VINCENT DOIT MOURIR
de Stephan Castang ***
Avec Karim Leklou, Vimala Pons
Vincent est graphiste dans une agence de pub lyonnaise dirigée par son ex.
Un jour il apostrophe un peu bêtement un stagiaire ("et ben Hugo tu ne m'as pas apporté mon café ?") et l'on imagine que c'est pour cela que le stagiaire se précipite sur Vincent et le tabasse en plein visage avec son ordinateur portable. Le lendemain, un collègue avec qui il s'entend bien se jette sur Vincent et lui plante un stylo plusieurs fois dans la main (âmes sensibles, fermez les yeux). Plus tard alors qu'il est tranquillement assis dans un café, un SDF manifestement mal intentionné fonce sur Vincent. Il est arrêté dans sa course. Lorsque les enfants qui vivent dans le même immeuble et avec qui il entretient de très bonnes relations l'attaquent à leur tour, Vincent prend vraiment peur et comprend que c'est lorsqu'il croise le regard des autres, pas tous, de certains autres, que la violence se déchaîne. Il appelle ce phénomène "eye contact", rencontre un gars dans la même situation qui lui conseille de se déconnecter de tous les réseaux sociaux, de prendre un chien et d'aller se cacher. Vincent décide donc d'aller se mettre au vert et, cela tombe bien, son père possède une maison inoccupée à la campagne.
On peut dire que la première demi-heure est intrigante, anxiogène et efficace. On voit bien que le monde dans lequel vit Vincent ne tourne plus rond. Malgré ses deux agressions sur son lieu de travail, la direction laisse faire et aucune sanction n'est prise à l'encontre des agresseurs. Les flics proposent à Vincent de serrer la main à son collègue qui pleure devant l'incompréhension de son geste. Comme le dit le réalisateur, son film ne décrit pas une situation post apocalyptique comme c'est souvent le cas mais pré apocalyptique. Pas de virus en vue mais la propagation d'une violence inexplicable qui touche même les enfants et culminera lors d'une scène démente sur une route où les conducteurs sortent de leurs véhicules pour s'entre tabasser. Hommes, femmes, enfants, tout le monde y passe.
Le réalisateur dont c'est le premier film frappe fort avec cette vision terrifiante d'un monde où le pire cauchemar consiste à se regarder dans les yeux. Malgré les références aux films de zombies (la scène du supermarché très flippante) l'histoire reste ancrée dans un réalisme quotidien. La rencontre avec Margaux, jeune femme un peu marginale, amorce un virage vers la romcom mais encore une fois elle ne peut être ordinaire car... je ne dis rien. Mais est-ce que l'amour peut survivre alors que le pire risque est de se regarder ? La violence ici est totalement gratuite, inexplicable et inexpliquée. Si on peine à comprendre pourquoi Vincent et Margaux restent ensemble malgré la menace qui pèse sur leur couple, on embarque quand même avec eux. Ils ont atteint un point de non retour où leur seule force reste leur union improbable. Ici les qualités, l'originalité dépassent les faiblesses ou les défauts (le petit quart d'heure de trop) et en l'absence du moindre effet spécial, c'est très fort de réussir une dystopie dont la seule issue serait l'amour.
Après les très réussis Acide et Le règne animal, le cinéma français n'a définitivement pas à rougir de son entrée dans le cinéma de genre (survivaliste, apocalyptique).
Le doux Karim Leklou laisse peu à peu et contre son gré se déchaîner la violence en lui qu'il ne soupçonnait pas. Son regard inquiet, incrédule, terrifié comme toujours fait des miracles et il est comme d'habitude excellent.
Commentaires
Le genre de sujet qui doit faire peur du début à la fin. Je ne sais pas si j'ai envie de le voir.
Oui cela fait peur.
Je dirais que ce film n'est pas pour toi :-)
Déjà... le titre est très engageant... :-)
Le titre devrait te faire peur :-)
Et tu as vu, les initiales du titre donnent VDM (vie de merde).
Ah, çuilà aussi je voudrais bien le voir !
Il faut aller au cinéma.
Beaucoup aimer, surtout la première partie parce qu'ensuite le film vire vers un genre trop balisé du film de pandémie assez classique.
Oui la première partie est très réussie.
Petit coup de coeur pour Vincent doit Mourir.
J'ai passé un super moment et je trouve que le film tient ses promesses, avec un postulat à la Sadness en moins dégueu quand même, plus frenchie. Karim Leklou est parfaitement crédible, je l'ai adoré ! Vimala Pons s'en sort super bien aussi. Bref, il mérite plus de succès !
Je ne connais pas Sadness.
Karim Leklou est toujours incroyable.
Vimala Pons a déjà été plus déjantée. Je la trouve un peu en dessous de ce qu'elle est capable de faire.
En tout cas, ce film est vraiment une réussite.