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YOKAI - LE MONDE DES ESPRITS

d'Eric Khoo ***

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Avec Catherine Deneuve, Yutaka Takenouchi, Masaaki Sakai, Jun Fubuki

Claire Emery chanteuse française est accueillie au Japon pour un concert. Elle est une star adulée dans ce pays.

Yuzo, vieux monsieur solitaire fan de la star et très porté sur le saké s'écroule chez lui un verre à la main en écoutant un vinyle (qui crachouille à peine) de Claire. Après son concert, Claire signe (agacée) quelques autographes et s'écroule à son tour dans un bar après avoir englouti une bouteille de saké à la stupeur du barman. Le fan et la star se rencontrent et entreprennent un voyage pour tenter de consoler Hayato, le fils de Yuzo, dessinateur d'animés en panne d'inspiration (Yutaka Takenouchi, très bon et très beau (mais qui mange comme un porc)). Il s'est lui aussi écroulé complètement ivre (mais pas mort) après un x-ème verre de whisky (où ne va pas se loger la génétique).

J'ai d'abord pensé ne pas (vous) parler de ce film. Et oui, je ne parle pas de TOUS les films que je vois, je trie (à quoi bon parler d'un navet tel que Bridget Jones 4ème du nom par exemple) et je trouve que je passe énormément de temps à écrire. Bref. Je me demandais aussi à quoi bon parler d'un film que nous serons trois à avoir vu. Et finalement, vous le savez (ou pas), les fantômes, le Japon, Catherine Deneuve, les japonais et moi : toute une histoire. Et aussi, ce film, curieusement, malgré sa relative insignifiance, est toujours bien présent dans ma tête, dans mon esprit, quelques jours après l'avoir vu. Il est certes modeste quoique très beau mais loin d'être inconsistant. Pas si volatile que cela au fond.

Une de ses originalités, contrairement à de nombreux films de fantômes, consiste à ne pas se placer du côté des vivants mais de celui des spectres. Ils sont dans un premier temps tout surpris mais rapidement ravis de pouvoir communiquer entre pairs. Par contre, ils ne peuvent voyager (même s'ils circulent ici facilement en voiture). Alors, se dit Claire, mourir seule au Japon et y rester, pourquoi pas, "ce n'est pas si mal après tout". Surtout en si bonne compagnie.

Autre caractéristique propre à cet au-delà, les fantômes se parlent dans leur langue maternelle respective et se comprennent parfaitement. C'est merveilleux.

Au final, Yokai - le monde des esprits est un film où la douleur accompagne les personnages mais sans les accabler. Qui n'a pas de morts à pleurer ? Ce film peut être (provisoirement) consolatoire. La mort y est douce, sans souffrance, sans douleur, sans agonie. Et ceux qui restent, après avoir pleuré, avoir été tentés de mettre un terme à la traversée de cette vallée de larmes n'ont plus qu'à écouter les mots ou les chansons que les esprits leur murmurent, ressentir les étreintes réconfortantes de ceux qu'ils ont aimés et qui les ont aimés. C'est simple comme un obon (お盆) événement bouddhiste annuel au cours duquel les esprits reviennent temporairement dans ce monde afin de rendre visite à leurs proches (le rêve). Il a lieu, ainsi que Bouddha l'a demandé, le 15ème jour du 7ème mois (c'est donc le 15 juillet pour ceux qui n'ont pas envie de compter). L'évènement au fil du temps est devenu, au-delà du rite religieux, une fête nationale.

Quant au yokai du titre (妖怪) il signifie apparition étrange, spectre ou monstre. Tout ce qui se rapporte à des phénomènes étranges qui dépassent la compréhension humaine.

Le réalisateur (il est singapourien et vous le connaissez si vous avez vu La saveur des ramen) décide doucement d'apporter l'apaisement aux morts et aux vivants. Il choisit la reine Catherine pour incarner cette femme vieillissante, star dans et hors du film et de nous la montrer parfaitement tranquille, plus préoccupée à atténuer le chagrin des vivants qu'à se lamenter sur sa propre mort. Pour l'accompagner, un vieux monsieur qui a offert une dernière volonté à son fils plein de chagrin et hanté par les zones d'ombre de son passé. Dans son périple au volant d'une vieille guimbarde, Hayato doit rendre la planche de surf à sa mère qui l'a abandonné (Jun Fubuki déjà mère de la merveilleuse Famille Asada). En réalité, un prétexte pour que le fils et la mère se retrouvent et pour que Claire lui susurre à l'oreille de vivre encore.

La voix vaguement brisée de Catherine Deneuve, l'immortelle, interprète très joliment trois jolies chansons écrites par Jeanne Cherhal, réconcilie les familles, parle à sa fille et laisse les embruns chahuter son iconique chevelure tandis qu'elle regarde l'horizon, imperturbable, mélancolique, les mains dans les poches. C'est peut-être le seul film dans lequel elle meurt, mais pas vraiment finalement. Son détachement est élégant et le Japon du bord de mer idéal pour accompagner cette flânerie où Deneuve généreuse, empathique, compatissante avec ses éternelles cigarettes extra-longues et ses verres de saké semble nous dire (je me trompe peut-être) : regardez-moi, je vieillis, je vais mourir et je m'en fiche !

Commentaires

  • Critique en demi-teinte peut-être, mais elle me convainc d'aller le voir (alors, on sera quatre?).

  • Tu la trouves en demi-teinte ?
    Quatre c'est bien :-)

  • L'histoire est assez tentante, mais je ne suis pas encore complètement convaincue. Et comme j'ai beaucoup de retard ... je le rattraperai à la télé.

  • Un film qu'il convient de voir parfaitement éveillé :-)

  • Ouais, ça a l'air intéressant, mais j'vais pas avoir le temps au milieu de tout le reste. Tant pis. Partie remise, peut-être. Il est possible que la Deneuve envoie un message à son public. Mais je trouve souvent qu'elle s'en fiche, justement, et pas toujours pour les meilleures raisons.

    Bref. J'ai vu "La saveur des ramens". On y parlait aussi de la mémoire, si je me souviens bien.

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