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L'HOMME QUI RIT de Jean-Pierre Améris ****
FILM DE CLÔTURE DE LA MOSTRA DEL CINEMA - VENISE 2012
Ne vous réjouissez pas trop vite, je continue encore de me gondoler quelque temps et ne suis d'ailleurs pas pressée de rentrer.
Mais je tiens néanmoins à vous dire quelques mots à propos de ce film qui me tient particulièrement à coeur et que j'ai donc vu samedi en clôture de la Mostra de Venise. Il est évident que je vous en reparlerai jusqu'à plus soif au moment de sa sortie nationale le 26 décembre prochain.
Le film est inspiré de l'oeuvre dense, complexe, passionnante et intimidante de Victor Hugo. Une histoire terrible et incroyable. Celle de deux enfants. L'un Gwynplaine défiguré dès son plus jeune âge par une cicatrice qui donne à son visage un sourire permanent, victime des comprachicos qui a l'époque enlevaient ou achetaient les enfants, les mutilaient pour les exposer comme des monstres. L'autre Déa, une fillette aveugle que Gwynplaine a sauvée de la mort une nuit de tempête. Les deux enfants abandonnés, orphelins sont recueillis pas Ursus, un saltimbanque, philosophe et guérisseur. Sous des dehors rugueux et misanthrophe le vieil homme dissimule des trésors de tendresse et de bonté. Incidemment, il découvre que le visage du garçon provoque l'hilarité et c'est ainsi que le spectacle de "L'homme qui rit" voit le jour. La petite troupe sillonne alors avec bonheur les routes d'Angleterre. Gwynplaine et Dea s'aiment et deviennent inséparables, sous l'oeil bienveillant et inquiet d'Ursus qui sait que pour vivre heureux il est préférable de vivre cachés. Les foules se pressent pour découvrir Gwynplaine, lui assurent une célébrité sans cesse croissante jusqu'à arriver aux oreilles de la Cour...
D'emblée il faut écarter l'idée de l'adaptation à la lettre d'une oeuvre littéraire grandiose et colossale. Il s'agit ici de la vision d'un réalisateur à propos d'une histoire qui le hante depuis ses quinze ans. L'histoire de deux adolescences meurtries par la différence. Alors que le handicap de Dea aveugle semble vécu sereinement, Gwynplaine souffre de son apparence. Comment en étant à ce point différent, monstrueux, trouver sa place dans ce monde et être heureux ? Rien que l'idée d'évoquer cette douleur, celle de ne jamais se sentir à sa place suffit à me bouleverser. Et le film l'est, bouleversant, par la grâce de cette vision personnelle qui transforme l'oeuvre, sans jamais la trahir, en un conte horrifique, terrifiant sans pour autant négliger un humour apaisant alors que le drame pèse inéluctablement. Et par celle d'acteurs véritablement habités par la beauté et la puissance de leurs personnages. Chacun semble avoir compris que "La vie n'est qu'une longue perte de tout ce qu'on aime". Malgré cette menace qui les nargue, Gwynplaine s'abandonne un temps à l'illusion d'être accepté sans masque, malgré sa différence et à celle encore plus folle de changer le monde puisqu'il obtient soudainement le pouvoir de siéger au Parlement. Sa diatribe face à la Reine et aux parlementaires : "Ce qu'on m'a fait, on l'a fait au genre humain", puissante, bouleversante vire à la farce. Des bouffons ridicules le remettent à sa place, trop tard.
Dans un décor de carton pâte assumé, revendiqué, Jean-Pierre Améris ne cherche pas la réconstitution historique. On ne verra donc pas de "carrosses rouler devant des châteaux du XVIIIème siècle". On restera plutôt concentrés sur les personnages principaux et leurs visages, même si l'ambiance "timburtonnienne" évoque Edward aux Mains d'Argent et la mer synthétique celle admirable du Casanova de Fellini. Mais qu'on ne s'y trompe pas, le sublime, génial, inoubliable Joker composé par Heath Ledger s'inspire totalement de l'Homme qui rit de Victor Hugo (et non l'inverse). Il n'y a donc rien de paradoxal à ce que le "masque" de Gwynplaine l'évoque de façon aussi troublante. Mais alors que le Joker blessé aussi au plus profond de sa chair n'aspire qu'au mal, Gwynplaine est d'abord un jeune héros courageux qui a sauvé une fillette, puis un homme honnête qui rêve de justice et d'amour. Marc-André Grondin incarne avec une belle présence inquiète et naïve cet être meurtri, aimé au-delà de ce qu'il espère et totalement ébloui par cet amour.
Emmanuelle Seigner belle et cruelle Duchesse se servira un temps de Gwynplaine pour surmonter un ennui abyssal et l'utilisera comme une distraction. Elle verra en lui le véritable miroir de son âme noire. "Ce que tu es dehors, je le suis dedans". Et l'actrice offre à son personnage une intensité et une fêlure touchantes qui évoquent la Madame de Merteuil des Liaisons Dangereuses.
Dea est la jeune fille pure qui aime et protège Gwynplaine, parfois malgré lui. Elle connaît l'essentiel invisible pour les yeux. Elle ne peut comprendre que Gwynplaine craigne qu'elle ne l'aime plus si elle venait à découvrir sa laideur. "Comment peux-tu être laid puisque tu me fais du bien ?". Christa Théret, une nouvelle fois surprenante incarne avec une grâce magnifique cet ange aveugle, simple et vertueux. Elle est d'une expressivité réellement impressionnante empruntée aux grandes actrices du muet. Et ici comme une réincarnation, jusque dans ses gestes de la Virginia Cherril des Lumières de la ville de Charlie Chaplin.
Quant à Gérard Depardieu, jamais aussi bon que dans les grands classiques qui ont contribué à sa gloire, il est ici exemplaire de sobriété. D'une présence forcément imposante, il laisse néanmoins toute la place à ses partenaires et à cet ange fragile et gracile qu'est ici Christa Théret. Et pourtant chacune de ses apparitions alternativement drôles ou bouleversantes le rendent une fois encore inoubliable dans ce rôle de père déchiré, impuissant à sauver ses enfants de leur destin.
Jean-Pierre Améris nous saisit donc dès la première image implacable et cruelle et ne nous lâche plus jusqu'au final poignant. Il concentre son histoire en une heure trente, sans digression inutile accompagnée d'une musique ample et idéale. Et c'est à regret que l'on quitte ces personnages follement romanesques et romantiques.
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UNE JOURNÉE PARTICULIÈRE
Le film de clôture que je verrai donc tout à l'heure est "L'Homme qui rit" de Jean-Pierre Améris (tiré du roman de Victor Hugo) et pour ceux qui suivent ce blog depuis des années, ils savent qu'entre Jean-Pierre et moi c'est une longue et belle histoire. Il était le Président du Jury du Festival d'Annonay lorsque j'en étais un des huit membres cinéphiles. Quand je vous dis et répète chaque année qu'il faut tenter votre chance... Cela dit, je ne pense pas que tout le monde puisse avoir la chance de "tomber" sur un Président aux qualités humaines hors normes, fidèle en amitié, attentionné... tel que Jean-Pierre Améris (j'en ai testés d'autres depuis... non, je ne citerai pas de nom). Depuis nous sommes restés en contact. Nous nous voyons une ou deux fois par an en fonction de certains événements cinématographiques. Il m'a invitée sur le tournage d'un de ses films "Maman est folle"... Bref, pour faire court... aujourd'hui, grâce à Jean-Pierre et à Audrey, secrétaire de production, j'ai pu assister à la Conférence de Presse, au cocktail... ! C'est pour ce genre de moments aussi que le cinéma est formidable. Je vous donnerai davantage de détails lorsque j'aurai vu le film et surtout lorsqu'il sortira en France en fin d'année. Les thèmes de la monstruosité, de l'apparence, de l'amour sont abordés, ainsi que la gloire, la déchéance, le théâtre, la solitude...
En attendant, voici quelques photos. En vrac, Jean-Pierre Améris, Christa Théret, Marc-André Grondin, Emmanuelle Seigner et des inconnus sur le tapis du photo call :-)
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CHIUSO PER FERIE
Je débranche et vous raconterai plus tard. Soyez sages !
L'étrange affiche (ci-dessous).
Si vous avez une explication à propos du rhino... faites votre rédaction à ce sujet !
Venise au petit jour (c'est le warrior qui s'est levé, pas moi) :
Notre arrêt de bus :
Les messes sont rock à Venise (Le Pavarotti, c'est le curé... Dimanche prochain on va à la mese !!! Oui.)
Et une étrangeté pour conclure, MON Paulot guérit la leucémie !!! ça tombe bien.
:-)
A presto...
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WANTED !
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MOSTRA
à la demande générale...
à suivre,
de la star, du pipole qui sert à rien, du gossbo, du drame, du talon de 12, un sosie, de la gastronomie, du rêve, et très peu de texte parce que j'ai autre chose à faire :-)
UN GOSSBO... si quelqu'un sait qui sait !!!
FLORENCE LOIRET-CAILLE
UN SOSIE... en moins bien !
ZAC EFRON... grand moment d'hystérie pré-pubère !
FRANCESCO ROSI et sa canne, acclamé. Lion d'Or d'Honneur pour l'ensemble de sa carrière.
MICHAEL CIMINO, le choc, des heures à m'en remettre ...
Et La Mostra réhabilie son chef-d'oeuvre absolu, sans équivoque, dans sa versoin director's cut, La Porte du Paradis qui avait subi en son temps ce qui fut sans doute la plus grande injustice de toute l'histoire du cinéma.
PHILIP SEYMOUR HOFMANN
JOAQUIN PHOENIX toujours très avenant
GAMBAS, INSALATA MISTA préparés par vous savez qui !
Du haut du campanile San Giorgio Maggiore, j'ai même pas eu peur de l'altitude !