3 h 10 to Yuma de James Mangold ***
Dan Evans, fermier poissard du Grand Ouest a perdu une jambe au cours de la guerre de Sécession, la sécheresse rend l’exploitation de son ranch de plus en plus difficile, la Compagnie des Chemins de Fer cherche à l’exproprier, et devant cette accumulation de poisse, il a perdu le soutien et l’estime de sa femme et de son fils aîné. Pour tenter de faire face aux dettes et se refaire une aura auprès des siens, Dan va rejoindre l’escorte qui accompagne le bandit Ben Wade, vers une ville qui répond au doux nom de Contention et le mettre dans le train de 3 h 10 pour Yuma où il sera jugé.
Alors moi je dis, merci, merci et re encore à James Mangold pour ce western westernisant qui commence « comme un rêve d’enfant, qu’on croit que c’est dimanche et que c’est le printemps »… Ooopsss, scusez, tout le monde sait maintenant qu’un western pour moi c’est une madeleine et que si votre enfance cinéphile a débuté par des Walt Dysneiseries, moi c’est dans le West Ern que j’ai passé la plupart de mes dimanches. Chez d’autres, ça aurait peut-être sûrement provoqué un dégoût ou un rejet… Bref, j’arrête de gagatiser, « on » m’a dit récemment au réveil que mes notes devenaient trop longues...
De quoi ça cause ?
Vous savez bien comment ça se passe dans ces cas là ? Il faut pas moins de deux jours et deux nuits de route à dos de bourrin pour rejoindre la gare de Yuma (si vous partez de Beesbee ‘f course), elle est semée d’embûches, d’imprévus et de retournements de situation (c’est pas toujours le même qui est du bon côté du flingue), quand il n’y a pas la cavalerie et les apaches qui s’en mêlent. Ici, tout y est ! Pour un bon, grand, beau western bien réussi tout comme il faut, il y a des ingrédients, comme une recette à respecter et ici, il me semble qu’il n’en manque pas un. Vous ne trouverez pas de cow-boy dépressif, de mythe ou d’ambiance crépusculaire, de far west contemplatif, non c’est du bon gros vieux western classique, impeccable et dépaysant tout bien comme il faut.
A quoi reconnaît-on un beau western comme celui-ci ?
L’action d’un western se situe en Arizona ou dans n’importe quel Etat ravitaillé par les corbeaux dans lequel vous pouvez chevaucher pendant des jours sans rencontrer une plume d’indien. On sent toujours comme une base historique derrière l’histoire des personnages de fiction. La guerre de Sécession n’est pas loin et parfois il faut encore choisir son camp : Yankee ou Sudiste !
Le manichéisme est une constante. Il y a des bons et des méchants fortement marqués, à la limite même de la caricature et on voit tout de suite qui est qui. Ici, le gentil c’est Dan le fermier (Christian Bale magnifiquement blessé) et le méchant c’est Wade le bandit (Russel Crowe qui Russel Crowise à merveille). L’un des deux sera héroïque, forcément, mais ici, la profondeur psychologique des deux personnages donnera lieu à des échanges verbaux plus ou moins captivants. Quand les cow-boys ne sont pas que des bourrins sans état d’âme, c’est un plus non négligeable. Evidemment lorsqu’on met en présence deux grands fauves comme ici, à un moment ou à un autre arrive l’inévitable lutte virile « c’est qui qu’a la plus grosse ! », surtout si une jolie fille fluette aux yeux verts passe dans le coin ! Ils sont virilement drôles les cow-boys.
Le western développe un racisme omniprésent (même si certains se sont employés à démontrer le génocide dont les indiens ont été victimes). Ce film n’échappe pas à la règle et c’est en général de la bouche d’une brute épaisse sans foi ni loi qu’on entend que les indiens sont cruels et stupides, les noirs de bons nègres laborieux et les bridés des feignants. Le cow-boy ne doute jamais de sa blanche suprématie.
En outre, dans ce « 3 h 10 pour Yuma », puisque rien n’y manque, on assiste à l’incendie d’une grange avec sauvetage des chevaux à l’intérieur, braquage de diligence, passage dangereux infesté d’indiens, descente dans une mine d’or, arrêt « repos du guerrier » au saloon où une accorte serveuse n’a froid ni aux yeux ni ailleurs, exécutions sommaires, nuit tendue entre hommes au coin du feu de camp, chevauchée périlleuse dans des paysages sublimes et désertiques… et discussions philosophico-psychologiques entre les deux héros que tout oppose mais pas tant que ça finalement, avec le « méchant » charismatique et le « gentil » qui refuse de sympathiser ! Ajoutez à cela une musique toute guitare et trompette (mais là, il manque vraiment Ennio Moricone) qui appuie les moments forts et vous aurez de quoi passer deux heures vraiment formidables, enthousiasmantes pour ce film qui ressemble comme deux gouttes d’eau à un classique, avec deux acteurs convaincants et convaincus.
Petit bémol pour la fin qui ne va tout au bout du bout de l’affirmation de Russel/Wade qui affirme qu’il est un vrai méchant… dommage !