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JACARANDA (roman)

de Gaël Faye *****

JACARANDA, GAEL FAYE, ROMAN

Il y a huit ans l'auteur-compositeur-rapeur-interprète Gaël Faye évoquait dans un premier roman semi autobiographique son enfance dans son pays de naissance le Burundi, voisin du Rwanda, puis son douloureux exil en France.

On y suivait l'enfance insouciante de Gabriel, brusquement interrompue par le génocide des Tutsi. Le héros, un garçon de 11 ans lui ressemblait comme un frère. Ce roman phénomène (pas moins de 13 prix littéraires dont le Goncourt des Lycéens, Le Prix du Premier roman français...) et déchirant était bientôt suivi d'un film tout aussi terrible et poignant : Petit pays

Aujourd'hui l'auteur revient avec une seconde évocation du génocide au travers de l'histoire de Milan né en France d'un père français et d'une mère rwandaise qui refuse obstinément d'évoquer son passé, sa famille, son pays qu'elle a fui. C'est tardivement, contraint et forcé que Milan découvre ce pays dont il ignore tout et dont la première impression est celle d'un petit versaillais choqué, écoeuré par la saleté et les odeurs. Sur place délaissé par sa mère, c'est par lui-même qu'il va faire connaissance de ce pays martyr et de ses habitants pour qui le mot résilience a dû être inventé, contraints de tenter de vivre avec un passé traumatisant, de cohabiter sans doute avec leurs bourreaux et de supporter le poids de la culpabilité des survivants.

Didactique sans être scolaire ou ennuyeux, objectif et factuel sans jamais tomber dans le voyeurisme ou le misérabilisme, Gaël Faye n'élude rien. Il nous prend par la main mais avec à la fois douceur et fermeté, nous oblige à ouvrir les yeux, nos oreilles et notre coeur. Comment cette abomination a-t-elle pu avoir lieu ? On découvre que la persécution des Tutsi ne date pas d'aujourd'hui, que l'histoire du Rwanda est jalonnée de conflits, d'injustices et de massacres. D'exil aussi. Gaël Faye nous raconte ce pays, cette tragédie avec pédagogie mais en réussissant une admirable fiction habitée par des personnages magnifiques que l'on voudrait serrer dans les bras : un bébé aux yeux clairs, une petite fille, une mémé de 115 ans, une maman qui ne parvient jamais à s'ouvrir à son fils, répondre à ses questions et des jeunes gens parfois blessés jusque dans leur chair qui grandissent pendant 30 ans et que l'on suit en tournant chaque page avec boulimie pour ne pas les quitter un instant. Souffrir avec eux, pleurer avec eux avec stupeur et une tristesse qui dure après que la dernière page soit refermée. Après que les dernières pages parfois insoutenables mais nécessaires évoquant selon le témoignage des survivants le cauchemar ne s'impriment durablement...

A l'ombre et au sommet d'un jacaranda magique au destin bouleversant qui fait tomber sa neige de fleurs mauve, on parcourt avec Milan 30 années et plus de l'histoire d'un pays et d'un garçon qui a dans les veines l'"odeur d'humus et de terre mouillée" de Kigali, de Burare et les rivages sublimes du lac Kivu.

J'ai imaginé cette grande tige de Gaël Faye penché sur sa feuille blanche ou devant son ordinateur déverser ce flot de mots, de phrases, de sentiments et de sensations, se libérer du poids de la douleur, les partager avec nous pour s'en libérer peut-être un peu. Et c'était beau.

J'ai lu, englouti, avalé ce roman bouleversant en une fois comme cela m'arrive rarement, les yeux encore humides en l'évoquant.

Petit pays (le livre) m'avait déjà chavirée. Cette fois je suis convaincue d'avoir découvert un grand auteur.

Dans un style simple, chaleureux, profond, d'une folle élégance Gaël Faye m'a foudroyée avec des phrases que je relisais plusieurs fois tant leur beauté me comblaient et dont l'une de mes préférées est sans doute : 

"La nuit s'enfonce vers le lendemain".

Nécessaire et BOULEVERSANT.

Ecoutez, regardez Gaël Faye évoquer son petit pays.

Et admirez un jacaranda en fleurs.

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Commentaires

  • Ça ressemblerait bien à un coup de cœur littéraire, cette histoire-là. Je me le note. Petit Pays m'avait bien plu également... Je ne connaissais pas la jacaranda, mais c'est magnifique ce bleu qui se noie dans le ciel...

  • En effet c'en est un.
    Un vrai de vrai. Comme il ne m'en arrive qu'un ou deux par an (l'autre était La trilogie de Copenhague).
    Ma nuit fut courte :-)
    Gaël Faye dépasse le niveau de Petit pays. Le style est admirable.

  • Bonjour,
    Un bien beau billet sur une lecture que tu as aimée. Le livre et sa magnifique couverture m'ont attiré et j'ai encore Petit Pays dans ma bibliothèque à découvrir.
    Cet auteur est si "riche" de ses douleurs...
    Bisous et merci

  • Bonsoir.
    Il est habité par cette tragédie.
    Je t'encourage vivement à lire les deux. Ils peuvent se lire indépendamment. Commence par le Jacaranda qui est admirable.

  • Tu n'as pas perdu de temps ! Gaël Faye je l'ai seulement vu en concert et je l'ai trouvé formidable. Je vais lire son roman, c'est sûr.

  • Non, je l'ai dévoré dès le jour de sortie.
    Je rêve de le voir en concert. Je l'ai loupé l'année dernière quand il est passé chez moi. Avertie trop tard... complet ! Je l'écoute énormément.
    Tu n'as pas lu non plus Petit pays ? Je tiens ce Jacaranda pour un GRAND roman.

  • Si tu avais beaucoup aimé Petit pays, cède à la tentation. Celui-ci est encore meilleur. L'écriture est vraiment impressionnante de simplicité et l'élégance et le livre encore plus bouleversant.

  • Rebonjour Pascale, j'essaierai de le lire un de ces jours. Merci du conseil. Je n'ai pas lu Petit Payx. J'ai vu des jacarandas en Amérique du sud à Buenos Aires pour la première fois (il y a 25 ans) et puis en Sicile il y a deux ans. Mais ils n'étaient pas aussi beaux que celui de la photo. Bonne journée.

  • Je suis surprise que des lectrices telles que Aifelle et toi n'aient pas lu Petit pays.
    Et ce Jacaranda m'a bouleversée.
    L'arbre est sublime.

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