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EO

de Jerzy Skolimoski **

EO de Jerzy Skolimoski, cinéma, Sandra Drzymalska, Tomasz Organek, Mateusz Kosciukiewicz

Avec Sandra Drzymalska, Tomasz Organek, Mateusz Kosciukiewicz

Le monde souvent cruel, rarement doux, toujours mystérieux vu à travers les yeux d'un âne. 

Sur son chemin de croix, EO, âne gris au regard mélancolique vit de multiples expériences trimballé indépendamment de sa volonté (la volonté de l'âne sera étudiée lors de l'épisode 2)  dans plusieurs pays et (mal)mené par divers propriétaires. Lorsque le film démarre, la vie d'Eo semble plutôt douce au côté de la brindille Kassandra avec qui il partage un numéro de cirque. La belle à la robe rouge flamboyant ne cesse de le couvrir de caresses, de baisers, lui susurrer des mots tendres à ses grandes oreilles et le protéger des mauvais traitements de ceux qui veulent l'utiliser comme bête de somme. Mais une loi nouvelle exige que les animaux ne soient plus utilisés dans les cirques. On constate que ce n'est pas forcément une bonne idée car manifestement ceux qui hurlent aux mauvais traitements ne se soucient guère de ce que deviennent les animaux qui quittent les cirques...

Voilà donc Eo séparé de sa belle. On le retrouve dans une ferme, il s'en échappe, sert de monture à des enfants, de compagnon de beuverie à des fêtards qui ont rapporté la coupe à la maison, de souffre-douleur à des footballeurs et leurs supporters (manifestement l'engeance humaine la plus infecte), d'alter ego éphémère à un TRES BEAU curé pas très catholique. Il voyagera aussi au côté d'un routier sympa féru de heavy métal dont l'humour lui coûtera cher et accompagnera un troupeau de veaux pour un voyage désespérant. Autant dire que le road trip d'Eo permet au réalisateur de sauter allègrement du coq à l'âne pour nous donner un échantillon de l'espèce humaine peu réjouissante la plupart du temps. Aux plus durs moments de son existence, Eo se souviendra dans des éclats de rouge éblouissant de la douce Kassandra et de ses caresses.

Et au milieu de tout cela ne coule pas une rivière non, mais apparaît la Comtesse Huppert qui s'en vient casser quelques assiettes et foutre le dawa dans le tiroir à argenterie pendant que sa fille Lolita lui ouvre la porte... Touche-t-on ici le fin fond du ridicule ou s'élève-t-on au zénith du génie ? Je reste sans voix et sans avis alors que EO (le film ou l'animal ?) a mis Cannes et son jury en émoi.

Je crois qu'il faut être dans la tête de Jerzy, vieux monsieur misanthrope (mais loin de moi l'idée de lui en faire le reproche) pour comprendre de quoi il s'agit ici. Il prévient pourtant à l'issu de son film qu'il a été réalisé exclusivement pour l'amour des animaux et qu'aucun âne n'a été martyrisé. Il y a dans la douceur d'un âne, complètement contredite par la rudesse puissante et gênante de ses vocalises, qui jamais ne se rebelle, comme un antagonisme à la bêtise brutalité humaine. Halleluyah !

Ce film a ceci de merveilleux qu'il permet à tous d'y poser toutes les interprétations possibles et imaginables. Faites des recherches à ce sujet, vous verrez, ça peut être gratiné. Je ne veux pas faire l'âne pour avoir du son, mais je n'ai pas le niveau de haute voltige intellectuelle qui permet une interprétation hautement philosophique du spectacle.

On parle beaucoup d'expérience sensorielle. Et là, je ne peux qu'approuver, le travail sur l'image et le son qui mériteront des récompenses justifiées aux César polonais. J'ai particulièrement aimé le cataclop des sabots sur la route. Quand Eo trottine, c'est tellement choupinou que j'ai vraiment envie d'adopter un âne. La musique de Pawel Mykietyn est une splendeur et certains paysages sont à couper le souffle, notamment dans une forêt, sur un pont, devant un barrage.

J'avais détesté l'Essential Killing du même Skolimoski, sans doute parce que je n'y avais rien compris non plus. Mais manifestement, je suis plus sensible au sort d'un âne tout mignon qu'à celui d'un taliban même quand il a l'apparence de Vincent Gallo.

Henni soit qui mal y pense, si vous aimez les aventures et les expériences cinématographiques peu communes, singulières voire uniques en leur genre, ce film vous tend les bras.

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Commentaires

  • Huppert est là-dedans ? Ça m'avait échappé. J'ai bien envie de le voir cet âne, tiens je vais écouter ce que les grands cerveaux du Masque et la Plume en disent ce soir.

  • Oui elle apparaît de façon totalement incongrue.
    Je pense que les masqués plumés vont l'encenser. Le contraire me surprendrait.

  • Sacré Pierrot :-))) ce film est clivant.

  • Mais elle est toute choupinou cette critique ! Je m'attendais à un charcutage façon salami et je lis une déclaration d'amour pour l'animal qui vaut bien mieux que ces deux maigres étoiles. A moins que ce ne soit l'arrière-goût Skolimowski qui t'empêche d'être plus enthousiaste. J'avais aimé "essentiel killing", et aussi "le cri du sorcier", les deux seuls Skoli que j'ai dû avoir avant celui-ci. Je connaissais donc son amour des sujets vagabonds ("du coq à l'âne"... on dirait moi quand tu écris maintenant, fais gaffe).
    Sur la partie Huppert et le martyre de la vaisselle, je suis du même avis que toi néanmoins.

  • Je déteste le salami et si je vois un âne (souvent l'âne est seul) dans un champ, je m'arrête et je discute (authentique). Le regard d'un âne m'attire.
    J'ai vu les mêmes films que toi mais je ne suis pas skoli addict. Il n'aime pas les humains ok, mais la vaisselle lui a fait quoi ?
    Et mon henni soit qui mal y pense, tu l'aimes mon henni soit qui mal y pense ?

  • Bonjour Pascale, je regrette que l'âne ne soit pas plus présent car il est doux et gentil pas comme la bande d'abrutis qui jouent au football. En tout cas, je retiens la musique assourdissante et la photo peut-être géniale mais moi, je n'aime pas du tout. Et que vient faire Huppert dans cette galère? Bonne journée.

  • Bonjour Dasola, je comprends parfaitement ton agacement.
    J'ai trouvé la musique parfois très belle et parfois envahissante je suis d'accord.
    Mais le calvaire de Eo n'est presque rien comparé à celui de Tori et Lokita...
    Isabelle est de tous les plans étranges non ? Et si elle aime casser la vaisselle, autant lui faire ce plaisir.

  • Merci de ta très jolie chronique, cet âne a une bonne bouille, mais au vu des commentaires, je pense que ce sera un excellent film d'avion (tu devrais créer une rubrique).

  • Je ne me rends pas vraiment compte de ce que sont les films d'avion. Je n'ai pas pris l'avion depuis plus de 10 ans et pas sûre que je le reprenne un jour. Mais si je devais voir un film dans un avion je crois que j'en choisirais un divertissant :-)

  • Quelle jolie critique !
    Je n'ai pas bien compris ce qu'Isabelle venait faire ici et son rapport avec l'âne. pour le reste c'est vraiment beau. Et ces ânes, quelle mignonnerie.
    SPOILER : à la fin il va à l'abattoir ?
    En végane convaincue, ce film a tout pour me toucher. Pourvu qu'un jour nous arrêtions de tourmenter à ce point les animaux.

  • :-)
    J'adore la mignonnerie des ânes depuis toujours. Je me souviens d'un en particulier qui trottinait tout seul tranquille dans les rues d'un village au Maroc. Ça faisait le cataclop tout mimi.
    Et oui, Eo s'en va à l'abattoir !!!
    J'ai déjà vu du salami d'âne sur un marché.
    Oui, y'en a un peu marre de toute cette viande.

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