MERCATO - LA FABRIQUE DU MENSONGE - DIS-MOI JUSTE QUE TU M'AIMES
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Quelques mots sur ces trois films.
MERCATO de Tristan Séguéla ***(*)
Si l'on m'avait dit qu'un jour je m'emballerais pour un film qui parle de foot... vous connaissez la suite : je ne l'aurais pas cru. C'est pourtant le cas et j'ai été happée par ce film haletant de la première à la dernière image même s'il confirme que c'est clairement un milieu qu'on n'a pas envie de fréquenter, qui peut d'ailleurs s'avérer dangereux. Même s'il enchaîne les clichés, confirme un peu les fantasmes (joueurs bling-bling millionnaires, bimbos à leur bras, agents pourris) et que les sommes en jeu pour vendre ou acheter un joueur à une équipe dépassent l'entendement, atteignent des montants vertigineux allant jusqu'au milliard d'euros, j'ai trouvé que c'était fait avec énormément d'habilité et qu'aussi bien du côté des joueurs que de l'agent sous les manoeuvres et tractations la passion du sport restait intacte.
Driss est un personnage ambigu. Il aime son métier et le sport qu'il représente passionnément. Il a délaissé son fils, un garçon de 15 ans vegan, écologiquement responsable qui lit 1984 d'Orwell, à l'opposé donc des préoccupations de son père. Les scènes entre Jamel et le merveilleux Milo Machado-Garner (vu dans En attendant Bojangles, Anatomie d'une chute) sont très réussies. Par ailleurs Driss est également un découvreur de talents et s'intéresse à un tout jeune garçon de 12 ans très prometteur sur le terrain. Il est prêt à tout et à "vendre" cet enfant parisien à un club étranger sans écouter les arguments de l'enfant. Cette transaction l'aiderait à éponger sa dette et fait parfois perdre à Driss une part de son humanité, tout comme son attitude avec son ami Vincent (Vincent Rottiers) qu'il utilise et exploite. Bref, Driss n'est pas un ange et il ne s'embarrasse pas toujours de décence (exemple la scène au cimetière). L'interprétation de Jamel Debbouze ne cherche jamais à nous le rendre sympathique. Il est très étonnant, toujours en mouvement, accroché à son téléphone à baratiner, mentir, mettre la pression. Subitement il se fait sincère et touchant lorsqu'il évoque sa passion pour son métier qui lui a fait perdre beaucoup dans sa vie privée et son amour pour son fils.
J'ai vraiment aimé cette alternance de moments entre cynisme, passion et émotion. Pour les allergiques au ballon rond, il n'y a que deux petites scènes sur le terrain, c'est supportable. C'est clairement dans les coulisses que tout se joue ici. Evidemment on peut se demander comment ce type qui n'a plus un sou fait pour prendre autant de trains et d'avions au point de se retrouver jusque dans des palais en Arabie-Saoudite (pas ouf le bilan carbone) mais on reste au cinéma et le rythme du film ne faiblit pas. J'ai été embarquée, très impressionnée par l'interprétation de Jamel toujours aussi nerveux et presque quinqua (et de Milo vraiment incroyable). Mon attention n'a pas faibli un instant, je me suis prise au jeu, le suspense est captivant (même si je doutais peu de l'issue). L'ouverture sur le Requiem de Mozart dans les fonds marins est intrigante mais trouve son explication en cours de film, à deux reprises.
Au crédit du film encore, une scène drôle et surprenante où l'influenceuse trophée au bras d'un grand footballeur met tout le monde KO par son analyse d'une certaine situation (la tête de Jamel à ce moment : lol)...
C'est très chouette et redoutablement efficace.
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LA FABRIQUE DU MENSONGE de Joachim Lang ***
Avec Robert Stadlober, Fritz Karl, Franziska Weisz
Synopsis : A l’aube de la Seconde Guerre mondiale, Joseph Goebbels est devenu l’éminence grise d'Hitler. Convaincu que la domination du Reich passe par des méthodes de manipulation radicalement nouvelles, le ministre de la Propagande contrôle les médias et électrise les foules. Au point de transformer les défaites en victoires et le mensonge en vérité. Avec le plein soutien du Führer, Goebbels va bâtir la plus sophistiquée des illusions, quitte à précipiter les peuples vers l'abîme.
Une fois encore le titre français trahit la volonté du réalisateur qui tente de répondre à cette question : "pourquoi la majorité des Allemands ont-ils suivi Hitler dans la guerre et l’Holocauste, et comment les responsables ont-ils pu commettre des crimes aussi inimaginables contre des millions de victimes innocentes ?" Le titre original est Führer (chef) und Verführer (séducteur) et le réalisateur s'est penché pendant de nombreuses années sur tous les documents disponibles pour que son film soit le plus crédible possible. Les dialogues sont donc tirés de citations et entretiens d'origine vérifiés. L'insertion de documents d'époque est habilement montée. Et le discours hystérique (qui a provoqué l'hystérie du public présent) de Goebbels exhorte l'Allemagne ainsi : "maintenant, Peuple, lève-toi ! Tempête, déchaîne-toi !" est saisissant de vérité puisqu'il s'appuie sur une véritable captation d'époque.
Aucune image d'holocauste ou de guerre ici, c'est juste la machine propagandiste en marche de Goebbels qui est à l'oeuvre. Manipulateur de foule par ses discours, ses mensonges, ses films qui exaltent les valeurs allemandes, Goebbels rendrait presqu'Hitler doux, presqu'en retrait des décisions (c'est la faiblesse du film car on a du mal à croire qu'Hitler se soit laissé manipuler) tant son ambitieuse et délirante obsession semblait inarrêtable. Le quotidien de Goebbels est quelque peu bousculé par sa femme Magda, la femme et la mère parfaites selon Hitler, qui me semble toujours de film en film plus nazie que le führer. Le sort des six enfants de ces deux tarés brisent toujours le coeur.
L'acteur Robert Stadlober est un Goebbels convaincant, totalement furieux, terrifiant.
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DIS-MOI JUSTE QUE TU M'AIMES d'Anne Le Ny ***
Avec Elodie Bouchez, Omar Sy, José Garcia, Vanessa Paradis
Après quinze ans de mariage, le couple de Julien et Marie s'essouffle un peu. Marie a toujours été celle qui aimait le plus et lorsqu'Anaëlle, le grand amour de jeunesse de son mari revient s'installer à Vannes, elle panique. Perdue dans une spirale infernale de jalousie et d’autodépréciation, Marie se laisse séduire par Thomas, son nouveau supérieur hiérarchique. Lorsque ce dernier comprend que Marie va mettre fin à leur liaison, il montre son vrai visage.
On sait rapidement qui est le vilain de l'histoire. Manipulateur et inquiétant, José Garcia parvient néanmoins à mettre de la nuance dans son personnage de pervers narcissique (pour une fois il s'agit vraiment d'un pervers narcissique). Son attirance pour Marie qu'il qualifie trop rapidement d'amour n'est pas feinte. Par contre il ne parvient pas à admettre que ses sentiments ne soient pas partagés. Persuadé qu'il est ce qu'il y a de mieux pour Marie qui est au départ touchée de toute l'attention qu'il lui manifeste, il ne conçoit pas qu'elle ne quitte pas cette vie, ce mari, cette maison, cette famille qu'il considère minables.
La mécanique de l'emprise, de la manipulation puis de l'intimidation se met en marche et n'est vraiment pas mal menée. D'autant que les acteurs forment un casting très réussi. Autour de José Garcia parfait, Elodie Bouchez est fragile (quoiqu'un peu naïve), Omar Sy quasi méconnaissable en mari compréhensif et amoureux hésitant et Vanessa Paradis a la séduction immédiate.
La résolution est un peu expéditive mais l'ensemble est suffisamment asphyxiant pour qu'on tremble.
Commentaires
Pour l'instant, je n'ai vu que "Mercato" et ce fut une bonne surprise. Cela fait longtemps qu'on sait que Jamel Debbouze a une palette de jeu assez étendue, pour peu qu'il veuille bien laisser au vestiaire son costume de trublion. Je l'ai trouvé ici vraiment très bon et entouré d'une pléiade de seconds rôles efficaces. Il y a de belles trognes (et de jolis petits culs) à l'écran, un peu comme dans les films de gangsters de jadis
Vraiment bien foutu ce film avec un Jamel vraiment excellent.
J'ai dû chercher les "jolis petits culs", je suppose qu'il s'agit du clip rap.
Autrement dit les trois sont regardables. Le football très peu pour moi mais j'ai compris que ce n'était pas un obstacle. Et je suis assez curieuse de voir Jamel autrement.
Jamel, c'est le meilleur des 3. Il est vraiment étonnant et très bien. Et le film est une course folle, pas le temps de souffler.