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4 ** POURQUOI PAS ? - Page 31

  • SUBLIMES CRÉATURES de Richard LaGravenese **

    Sublimes créatures : affiche

    Ethan s'ennuie ferme dans son patelin oublié au fin fond de la Louisiane dont la seule distraction est de reconstituer en costumes chaque année une bataille de la guerre de sécession. Ethan rêve chaque nuit d'une fille, la même. Chaque matin, c'est la déception, elle n'existe pas. C'est dire s'il attend beaucoup de la prochaine rentrée des classes, la dernière avant l'université. Et justement l'arrivée d'une nouvelle élève, Léna Duchannes va créer le mystère et le scandale. Il se trouve que cette fille est une enchanteresse (ne pas dire sorcière), qu'à l'anniversaire proche de ses 16 ans elle va devoir se fixer sur le côté obscur ou clair de la force et par le plus pur des hasards, elle est aussi la fille des rêves d'Ethan. Les deux jeunes gens sont de toute façon destinés l'un à l'autre depuis que deux de leurs ancêtres ont fricotté ensemble pendant la guerre de Sécession... Léna vit chez son oncle (Jeremy Irons : une bombasse !) et va devoir subir un véritable rite initiatique pour ne pas sombrer du côté obscur. Mais, entre enchantements et sortilèges, tout ne sera pas simple et les sacrifices vont tomber en cascade !

    J'en ai rêvé, Richard LaGravenese l'a fait ! Un film qui ne donne pas envie de se tirer une balle en sortant de la salle et qui évite tristesse, écoeurement et découragement sur la nature humaine. Evidemment, pas de quoi non plus s'extasier et s'émouvoir outre mesure même si la nature et les plantations environnantes, la Louisiane et ses arbres aux branches et feuillages entrelacés, sont sublimes. Néanmoins ce film vaut beaucoup mieux que son affiche racoleuse et son titre débile ! Même si le parallèle et la comparaison avec la série des Twiligth sautent à la gorge. il faut reconnaître que la comparaison n'est pas à l'avantage des aventures des endives de Bella, de son Edward et de son loup-garou. Léna et Ethan sont beaux, drôles et charismatiques, ils n'ont pas à ânonner des répliques anémiques et absconces. Leur histoire tient la route. Ils n'ont pas l'air de souffrir, ils n'attendent pas 18 épisodes pour se vautrer l'un sur l'autre et plus encore même s'ils doivent batailler ferme pour faire triompher leur amour... A ce propos je trouvais la fin fichtrement osée, pas de happpy end, mais je découvre qu'il s'agit à nouveau d'une saga. Ce sera de toute façon infiniment plus agréable de retrouver Alden Ehrenreich (déjà excellent dans TETRO) et Alice Englert (inconnue nouvelle venue et fille de Jane Campion...) qui contrairement à leurs illustres et pâles aînés n'ont pas oublié d'être d'excellents acteurs !

    A noter également le grand numéro d'Emma Thompson, belle et en grande forme, dans un double rôle réjouissant.

  • FLIGHT de Robert Zemeckis **

    Flight : affiche

    Quelques instants avant de décoller pour un vol court de routine d'à peine une heure, le pilote Whip Whitaker termine son week-end de beuveries, de sexe et de cocaïne par une petite "ligne" censée le remettre sur pieds. Et c'est le miracle, alors qu'il vacillait, la précieuse poudre blanche lui donne un coup de fouet. Dans son costume prestigieux de commandant de bord il rejoint son avion de sa démarche chaloupée. Mais loupe, signe du destin, la première marche de la passerelle. La charmante jeune femme qui a partagé ces quelques jours de débauche n'est autre qu'une des hôtesses du vol. Malgré une météo désastreuse et un co-pilote inexpérimenté (et inquiet) par l'état de son commandant, l'avion décolle, franchit une zone de turbulences de grande amplitude pour se stabiliser au-dessus des nuages. Tout n'est que joie et satisfaction et le pilote s'endort. Brusquement c'est l'avarie et l'avion dégringole en piqué vers une zone d'habitations. Whip se ressaisit et parvient avec un calme et une maîtrise exemplaires à faire attérir l'engin dans un champ. Sur la centaine de personnes, passagers et équipage, seules 6 trouvent la mort. Un moindre mal. Whip blessé est porté triomphalement en héros jusqu'à ce que les analyses toxicologiques révèlent plus de 2 grammes d'alcool dans le sang et autres substances illicites. Il devra donc faire la preuve devant un tribunal que c'est l'état de l'avion et non le sien qui est responsable de l'accident !

    Il y a de très bonnes choses et d'autres beaucoup moins qui laissent forcément un arrière goût de semi réussite et donc de semi ratage.

    Les plus :

    - Le crash. Pendant de longues minutes, le spectateur est dans l'avion et le plus souvent dans le cockpit. Alors que les moteurs crament un à un, Denzel/Whip imperturbable et efficace réalise l'exploit de retourner l'avion pour lui permettre de planer, puis de le retourner à nouveau et d'attérir sur le ventre en limitant les pertes. Zemeckis s'y connaît en crash d'avions. Celui de Seul au monde était déjà une réussite super flippante. On en mène vraiment pas large dans notre fauteuil qui ne bouge pas.

    - Les deux apparitions de John Goodman en pourvoyeur rock and roll de substances illégales. Ce type, cet acteur génial est un effet spécial à lui tout seul et tant pis s'il n'est pas un exemple pour les enfants !

    - Le mélange des genres savamment orchestré : film catastrophe, film de procès avec "coupable" récalcitrant, étude psychologique, rédemption.

    - L'interprétation subtile de Denzel Washington. Il exprime toutes les ambiguités de son personnage de héros défaillant, pas forcément sympathique, avec un génie incontestable. Menteur, addict, pétri de doutes mais résolu à s'en sortir, son jeu est vraiment impressionnant.

    Les moins :

    - Le personnage de Kelly Reilly en junkie repentie et sa rencontre providentielle à l'hôpital avec Whip. Inutile et invraisemblable, ce personnage coupé au montage aurait réduit le film de la demi-heure de trop. Quant à l'actrice, si elle est d'une beauté indiscutable, son jeu se limite exclusivement à pincer les lèvres.

    - La scène d'hôpital dans l'escalier où un cancéreux au stade terminal fume ("mon cancer va attraper le cancer" ah ah ah !) et se pose en prophète sur l'avenir de Whip et la Junkie ! Ridicule.

    - La femme et le fils du "héros" forcément hostiles à toute tentative de réconciliation.

    - ET SURTOUT : les bondieuseries qui jalonnent tout le film. Dieu présent partout et toujours. Le prêchi prêcha est insupportable au point qu'on ne parvient plus à comprendre si le réalisateur cherche à faire la critique ou l'apologie de la religion. J'ai parfois eu la sensation d'être face à un film catho intégriste. La seule défense de l'avocat en devient même "il faut faire valoir que cet accident est la volonté de Dieu", et le seul bâtiment détruit, le clocher d'une église. J'avoue que l'agacement de toute cette religiosité ambiante m'a vrillé les nerfs tout comme l'acte de contrition larmoyant final.

  • HITCHCOCK de Sacha Gervasi **

    Hitchcock : affiche

    Que les allergiques aux biopics ne se réjouissent pas trop vite. Ce film n'en est pas un puisqu'il se concentre quasi exclusivement sur les difficultés rencontrées par Hitchcock pour faire accepter par les studios hollywoodiens, très frileux dès qu'il s'agit de projet un tantinet atypique, son prochain film Psychose (Psycho pour les intimes !). En choisissant de prendre pour thème les exploits d'un serial killer très amoureux de sa maman (meurtre, inceste...) le Maître se met à dos tous les producteurs, censeurs et journalistes. Alors que La mort aux trousses est un triomphe et qu'on lui demande de refaire peu ou prou le même film, il cherche, comme un défi ou une provocation, à surprendre.  Sa très attentive, patiente et impeccable femme Alma Reville (par ailleurs scénariste) décide comme elle l'a toujours fait de le soutenir et de l'aider.

    Je règle tout de suite le cas Anthony Hopkins ! Incompréhensible. Pourquoi tout ce silicone sur le visage (et peut-être sur le corps) pour obtenir un résultat absolument monstrueux. Anthony Hopkins ressemble à une baleine engoncée dans son latex et absolument pas à Alfred Hitchcock. Il est vraiment insensé que personne ne s'en soit aperçu. Même le profil, sans doute le plus célèbre de toute l'histoire du 7ème art est ridicule ici. Quant au "jeu" de l'acteur Hopkins, il s'en ressent énormément. Dissimulé sous sa carapace de plastique, il n'a rien à faire et ne peut exprimer aucune émotion. Affligeant.

    hitchcock de sacha gervasi,cinémahitchcock de sacha gervasi,cinéma

    Par contre, Scarlett Johanson est une Janet Leigh convaincante et absolument délicieuse. Il y a fort à parier qu'Hitchcock aurait fait appel à elle en son temps. 

    hitchcock de sacha gervasi,cinémahitchcock de sacha gervasi,cinéma

    De toute façon, ce film est avant tout un hommage à cette femme de l'ombre qu'était Alma Dreville sans qui le maître du suspense n'aurait sans doute pas été ce qu'il a été. Et Hellen Mirren dans le rôle est tout à fait royale. Mais si Hitch' était tel que nous le présente le film : mégalo, odieux, obsédé sexuel, voyeur, tyrannique, prétentieux, mysogyne, jaloux, mufle, gourmand et un véritable porc à table... l'aristocratique, raffinée et magnifique Alma a dû en baver. Mais bon, nager chaque jour dans une piscine à Hollywood et côtoyer un génie a sans doute un prix, comme celui de supporter cet être insupportable.

    On sait que Psychose est un chef d'oeuvre et les meilleurs moments de ce film sont évidemment ceux où l'on voit le film en train de se faire. On découvre toutes les manoeuvres dont Hitch' dût faire preuve pour contourner la censure. Montrer un corps totalement nu était inconcevable et pourtant la fameuse scène de crime a lieu sous la douche. Comment faire ? Ce que le réalisateur conçoit est astucieux et effectivement le corps de Janet Leigh n'est jamais intégralement visible. C'est l'imagination, les fantasmes du spectateur qui sont à l'oeuvre. Quant à la célèbre musique de Bernard Herrmann, elle vrille toujours autant les nerfs, même si elle est le remède définitif à prendre la moindre douche ! Heureusement que le compositeur a réussi à convaincre Hitchcock qui souhaitait que la scène soit muette (à l'exception des hurlements de l'actrice !).

    Finalement, le plus grand atout et la plus belle réussite du film de Sacha Gervasi est de donner envie de revoir de toute urgence Psychose ainsi que tous les films du Maître dont mon préféré reste sans conteste et nulle hésitation Les Enchaînés (Notorious). 

  • SHADOW DANCER de James Marsh**

    Shadow Dancer : affiche

    Synopsis : Colette McVeigh vit à Belfast avec sa mère, ses frères et son fils. Elle est une fervente activiste de l'IRA. Elle est arrêtée suite à un attentat manqué à Londres, et Mac agent du MI5 lui offre le choix : passer 25 années en prison ou espionner sa propre famille. Pour protéger son fils, elle accepte de faire confiance à Mac et retourne parmi les siens. Mais quand une opération secrète menée par ses frères est déjouée, les soupçons se multiplient et les actions de Collette vont les mettre, elle et sa famille, en grand danger.

    Un petit air de déjà vu : le film de terroristes irlandais. Mais le "plus" est que cette fois il s'agit d'une femme. Et que le physique gracile et le visage "innocent" de l'actrice Andrea Riseborough brouillent les pistes et notre perception. L'actrice est extraordinaire. Clive Owen totalement éteint...

  • HAPPINESS THERAPY de David O'Russell **

    Happiness Therapy : affiche

    Qu'est-ce qui différencie cette comédie sentimentale américaine de toutes les autres ? Simplement le fait que les deux tourtereaux qui sont les seuls à ne pas savoir qu'ils seront ensemble avant la fin de la dernière bobine, sont deux dépressifs maousses ! Pat sort, aidé par sa mère et contre avis médical, de huit mois d'hôpital psychiatrique. Il a une injonction de ne pas approcher sa femme et le lycée où il était enseignant sous peine de retourner direct chez les barjots. Pat a surpris sa femme sous la douche avec un collègue, ça l'a rendu fou de rage et il a démolli le portrait de l'inconséquent. C'est alors qu'il a été déclaré "bi-polaire non diagnostiqué". Cela signifie qu'il avait déjà une fâcheuse tendance aux sautes d'humeur avant ce déplorable passage à l'acte ! Ayant tout perdu, femme, logement et travail, il est contraint de retourner vivre chez ses parents. Entre sa maman qui le couve et son papa sujet aux tocs et très superstitieux, il aura fort à faire puisque son obsession est par ailleurs de renouer avec sa femme dont il est (seul) persuadé qu'elle est toujours amoureuse de lui. Mais lors d'un repas chez son meilleur ami, il rencontre Tiffany, jeune veuve maniaco-dépressive qui sort d'une période de nymphomanie active !

    En hésitant constamment entre la farce (Pat/Bradley court avec un sac poubelle sur lui et sursaute chaque fois que Tiffany/Jennifer entre dans le champ par exemple) et le drame (les rapports avec les parents, leur culpabilité face au "mal" dont souffre leur fils), le réalisateur nous laisse aussi dans un entre-deux peu convaincant. Et au final, ce film est mignon et joli comme toute rom-com avec deux acteurs craquants, adorables et vraiment très très plaisants à admirer. D'autant que Tiffany met entre les mains de Pat un marché/chantage : elle remettra une lettre à son ex s'il consent en échange à être son partenaire lors d'un concours de danse auquel elle tient beaucoup. Cela donne lieu à des scènes de répétitions et un final dansé qui nous démontrent que Brad et Jenn' ont pris des cours de danse et sont très jolis à regarder.

    Cela dit cette façon de traiter de la dépression est bien étrange. D'abord Pat et Tiff' pètent la santé. Evidemment Pat court avec un sac poubelle sur le dos et porte fréquemment des t-shirts immondes de l'équipe de foot locale, mais c'est pour faire plaisir à son papa. Quant à Tiff', elle est toujours tirée à quatre épingles et décorée comme pour un réveillon. Pourquoi Bradley Cooper, supposé être prof d'histoire semble t'il avoir perdu toute culture et être redevenu un petit garçon incapable de contrôler la moindre émotion ? Par ailleurs j'ai eu un peu de mal à croire au personnage de Jennifer Lawrence. Sans remettre en cause son talent (cette fille toute jeunette a déjà tenu tout un film sur ses épaules), ça saute aux yeux qu'elle a 20 ans et en paraît 15. Difficile donc d'imaginer qu'elle ait eu le temps de se marier pendant trois ans, d'être veuve, de faire une dépressoin et d'être nympho au point que seul le train ne lui soit pas passé dessus. Cette réserve mise à part, elle est magnifique et met toute son énergie à sortir Brad/Pat de sa torpeur. Bradley a toujours un physique très très facile, et un regard à tomber. En grand garçon tout perdu, il est même vraiment touchant et sort complètement de son very bad trip. Et Robert De Niro fait lui aussi une belle prestation décalée, émouvante et sobre.

    Par contre je vous parle pas du boulet meilleur ami et de sa femme : deux caricatures d'êtres humains qui risqueraient de me faire dire des choses désagréables sur les personnages et les acteurs, et je n'ai pas envie. Il y a déjà une autre personne qui me fout les nerfs en ce moment, mais ça, c'est une autre histoire...

    Un gentil film donc, plein de hapiness,

    mais de dépression et de thérapie : point.

  • LINCOLN de Steven Spielberg **

    Les 4 derniers mois de la vie d'Abraham Lincoln, 16ème Président des Etats-Unis et premier à avoir été assassiné. En 1865, il vient d'être réélu pour un second mandat. Il est confronté à la guerre de Sécession qui fait rage et déchire le pays depuis 4 ans et à laquelle il veut mettre un terme. Le Nord abolitionniste s'oppose au Sud conservateur notamment sur la question de l'esclavage des noirs. Lincoln va mettre toute son énergie et sa détermination pour faire accepter le XIIIème Amendement de la Consitution des Etats-Unis d'Amérique, abolir et interdir l'esclavage et toute servitude involontaire.

    Pour cette noble et légitime cause, Lincoln va faire preuve d'un courage et d'une fermeté sans faille. Il ira jusqu'à faire du porte à porte pour recueillir les dernières voix qui manquent et il semble que l'amendement ait été adopté avec une majorité de seulement deux votes ! Difficile d'entretenir un quelconque suspens avec un événement dont on connaît l'issue et à ce titre la scène du décompte des voix est assez ridicule. La musique de John Williams s'enfle jusqu'à l'explosion comme si le moindre doute subsistait. Spielberg sait-il que nous sommes en 2013 et qu'on sait que l'esclavage est aboli ?

    Néanmoins, ce film est parfait. Oui, parfait. Mais trop. Trop de tout. Trop long. Trop didactique. Trop répétitif. Les mêmes scènes se renouvellent tout au long de deux heures trente interminables où toute une ribambelle de personnages, de noms nous sont imposés sans qu'on comprenne toujours qui est qui et qui fait quoi. A ce titre Tommy Lee Jones (bravo pour la moumoute, il peut remercier le perruquier, c'est un marrant !) dans le rôle de Thaddeus Stevens (jamais entendu parler !) est très représentatif. Au début on est absolument persuadés qu'il est un opposant à Lincoln et ses aberrantes idées progessistes. Or, on découvre un peu plus tard qu'il est un ardent défenseur de l'abolition de l'esclavage à laquelle il travaille depuis trente ans ! Il faut dire que les nombreux dialogues et tirades ampoulées, pompeuses et théâtrales mériteraient la plupart du temps d'être réécoutées une seconde fois pour en saisir toute la finesse, ou au moins le sens. Car Lincoln est un film bavard, très très bavard. Et Lincoln le personnage est un homme bavard. Tout comme ses collaborateurs, on finit par se lasser de ses petites histoires métaphoriques et tortueuses dont il a le secret. Lincoln est incapable d'appeler un chat, un chat. Pour lui c'est un Felis silvestris catus, un mammifère carnivore de la famille des félidés. Et c'est fatigant tout ce verbiage grandiloquent souvent injustifié.

    Oui ce film est fatigant. Et très laid aussi. En 1865, il n'y avait pas l'électricité. Tout se passe donc dans une semi-obscurité, dans des teintes grisouilles et verdâtres donnant à l'ensemble une image très moche, boueuse, craspec comme la sale guerre qui fait rage. Il n'y avait pas le chauffage central non plus et on se les caille menu à la Maison Blanche.

    Lincoln est un type bien, un grand Président, un orateur hors pair, un stratège exceptionnel. Il était aimé, adulté, respecté. Mais Spielberg en fait un saint, une icône figée dans un seul et unique combat qui l'épuisera. Le général Grant, fin psychologue, lui dira d'ailleurs "je vous ai vu l'année dernière, vous avez pris dix ans". Il est vrai que Lincoln a une cinquantaine d'années et ressemble à un vieillard. Il faut dire que sa vie privée est pour le moins tumultueuse aussi et qu'il doit gérer son instable, cyclothymique et autoritaire femme Mary, inconsolable depuis la mort d'un de leur fils et se bagarrer pour que Robert leur fils aîné ne s'engage pas dans l'armée.

    Lincoln est donc un film qui se regarde être LE film politique ultime mais dont on sort en se disant "sitôt vu, sitôt oublié" avec néanmoins (je ne suis pas à une contradiction près) l'envie d'en savoir plus sur ce personnage, sa vie, son oeuvre ! Et puis il y a Daniel Day Lewis, acteur sublime dont chaque rôle est toujours un événement d'autant plus estimable qu'il est rare. L'humour, la douceur, l'humanité, l'intelligence, la fermeté de son personnage déferlent sur l'écran avec une évidence, il EST Lincoln. Pourquoi a t'il fallu qu'on lui ajoute numériquement des échasses pour le faire paraître immense (Lincoln atteignait presque les deux mètres), ses jambes ressemblent  du coup à deux bâtons et lui mettre une tonne de farine sur le visage pour le faire paraître fatigué ?

    Lincoln est un film bizarre, prétentieux, fatigant, à la fois trop grand et comme s'il n'était que le brouillon de ce qu'il aurait dû être.

    Pfiou, je vais dormir un peu...

  • RUE MANDAR de Idit Cebula **

    Rue Mandar : affiche

    Charles, Rosemonde et Emma se retrouvent pour assister aux funérailles de leur maman. La fratrie a des liens distendus et la vente de l'appartement familial du 13 rue Mandar à Paris sera l'occasion de révéler les non-dits, les rancoeurs mais aussi les tendres souvenirs.

    Comme pour certains romans, les réalisateurs ont parfois envie de raconter leur expérience personnelle de la famille. En général la "disparition" des parents est déterminante pour la survie d'une famille car c'est le premier jour du reste de la vie. Celui où les enfants même grands, même adultes, deviennent orphelins, sans plus personne sur qui se reposer ou faire peser le poids de leurs échecs, de leurs erreurs, de leurs hésitations ou de leurs réussites. La famille c'est ce grand barnum imposé où des personnes sans affinités particulières, n'ont parfois d'autres liens que ceux du sang et sont parfois obligées de cohabiter. Et même provisoirement, cela peut être l'enfer. Idit Cebula choisit de repeindre les murs de sa vie en rose bonbon. En une heure trente tout est résolu, les discordes, les critiques, les rancoeurs. Il y a toujours celui ou celle qui assure avoir plus de chagrin, celui ou celle qui s'est le plus occupé des parents alors que d'autres ont "fait leur vie", celui ou celle qui était le ou la préféré(e). Et c'est vrai, il y a tout cela dans une famille, et plus encore car ici la famille est juive et tout semble amplifié, plus démonstratif, plus exubérant. Et c'est sans doute ce qui fait le charme de ce gentil film où l'on rit pas mal.

    La réalisatrice n'élude pas le chagrin, et l'on sent bien qu'elle a vécu le drame de devoir vider la maison de ses parents. Le moment où l'on doit trier, éliminer, donner, garder devient celui où tout devient vital. Plonger le nez dans les vêtements, retrouver des saveurs, des senteurs, des moments oubliés, s'immerger une dernière fois dans l'enfance...

    Si Edit Cebula néglige un peu les conjoints réduits à de pauvres pantins compréhensifs que l'on écarte, les deux soeurs et le frère rivalisent de charme et de drôlerie. Il faut dire que Sandrine Kiberlain, grande bringue libre, bordélique, partie trouver ses racines en Israël, Emmanuelle Devos psychanalyste submergée par ses émotions et le départ de son fils du foyer et Richard Berry, grand frère qui retient son chagrin en se montrant agressif savent à la perfection alterner les instants comiques et ceux plus dramatiques de leurs personnages. 

  • ALCESTE À BICYCLETTE de Philippe Le Guay **

    Alceste à bicyclette : affiche

    Après une carrière faite de succès et à la suite d'une dépression, l'acteur Serge Tanneur vit désormais reclus sur l'île de Ré dans une maison délabrée. Il ne veut plus entendre parler du métier et passe son temps à peindre des croûtes. Gauthier Valence acteur d'une série médicale à succès est tenté de monter Le Misanthrope de Molière et vient proposer à Serge le rôle de Philinte. Serge refuse d'abord, puis se laisse tenter à condition qu'en tirant à pile ou face, les deux hommes alternent les deux rôles d'Alceste et de Philinte. A l'issue de quelques jours de répétition, Serge dira à Gauthier s'il accepte le contrat ou pas. Gauthier s'installe sur l'Île et les répétitions commencent !

    Et c'est savoureux, jubilatoire, enthousiasmant. Les deux personnages s'affrontent, s'aiment, se détestent, s'admirent. Et les deux comédiens rivalisent de charme et de talent pour scander les alexandrins du Maître. Cabotinage et opportunisme se heurtent aussi. Fabrice Luchini a le contrôle parfait du dépressif cultivé, passionné par la langue de Molière. Qui mieux que lui peut incarner Alceste ce misanthope dont le "dessein est de rompre en visière à tout le genre humain" ? Et Lambert Wilson, malgré un improbable brushing (appelez-moi la coiffeuse !), alterne habilement comédie et théâtralité, fascination et opportunisme. Quelques piques bien senties sont proférées sur les métiers du septième art, sa dureté, ses hypocrisies et sur les tarifs indédents de l'immobilier dans la région.

    Mais pourquoi le réalisateur ne s'est-il pas contenté de nous offrir ces joutes verbales, ces répétitions passionnées et passionnantes ? Le film n'a par ailleurs rien d'un théâtre filmé puisque régulièrement les deux hommes s'évadent à bicyclette dans cette île somptueuse désertée hors saison. "C'est ce foutu pont qui a tout gâché" s'agace Serge/Luchini. Pourquoi Philippe Le Guay s'est-il senti obligé de s'égarer en mettant sur la route des deux hommes une femme chargée de jouer les trouble-fêtes et les psychologues de bazar ? Ce rôle inutile et misogyne, la dame étant évidemment une grande emmerdeuse avec un grand TEU mais forcément irrésistible, gâche un peu la fête et coupé au montage, aurait laissé au film une durée suffisante.

    Cela dit, avoir envie de (re)lire les tirades d'Alceste ne peut décidément pas faire de mal.

    «Sur quelque préférence, une estime se fonde,

    Je veux qu'on soit sincère, et qu'en homme d'honneur

    On ne lâche aucun mot qui ne parte du coeur.

    J'entre en une humeur noire, et un chagrin profond,

    Quand je vois vivre entre eux les hommes comme ils font;

    Je ne trouve partout que lâche flatterie,

    Qu'injustice, intérêt, trahison, fourberie;

    Je n'y puis plus tenir, j'enrage, et mon dessein

    Est de rompre en visière à tout le genre humain

    Et c'est n'estimer rien, qu'estimer tout le monde".

  • TOURISTES de Ben Weathley **

    Touristes : affiche

    Malgré ses 34 ans bien sonnés, Tina vit toujours avec sa mère, mégère possessive et abusive qui lui reproche régulièrement et ne lui pardonne pas la mort accidentelle de leur petit chien Popy ! On ne se méfie jamais assez des aiguilles à tricoter et des chiens idiots qui font les foufous ! La rencontre de Tina, vieille fille, grande sauterelle pas si mal mais fringuée comme l'as de pic et de Chris géant rouquin plein d'attentions va bouleverser le quotidien de ces deux laissés pour compte qui se trouveront vite foultitude de points communs. Et notamment une entente sexuelle effrénée, débridée, les deux loulous étant parfaitement disposés à toutes les divagations sur le sujet.

    Le départ en caravane pour des vacances ayant comme objectif la visite des musées les plus improbables d'Angleterre à travers la campagne a été méticuleusement préparé par Chris et l'itinéraire soigneusement déterminé. Le périple commence dans la joie et la bonne humeur, malgré la malédiction de la mère d'un tonitruant "je ne vous aime pas" à l'adresse de Chris. Tina et Chris n'en ont cure et après un démarrage prometteur, la véritable nature de ces deux bêtas plutôt bas de plafond va se faire jour.

    Un inconscient touriste va à deux reprises jeter un papier par terre sans le ramasser malgré les exhortations de Chris qui s'érige brusquement en écolo et voilà le malotru malencontreusement renversé et écrabouillé par la caravane ! Comme cela a tout l'air d'un accident, le couple peut reprendre son périple malgré la mort de la victime et la préméditation évidente. Ce qui perturbe le plus Tina et Chris est que leur véhicule soit taché de sang. Et voilà que tous ceux qui n'auront pas l'heur de plaire à Chris, auront simplement la malchance de se trouver sur le chemin de sa mauvaise humeur ou ne correspondront pas au schéma de ses théories à l'emporte-pièces passeront de vie à trépas sans autre forme de procès. Les méthodes du bonhomme seront de plus en plus gores, sauvages et spectaculaires. Si Tina ne sera au début qu'une spectatrice étonnée, elle deviendra rapidement instigatrice, allant jusqu'à éliminer un pauvre randonneur sans la moindre raison.

    Nul doute, ce film est drôle, violent, bête et méchant et les deux acteurs Alice Low et Steve Oram crétins jusqu'au bout des fringues (et également scénaristes) s'en donnent à coeur joie pour jouer les andouilles aussi stupides que gratuitement méchants. Il est dommage que le réalisateur (dont je vous recommande vivement le très dérangeant Kill List) n'ait pas réussi à rendre plus plausible la parfaite entente de Tina et Chris. On sent rapidement que l'imprévisible Chris peut aussi être très très agacé par sa compagne et du coup la fin devient prévisible.

    Il ne reste plus au spectateur qu'à faire les paris sur qui va zigouiller l'autre !

  • DE L'AUTRE CÔTÉ DU PÉRIPH' de David Charhon **

    De l'autre côté du périph : affiche

    Ce film est tordant et je vous le recommande.

    C'est un peu court ? Et alors ! Il y a  peu de cinéma ici et une intrigue dont on finit par se foutre royalement. Car ce qui compte c'est le tandem, le duo, l'affrontement des deux show-men pour qui le réalisateur a concocté des répliques aux petits oignons. Laurent Lafitte et Omar Sy sont beaux, drôles et n'ont pas peur du ridicule. Ils sont branchés sur 2 000 volts, sont complémentaires et pourtant réglés sur le même tempo implacable  dans lequel chacun laisse toute la place à l'autre, chacun dans son registre. Banlieue contre XVIème arrondissement. Le rythme ne faiblit pas, les répliques fusent sans mollir. Du pur divertissement haut de gamme. Ce serait dommage de ne pas se laisser emporter !