog, je suis moins convaincue par évolution.
Cette première partie est impressionnante au sens premier du terme.
Le chapitre avec les enfants était vraiment bien aussi je trouve.
Je ne pense pas avoir vu White dog.
Je suis d'accord avec tous les avis : la première partie est (de loin) la plus réussie, la deuxième étant presque complètement ratée. Dommage. Cela aurait pu être un grand film.
D'accord aussi avec les avis et le mien. La première partie est extraordinaire. La deuxième parfois même pénible. A part cette inondation assez inexplicable mais spectaculaire.
La troisième m'a beaucoup plu.