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  • STOKER de Park Chan Wook *

    Stoker : Affiche

    Richard vient de mourir. Sa femme ne semble guère éprouvée par cette perte, alors que sa fille India, adolescente perturbée (euphémisme), morbide et sinistre regrette beaucoup son papounet qui l'emmenait à la chasse. Normal quand on a une fille unique de l'emmener faire des cartons sur des piafs qui n'en demandent pas tant ! La demoiselle souffre en outre d'hyperaudition. On insiste lourdement sur ce point précis qui n'aura en fait aucune incidence sur l'évolution du récit... Le jour même de l'enterrement, débarque Charles le frère du défunt dont personne n'avait jusqu'alors entendu parler. Il est jeune, il est beau, il ne coûte pas cher à nourrir même s'il gaspille beaucoup et il se montre très serviable tant avec sa belle-soeur prête à succomber aux derniers sacrifices, qu'avec sa jeune nièce apparemment réticente mais secrètement troublée. Charles s'installe dans l'immense demeure des deux femmes ; ça fait jazzer mais le trio n'en a cure. La gouvernante disparaît, puis une vieille tante détentrice d'un secret. et un jeune homme aussi, mais je ne voudrais pas vous spoiler le plaisir..

    La première demi-heure, molle de genou et particulièrement dénuée d'action et d'événements oblige le spectateur proche de l'endormissement à soumettre sa pensée à son voisin : "l'a intérêt à pas s'louper sur le twist final le Park parce que bon là...". India (Mia Wasikowska, très fille perdue cheveux gras) fait son ado sombre, incomprise et bougon, Evie (Nicole Kidman, figée) murmure, chuchotte et fait pleurer ses yeux rouge et Charles (Matthew Goode, en plastique comme s'il sortait tout droit d'Akta Manniskor) fait des sourires et déambule les mains dans les poches. Et puis, paf, le chien... LA révélation ! Si mon voisin a eu comme une absence et du coup a raté la substantifique, je dois dire que le retournement m'a bien plu.

    Las... la dernière demi-heure fait exploser en vol ce qui restait d'intérêt et on s'achemine cahin caha vers le générique en contemplant l'étrange maquillage Bronz-up de Matthew Goode et le visage de cire de Nicole. En outre, si l'Oscar des plus mauvais costumes existe un jour, il pourra être attribué à ce film. Rarement il a été donné de voir des personnages aussi mal sapés ! Même si India/Mia finira en Louboutin !

    Néanmoins, force est de reconnaître que la réalisation élégante virevolte dans des intérieurs chic et choc et  ce sont sans aucun doute toutes ces scènes de douches et d'escaliers, et le fait que Charles/Matthew Goode se donne des airs de Norman Bates (mais en plastique et une main dans la poche) qui permettent à la critique encartée de qualifier ce film d'hitchcockien alors que le scénario souffre de nombreux incohérences et trous d'air !

    Et ne vous fatiguez (comme je l'ai fait) à chercher une explication au titre, c'est simplement le nom de famille de cette famille bonne pour le cabanon... ooopsss !

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  • MUD - SUR LES RIVES DU MISSISSIPPI de Jeff Nichols ****

    Mud - Sur les rives du Mississippi : Affiche

    Ellis et Neckbone ont 14 ans et préfèrent leurs escapades en pleine nature à la fréquentation du collège. Il faut dire que les bayous, sinueux, marécageux offrent leur part de mystère et de magie à deux garçons à l'imaginaire fertile. Le premier vit avec ses parents, au bord du divorce, dans une baraque en tôles sur pilotis, l'autre, orphelin est élevé par son oncle, un pêcheur à l'étrange arnachement. Une de leurs équipées les conduit sur une île isolée et sur cette île, à un bateau échoué à la cîme d'un arbre, sans doute lors d'une des récentes inondations. Ellis et Neckbone sont enchantés de leur découverte et s'approprient immédiatement l'épave. Sauf que des indices laissent supposer qu'elle est habitée. Effectivement, Mud surgit, un type à la fois louche et inoffensif. Neckbone aurait tendance à fuir devant ce clochard tandis qu'Ellis est prêt à écouter son histoire et à lui venir en aide. Les questions fusent. Pourquoi porte t'il un serpent tatoué sur le corps ? Pourquoi ne veut-il jamais se séparer de sa chemise ? Pourquoi a t'il un revolver dans le pantalon ? Mud n'est pas avare de détails. Et entre mythologie personnelle, mensonge et manipulation, l'homme offre aux garçons sa version des événements qu'il a vécus, de ses rapports avec les personnes impliquées dans l'histoire et pourquoi il se cache sur cette île.

     

    Pour défendre Juniper la femme qu'il aime depuis l'enfance, Mud a tué un homme, il a la police aux trousses ainsi que les frères et le père de l'homme qu'il a tué. Ellis, lui même en pleine découverte du sentiment amoureux  adhère sans hésitation à la vision follement romantique de Mud qui souhaite retaper le rafiot, retrouver et embarquer sa belle pour partir loin de ce monde cruel, avec elle. Justement une beauté blonde amochée (Reese Whiterspoon, émouvante) débarque en ville et correspond exactement à la description. C'est Juniper. Est-elle là pour rejoindre son amoureux ?

     

    Mud est comme le Mississippi, beau, imprévisible et inquiétant. Mais aussi terriblement attachant, séduisant; irrésistible. Forcément c'est Matthew McConaughey qui enchaîne avec ce Mud quatre films et quatre performances remarquables : Magic Mike, Killer Joe, The Paperboy. Je le répète mais on ne répète jamais assez et à quel point "le cinéma est aussi (surtout ?) l'art de faire faire de vilaines choses à de jolis garçonsj'ai toujours considéré Matthew McConaughey comme l'un des meilleurs acteurs de sa génération depuis son apparition en 1996 dans le sublime Lone Star. Enfin et grâce à des réalisateurs attentifs, cet acteur étonnant capable de surprendre encore et encore devient indispensable. Ici, plus réservé qu'à l'accoutumé, mélancolique et manipulateur, il est un amoureux prêt à tout pour sauver sa belle des griffes des garçons qu'elle fréquente et qui s'expliquent le plus souvent en la rouant de coups.

    A ses basques s'accroche Ellis, lui aussi prompt à foncer dans le lard des gars qui ne traitent pas les filles comme des princesses... d'abord un "terminale", puis un concurrent et enfin un tueur. Et on tremble un peu pour l'avenir de ce jeune garçon qui suivra sans doute les traces de celui qu'il va admirer un temps avant de se sentir trahi... Le jeune Tye Sheridan (un nom de star !!!) est à suivre et à surveiller de très près. Déjà intense dans Tree of Life de Terrence Malick (bonjour la filmo du moutard !) il est ici l'égal de son aîné et porte en grande partie le film sur ses frêles épaules. Avec sa petite moue, ses cernes et sa volonté, il semble être né pour être acteur. On trouve du Leo (oui, MON Leo) pour sa facilité à absorber l'écran tout entier à lui seul et du Dan DeHaan pour son regard triste et fatigué chez ce nouveau petit prodige.

     

    Et puis Jeff Nichols en train de devenir incontournable car son film est d'une beauté à tomber. Inquiétant, intrigant il pérégrine nonchalemment vers un final inattendu. La dernière demi-heure, haletante m'a fait décoller de mon siège avec l'apparition d'un sniper justicier..

     

    Et on souhaite à Ellis de rencontrer une fille à la hauteur de ses exigeances...

  • JURASSIC PARK 3D de Steven Spielberg **

    Jurassic Park : Affiche

    A partir d'une goutte de sang absorbée par un moustique fossilisé le milliardaire John Hammond et son équipe ont réussi à clôner et faire renaître sur une île, une dizaine d'espèces de dinosaures. Il s'apprête maintenant avec la complicité du docteur Alan Grant, paléontologue de renom, et de son amie Ellie, à ouvrir le plus grand parc à thème du monde. Avant l'ouverture prochainement programmée, les petits enfants de Hammond visitent l'île en compagnie d'Allan (Sam Neil tout mimi) qui déteste les enfants : "ça crie, ça fout le bordel et ça pue..." pas faux de Ellie (Laura Dern charmante) qui rêve d'avoir des enfants et d'un matheux cool qui se prend pour une rock star (Jeff Goldblum, très rock star)... Mais l'affreux jojo (au propre comme au figuré) Dennis Nedry (Wayne Knight exaspérant) cupide et malveillant provoque toute une série de catastrophes et notamment une coupure électrique. Les dinosaures prennent possession de l'île etc...

    Et voilà, c'est reparti, une nouvelle génération de jeunes et moins jeunes mutchachus va découvrir et se passionner pour les dinosaures très vilains mangeurs de viande et les très gentils et très très grands végétariens. Et pourquoi pas, faire naître des vocations de scientifiques en suivant la très plaisante démonstration du fonctionnement de l'ADN et comment le trafiquer ?

    Ça fonctionne toujours aussi bien, même si évidemment les vieux de la vieille n'auront plus l'effet de surprise et l'impatience de découvrir les bestioles admirablement remises en mouvements par le taulier. Les scènes de poursuites et de cache cache s'enchaînent à un rythme suffisamment soutenu pour ne pas s'ennuyer et les effets spéciaux sont magnifiques parce qu'invisibles la plupart du temps. Les mastodontes ont l'air plus vrais que vrais. Et puis c'est marrant de voir les ancêtres de nos ordinateurs et d'entendre un moutard s'extasier : "oh un CD-Rom interactif !!!".

    Mais une fois encore j'émets les plus grands doutes et plus vives réserves quant à l'utilité de la 3D. Je trouve toujours que ça ne sert strictement à rien excepté à assombrir l'image. J'espère que le temps n'arrivera jamais où nous n'aurons plus le choix entre 2 et 3 D comme c'est le cas pour ce film.

    Les acteurs sont charmants, plein d'humour et de passion pour leur métier et très efficaces dès que leur instinct de survie est mis à contribution. Trop cool.

  • KINSHASA SYMPHONY de Martin Baer et Claus Wischmann (DVD) ***

     

    Synopsis : Deux cents musiciens jouent la neuvième symphonie de Beethoven “L”hymne à la joie” quand une panne de courant intervient quelques mesures avant l’achèvement du dernier mouvement. Mais pour le seul orchestre symphonique du Congo, ceci est le dernier de leurs soucis. En quinze ans, l’orchestre a survécu à deux coups d’état et une guerre civile. Le film accompagne des hommes et des femmes qui, dans l’une des métropoles les plus chaotiques du monde, s’attellent à l’un des systèmes les plus complexes de la vie commune : un Orchestre Symphonique.

    J'avais raté ce documentaire à voir lors de sa sortie en salle. Grâce à Cinétrafic, j'ai pu le voir en DVD.

    Il est distribué en DVD depuis le 10 mars dernier parLes Films du Paradoxe.

    La situation catastrophique de ce pays, l'un des plus pauvres du monde, régulièrement dévasté par des conflits internes et répétés n'est pas le sujet de ce beau documentaire étonnant.  Au coeur d'une ville bouillonnante, totalement délabrée par endroits, 200 irréductibles conjuguent instinct de survie et passion. Celle pour une oeuvre monumentale la Symphonie N° 9 en ré mineur, op. 125 de Ludwig Van Beethoven et son "tube" planétaire l'Hymne à la joie. Ils forment le seul orchestre symphonique au monde composé uniquement de noirs !

    On assiste aux répétitions empreintes d'un sérieux et d'un professionnalisme impressionnants pour ces amateurs souvent autodidactes émerveillés par leur propre travail. On craint le pire au début tant la justesse de jeu et des instruments approximative laisse à désirer. Et puis on comprend peu à peu. Les instruments (violons, contrebasses...) sont véritablement "construits" par les musiciens eux-mêmes par des luthiers improvisés et rois de la récup'. On peut sourire, et puis on s'émerveille comme eux  et on admire le résultat final. L'enthousiasme et la passion sont contagieux. L'indulgence et la fierté du chef d'orchestre émouvantes. Le triomphe est juste et mérité.

    Quelques interviews de musiciens et de choristes (qui sont eux très très impressionnants), quelques incursions dans leur vie difficile achèvent de forcer l'admiration et le respect. Et démontrent qu'écouter de la musique peut être bienfaisant, pouvoir en faire, jouer d'un instrument, chanter, est par contre salutaire, vital !

  • UPSIDE DOWN de Juan Solanas °°°

    Upside Down : Affiche Jim Sturgess, Kirsten Dunst

    Je sais, je DOIS vous parler de Mud et vous pouvez d'ores et déjà vous précipiter pour le voir. Mais avant, comme je me sens parfois un peu responsable de votre argent de poche, je tiens à vous mettre en garde contre cet Up Side Down ! En effet, nous ne sommes qu'en mai et déjà je crois tenir MON navet de l'année. Je me demande comment il serait possible d'atteindre ce degré de nullitude et de mochitude. Par contre si vous êtes l'heureux  détenteur d'une quelconque carte illimitée vous pouvez toujours aller perdre deux heures de votre précieuse vie pour évaluer l'étendue de l'horreur !

    Qu'en est-il donc ? Et bien la terre a été détruite, ou presque, encore. La guerre, le pétrole tout ça. Une voix off miello-dépressive nous explique qu'il y a désormais deux mondes : çui d'en bas (les pauvres, sales, puants qui travaillent), çui d'en haut (les riches, beaux, blonds, pleins aux as, qui... travaillent aussi !). Quand on passe d'un monde à l'autre, on voit pas la différence à l'oeil nu : c'est moche ! Un peu comme si la pelloche de 300 hou ha avait été repeinte en marron caca chiasseux. La voix off du début est tellement anémiée qu'on ne comprend rien du tout de toute façon. En bas, chez les moches qui puent vit un petit garçon orphelin Adam. Sa tata lui fait des crêpes volantes et rose. C'est moche et il aime ça. Sa tata est une fée. Mais moche. On est en bas.

    Adam est comme il se doit un garçon solitaire astucieux et en levant la tête il aperçoit Eden (lol les prénoms non ? Pourtant les serpents c'est dans Mud qu'on les trouve)... Et leurs mutchachus Caïn et Abel tant qu'on y est... mais je vais trop vite, je m'emballe !). Ils se font coucou tête bêche (je déteste cette expression mais elle va bien avec le film) et par un astucieux système de cordages ils se retrouvent en haut de la montagne et quand ils sont ados, ils se roulent des pelles car l'up side down kiss c'est un peu la spécialité de Kirsten Dunst ! Mais un jour cette couille d'Adam lâche la corde et Eden tombe par terre, la faute à Voltaire et ya du sang qui coule.

    10 ans passent.

    Adam travaille dans un atelier pourrave avec un gros noir boîteux et un moche jeune et barbu. Il est en train d'inventer une crème anti-rides, redensifiante anti-âge qui repulpe et remodèle le visage. Il se fait embaucher par la très très grosse entreprise d'en haut (j'ai oublié le nom) mais garde la tête en bas quand même. A la télé il voit une belle fille avec une belle peau, des belles dents et une chevelure belle color blond lumière. C'est elle. Eden. Grâce au gros noir qui boîte il rejoint le monde d'en haut (interdit aux pauvres sinon c'est la pendaison direct) en mettant du plomb dans ses bottines mais au bout d'une heure ça chauffe et ses pieds crament, il doit vite redescendre... enfin, remonter mais à l'envers. Eden est devenue amnésique à cause de sa chute sur la tête. Pendant trente trois secondes, elle ne se souvient pas d'Adam et puis elle s'en souvient. C'est cool.

    Et là, j'ai dû cligner des yeux parce que même pas ils couchent et elle attend des jumeaux qui vont sauver le monde... parce que dans le liquide amniotique les bébés ils flottent tous égaux entre eux non ? Simple.

    Je ne m'éternise pas. C'est laid... mais d'une laideur peu commune. C'est bête, simplet, mal bidouillé avec une bonne idée de départ totalement dissoute dans une storiette d'amour dont on se fout comme de son premier patin, des personnages dont on n'a que faire. Mais le miracle c'est que Jim Sturgess (cte pauvre Adam !!!) parvient à ne pas être ridicule malgré la pauvreté de son rôle. Quant à Kirsten Dunst (cte pauvre Eden), elle n'a pas grand chose à faire que de jolis sourires Ultra Brite et boire des coups à l'envers ou danser le tango argentin... une parmi d'autres des étrangetés sans signification ni justification de ce film fatigant à regarder par sa laideur et le fait que la moitié des acteurs ont la tête en bas ! Et je ne vous parle pas de la BO new-âge volatile et éphémère ! Non, je ne vous en parle pas.

  • HANNAH ARENDT de Margarethe Von Trotta ****

    Hannah Arendt : Affiche

    En 1961 Hannah Arendt, philosophe juive allemande volontairement exilée à New-York depuis la montée du nazisme exprime le souhait de suivre le procès d'Adolf Eichmann responsable de l'envoi des juifs en camps de déportation. N'ayant pu assister aux  Procès de Nuremberg, elle met toute sa force de conviction pour être sur place à Jérusalem. C'est finalement pour le journal New Yorker qu'elle va être le témoin de ce procès historique à la suite duquel elle écrira Eichmann à Jérusalem. C'est en effet de cette "expérience", de son observation de cet homme, Eichmann, qu'elle tirera son concept longtemps incompris, décrié, de "la banalité du mal".

    Si (comme moi) vous ne connaissez d'Hannah Arendt "que" le nom et cette idée largement utilisée aujourd'hui de la "banalité du mal"... vous sortirez peut-être de la vision de ce film fasciné par une femme, une pensée mais aussi une actrice et une réalisatrice. Car réussir à filmer la pensée en action peut paraître relativement surréaliste. Margarethe Von Trotta y parvient secondée admirablement par une actrice d'exception, Barbara Sukowa. Recevoir ainsi une leçon d'histoire et de philosophie n'est pas courant au cinéma. Et "rencontrer" une pensée aussi complexe, d'une intelligence inouïe s'exprimer avec une telle puissance, une telle détermination, une telle évidence est un cadeau. Ce film qui nous offre Hanna Arendt et Barbara Sukowa est un cadeau.

    Hannah Arendt enseigne à New-York à des étudiants énamourés qui boivent littéralement chacune de ses paroles, se précipitent pour lui allumer ses cigarettes et la vénèrent des yeux. On les comprend. On imagine sans peine qu'elle a dû bouleverser la vie de pas mal de boutonneux, comme le fit jadis pour elle Martin Heidegger dont elle fut un peu plus que l'élève !

    Lorsqu'Hannah se trouve face à Eichmann, petit homme enrhumé, enfermé dans sa cage en verre, elle est stupéfaite. Le film rend parfaitement compte de ce moment d'effarement total. L'homme ne fait pas peur, il est d'une extraordinaire banalité. Puis l'évidence apparaîtra lorsqu'elle l'écoutera répondre aux questions de ses juges. Eichman est certes l'administrateur de la "solution finale concernant la question juive" mais il est d'une médiocrité telle qu'il est incapable de penser. Pour lui "la loi c'est l'honneur". Le "juif" n'existe pas en tant que personne. Et Eichmann n'est qu'un exécutant scrupuleux, tout entier asservi à son patron, l'autre Adolf ! Lorsqu'on lui demande s'il aurait tué son père si Hitler le lui avait demandé, il répond "oui, s'il m'en avait apporté la preuve". Lorsqu'on lui demande si la preuve lui a été donnée que 6 millions de juifs devaient périr, il ne comprend pas la question. Hannah Arendt ne cherche pas à banaliser le crime de cette ordure mais sa médiocre personnalité. Mais je ne m'aventurerais pas davantage à tenter d'exprimer en quelques mots la pensée complexe et fascinante de cette femme...

    La réalisatrice utilise quelques images d'archives du procès. On les connait mais on est toujours remué de voir cet homme au rictus excécrable rester calme et répondre avec respect et courtoisie au Président du Tribunal. Quelques témoignages de rescapés font toujours froid dans le dos. Certains s'évanouissent, perdent leur sang-froid, fondent en larmes... Comment une telle chose a pu être possible ? On aura beau retourner cette question dans tous les sens, on n'obtiendra jamais la réponse.

    A cause de cette théorie donc, cette "banalité du mal", Hannah paiera le prix fort et perdra l'amitié de certains de ses proches. Mais elle sera également victime d'insultes, d'accusations qu'elle considèrera comme des calomnies sans pour autant les dénoncer, de menaces même de la part du gouvernement israëlien. Elle devra s'isoler et souffrira mais fera toujours face sans faiblir ni renoncer à sa théorie.

    La lumière éclatante de la sublime Jérusalem s'oppose à l'atmosphère enfumée de l'appartement New-Yorkais. Les soirées entre intellectuels, les rapports incroyables qu'elle entretenait avec son mari sont d'autres moments passionnants de ce film fort, remarquablement puissant dans sa simplicité. Interprété avec génie par une actrice étonnante. Fascinant.