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LE MOINE ET LE FUSIL

de Pawo Choyning Dorji ***(*)

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Avec Tandin Wangchuk, Kelsang Choejay, Deki Lhamo, Harry Heinhorn

Ura est un petit village bhoutanais qui fait partie d'un ensemble de dix villages pour une population totale de 2 288 habitants. Le lama de la région demande à un moine de lui rapporter un fusil sans plus d'explication.

La démarche est inattendue mais le moine ne met pas en doute les intentions du Lama pourtant réputé pacifiste. Il se met en route pour sa mission. Pourquoi cette éminence a-t-elle besoin d'un fusil ? Nous le comprendrons à la toute fin du film après avoir suivi le périple du garçon.

Après le merveilleux L'école du bout du monde qui m'avait transportée bien loin, je n'ai pas hésité un instant à suivre à nouveau ce réalisateur passionnant qui parle comme personne de son pays (même s'il est d'origine indo japonaise). Il ne m'a pas déçue.

Mais au fait, où se trouve le Bhoutan, petit bout de terre de 38 394 m² et de 782 318 habitants (à titre de comparaison la France c'est 672 051 km² pour 68 373 433 habitants) coincé entre la Chine et l'Inde ? Le Bhoutan se trouve ici :

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Et pour info, ce pays a pour indice le BNB ou Bonheur intérieur brut (chez nous c'est le PIB : produit intérieur brut) permettant de guider l'établissement de plans économiques et de développement pour le pays tout en respectant les valeurs spirituelles bouddhistes. C'est dire si ces habitants sont loin de nos préoccupations terre à terre.

En 2009, le jeune roi du Bhoutan abdique et offre la possibilité à son peuple de s'ouvrir à la démocratie en les invitant à voter. Parallèlement le pays s'ouvre également à internet et certaines familles plus favorisées ont même la télé. Mais les bhoutanais ruraux n'ont pas la moindre idée de ce qu'est voter. Une jeune femme de la ville parcourt le pays pour leur apprendre à voter lors d'une journée d'élection blanche. Ils auront trois choix : le rouge pour la liberté et l’égalité, le bleu pour le développement industriel et le jaune pour  la protection de l’environnement. Lors de faux meetings politiques, les paysans sont invités à se diviser en groupes opposés et à monter de l'hostilité les uns envers les autres. Une vieille dame lance :  "Pourquoi nous apprenez-vous à être impolis ? On n’est pas comme ça !" Des oppositions et des difficultés apparaissent au sein des familles qui ne comprennent rien à ces changements et affirment qu'ils ont toujours été heureux avant ces élections.

Dans le même temps, nous suivons le périple du moine en quête de son fusil qu'il finit par trouver, mais l'arme fait l'objet d'une âpre et surréaliste négociation entre son possesseur (un brave homme qui n'a pas la moindre notion de la valeur de l'objet et de l'argent) et un collectionneur qui n'aurait peut-être pas des intentions aussi louables qu'il l'affirme.

Le suspens n'est pas insoutenable mais le chassé-croisé des différents protagonistes qui se croisent parfois à l'image sans même le savoir alors que le spectateur les voit est habilement mené.

Dans une belle utopie d'une ambition irréaliste et démesurée, le réalisateur clôt son film sur l'espoir d'un humanisme et d'une humanité qui réchauffent le coeur (provisoirement) et démontre sans donner de leçon qu'il n'est peut-être pas indispensable de vouloir imposer des changements radicaux et le mode de vie occidental à des peuples heureux qui vivent quasiment sur le toit du monde. Le choc des cultures est saisissant, déjà très net entre la capitale et la campagne et offre un voyage doucement dépaysant que je ne peux que recommander. L'humour que parsème le réalisateur avec des posters de Daniel 007 Craig qui remplacent ou côtoient la photo du roi bienaimé est délicieux. Les acteurs pour la plupart non professionnels, les rites d'un autre monde, les paysages qui invitent à ralentir... tout dans ce film engage à se poser, à contempler, à méditer.

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