DOGMAN
de Luc Besson **
Avec Caleb Landry Jones *****
Avec Caleb Landry Jones, Jojo T. Gibbs, Lincoln Powell
Pour avoir osé affirmer à son père (alcoolique qui bat femme et enfants) qu'il préfère les chiens à sa famille, Douglas est mis en cage au fond d'une cour avec des chiens affamés et passera plusieurs années de son enfance en leur compagnie.
Contre toute attente, les animaux prennent soin de l'enfant qui n'a de nouvelles du reste du monde que par l'intermédiaire de quelques revues abandonnées au fond des cages par sa mère qui ne tarde pas à quitter l'endroit sans penser à emmener son enfant. Il reste donc seul avec son rat d'église de frère et son taré de père qui finit par le rendre paraplégique en lui tirant une balle dans le corps... Sorti miraculeusement de l'enfer, Douglas, placé en foyers n'obtient l'affection de personne. Devenu adulte, il vit entouré d'une meute de chiens et finit par obtenir un emploi auprès de gentils transformistes qui lui offrent une place dans leur spectacle. Mais la vie ne peut être simple pour un personnage de Besson dès lors que ni Marco, ni Korben Dallas, ni Léon ne passe à proximité.
J'ai hésité à parler de ce film que je suis allée voir en présence de Luc Besson qui m'a paru particulièrement embarrassé et pas vraiment aimable lors de l'entretien qui a suivi la projection alors qu'il affirme n'exister que par nous, le public. J'en suis sortie plus que mitigée ayant ressenti une pointe d'ennui et de malaise tout en ayant eu confirmation que Caleb Landry Jones est un acteur exceptionnel. Sa performance de tous les instants dans ce film est époustouflante. J'ai trouvé le film sans réel rythme, uniquement basé sur des flash-backs faciles pour y insuffler un semblant de suspense alors que chaque scène m'a semblé téléphonée, peut-être à l'exception de la scène finale ridiculement christique. Mais avec le temps qui passe, des images me reviennent et me confirment que tout le film n'est pas à jeter à la poubelle. Et je dois bien admettre que si aucun film de Besson ne m'a plu depuis au moins 25 ans, je reconnais qu'il sait toujours manier la caméra et nous raconter une histoire même si elle est incroyablement naïve et prévisible hésitant entre misérabilisme, maltraitance et quelques bons et grands sentiments. Le réalisateur s'est-il identifié à ce personnage accablé qui souffre le martyre ? En tout cas, pas de doute, on reconnaît la patte Besson et ce n'est certes pas l'anthropomorphisme à outrance qui m'a le plus attirée ici.
Son héros ressemble à tous ceux que le réalisateur nous a présentés jusque là, il est seul comme un chien (lol), accumule les injustices et les humiliations et ne demande rien d'autre qu'un peu d'amour qui lui est refusé obstinément ce qui finit par le mettre en rage. Avant d'en arriver à une scène démente, où seul avec ses chiens il affronte une bande de rageux mexicains. Quant aux scènes où Doug, chancelant car il ne peut tenir que quelques instants sur ses jambes sinon sa moelle épinière risque de se répandre, interprète en play-back notamment une chanson, grimé en Edith Piaf, je n'ai encore pu décider si elles étaient le summum du ridicule ou de l'émotion. J'étais bouche bée néanmoins devant la prestation hallucinante, hallucinée de l'acteur américain qui articule un play-back parfait.
Car oui, ce film parfois bancal, bien réalisé mais manquant de rythme, à l'humour patapouf possède un atout colossal. Il s'appelle Caleb Landry Jones et le réalisateur, en le choisissant pour être Douglas lui consacre toute son attention. Aucun autre personnage (excepté le Doug enfant excellemment interprété par Lincoln Powell dont c'est le premier rôle) ne bénéficie d'une telle application. Tous les autres sont écrits à la hache et aucun ne présente le moindre intérêt, surtout pas les abrutis de mexicains et y compris la psy qui se met à pleurnicher à l'évocation de la sordide histoire de son patient (il faut arrêter avec ça, les psys n'ont pas de coeur et ne pleurnichent jamais devant la misère du monde qui pèse sur les épaules des patients et les mène dans leur cabinet : STOP !).
Par son interprétation puissante et habitée, Caleb Landry Jones donne toute son humanité poignante au personnage. L'acteur peut être tour à tour ou tout à la fois d'une beauté foudroyante et l'instant d'après d'une laideur repoussante. Sa performance subtile, troublante, perturbante et émouvante dérange et attire. On l'aime malgré soi et l'on comprend que le jury cannois se soit laissé troublé en 2021 en lui accordant le Prix d'interprétation pour Nitram (un autre monstre) de Justin Kurzel.
Je dirais que pour lui, pour cet acteur démentiel, il fau(drai)t voir ce film.
Commentaires
Je n'éprouve pas de sympathie particulière pour Luc Besson et je ne trouve pas que, quand il parle cinéma, il soit très intéressant. En revanche, une caméra en mains, c'est autre chose. C'est peut-être son meilleur film depuis "Le Cinquième Elément", en... 1997 ! Il y a une réelle tension, des enjeux, de beaux portraits et une foule de références cinématographiques.
Mais, en gros, je suis d'accord avec toi : il faut voir ce film principalement pour la performance de Caleb Landry Jones.
C'est sans doute aussi mon préféré depuis Le 5ème élément.
Je dois reconnaître que Besson a quand même recadré le débat car les gens ne lui parlait QUE des chiens c'était TRÈS pénible (je n'ai aucune attirance pour la gent canine (et encore moins féline)), en disant : et oh les gens ya un acteur génial dans ce film !
Je comprends que maîtriser 109 chiens doit être un défi quotidien mais cet antropomorphisme excessif m'a bien agacée.
Effectivement ce qu'il a raconté sur le cinéma n'était pas passionnant... 5 mn sur le fait qu'il fallait que les 2 acteurs aient la même couleur d'yeux.
A part Caleb, je n'ai vraiment vu aucun beau portrait.
Contrairement à d'autres spectateurs, j'aime bien le personnage de la psy. Je trouve que les drags sont filmées avec une belle empathie... et certains clébards sont (pour moi, qui préfère pourtant les chats) vraiment craquants !
Les chats et les chiens ne m'intéressent pas en règle générale.
La psy, je ne lui confierais pas mes tourments.
Et les drag queens je les ai trouvées comme souvent, filmées un peu comme des pleurnicheuses.
Même pour la performance de l'acteur je n'irai pas voir ce film. Le point de départ me hérisse déjà pas mal le poil.
Je ne t'imagine pas du tout regardant ce film :-)
J'espère que tu découvriras Caleb autrement. Il est grand et c'est un futur très grand.
Bonjour Pascale. Concernant la scène au cabaret pour moi c'était le summum de l'émotion. Tu as raison Caleb LJ est époustouflant.
Bonjour Dan. J'étais à la fois époustouflée par la performance, bouleversée par l'émotion et gênée... très étrange.
Caleb est magnifique.
Effectivement, un film poussif sans réelles idées, Besson pioche un peu partout, mais le film surnage grâce à un acteur épatant
Oui, effectivement il recycle plusieurs scènes qu'on a déjà vues chez lui.
Mais cet acteur !!! J'ai hâte de le voir ailleurs, j'espère que d'autres auront la même audace finalement que Besson de lui confier le premier rôle. Il est incroyable.