de Luca Guadagnino °

Avec Taylor Russell, Thimotée Chalamet, Mark Rylance, Chloé Chevigny

Maren vit avec son père dans un logement à la limite de la salubrité. La nuit, il l'enferme mais elle s'échappe et rejoint des copines d'école à une soirée pyjama.

Brusquement Maren prise d'une grosse fringale bouffe le doigt d'une de ses copines. Habitué depuis ses trois ans à la boulimie de sa fille, le père rassemble un maximum d'affaires et ils quittent la maison, la ville, l'Etat avant l'arrivée de la police. Et puis un jour papa décide qu'il n'en peut plus de sa fille. Elle a 18 ans, elle peut se débrouiller seule. Pour tout viatique, il lui laisse son acte de naissance et une cassette, qu'elle mettra trois semaines à écouter (normal, quand votre père vous abandonne en vous laissant une cassette (on est dans les années 80 et ça n'a strictement aucune importance, sauf qu'il y a baladeur et une cassette...), vous l'écoutez par petits morceaux). Elle décide de se mettre à la recherche de sa mère qu'elle n'a pas connue et dont elle aurait hérité le gène du cannibalisme.

Maren prend le bus et en chemin elle rencontre larirette larireette, Sully qui l'a reniflée à plusieurs pâtés de maisons. C'est ainsi, les cannibales, qui entre eux s'appellent les mangeurs, se repèrent au loin mais, règle numéro 1 : un mangeur ne mange pas un mangeur. Celui-ci a une morale : il ne tue pas. Il pénètre donc dans une maison où une vieille dame (bien grasse) est en train de succomber lentement à une mauvaise chute ou à un malaise... bref elle ne va pas bien. Quand la dame expire, Sully partage son repas avec Maren. Il partagerait bien plus si affinités et ne serait-ce qu'un bout de route avec Maren mais elle préfère continuer seule et bim, à la supérette elle tombe sur Lee, un viandard comme elle.

L'osmose est immédiate, les deux jeunots ont des soucis avec leurs parents, ça crée des liens et surtout ils ne trouvent pas leur place en ce bas monde. Parfois ils ont les crocs et là, faut que ça saigne ce qui n'est pas une bonne façon de mener sa vie.

ATTENTION ça va spoiler.

Alors ils traversent plusieurs états au volant d'un pick up bleu, retrouvent la mère de Maren qui s'est grignoté les avant-bras et croupit dans un hôpital psy. Et le réalisateur pourtant tout foufou de tourner son premier film aux States ne tire absolument aucun parti des paysages qu'il fait traverser à ses deux tourtereaux. Tout cela est platement filmé, la romance est d'une niaiserie abyssale, les dialogues d'une inconsistance à pleurer. Tout est d'un mou et la soi-disant romance ne passe pas l'écran. La petite Taylor Russell (qui a 28 ans, joue le rôle d'une fille de 18 et en paraît 12) ne m'a pas fait une forte impression. Timothée Chalamet pas concerné semble totalement ailleurs. Et le premier qui évoque La Balade sauvage de Terrence Malick va entendre parler du pays !

Soudainement, le couple de barbaqueux décide de se ranger des voitures alors que leur penchant anthropophage était jusque là réputé totalement incontrôlable. Ils habitent un joli logement, ont un travail et à aucun moment ne seront inquiétés par la police malgré la flopée de cadavres qu'ils laissent sur leur passage. Et puis le vilain Sully resurgit et s'en prend à Maren. Lee intervient, se prend un mauvais coup de couteau, se vide de son sang après avoir ouvert le bide de Sully (dont Maren va grignoter les intestins) et Maren boulotte son chéri à sa demande... C'est tellement simpliste, inconsistant !!! Et contre toute cohérence, après cette scène où les trois personnages pataugent dans un bain de sang, le réalisateur revient dans le logement tout propre et bien rangé et l'on retrouve les deux chéris bien vivants, nus et enlacés. N'IMPORTE QUOI. FIN.

Ce film clôt en beauté ma désastreuse semaine cinématographique. Reconnaissons que cette année le jury de Venise a été aussi inspiré que celui de Cannes : ce film a remporté le Lion d’Argent du meilleur réalisateur et Taylor Russel le prix Marcello Mastroianni récompensant le meilleur espoir. Encore une fois mes bras dégringolent.

P.S. : un bon point à noter, la bande son et surtout la sublime chanson de Joy Division, la voix incroyable de Ian Curtis.