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4 ** POURQUOI PAS ? - Page 37

  • LET MY PEOPLE GO de Mikael Buch **

    Let My People Go ! : photo Mikael Buch, Nicolas Maury

    Let My People Go ! : photo Amira Casar, Clément Sibony, Jean-François Stévenin, Mikael Buch

    Ruben vit son amour pour Teemu dans la béatitude la plus complète en Finlande jusqu'au jour où (pour une raison que je ne révèle pas tant elle est abracadabrantesque !) Teemu met son amant à la porte avec tous ses bagages. Sans logement et désespéré par cette rupture Ruben rentre en France la mort dans l'âme et retrouve sa famille juive, très juive. Dévasté par le chagrin, le pauvre Ruben a la poisse qui lui colle aux basques et en profite pour se poser des questions existentielles sur son homosexualité, sa famille, la place qu'il y occupe et sa judéité. Ruben a fort à faire car il est entouré d'une soeur dépressive qui a épousé un goy qu'elle voudrait quitter, d'un frère impulsif (aaah Clément Sibony ! si rare !!) toujours prêt à en découdre, d'un père infantile qui lui fait des confidences qu'il ne veut pas forcément entendre et d'une mère forcément abusive et envahissante !

    Malgré quelques scènes qui flirtent avec l'émotion (et l'adorable et très lunaire acteur Nicolas Maury peut se montrer aussi drôle que très très touchant) tout ceci est traité sur le ton de la farce qui parfois vire au grand n'importe quoi. Ce n'est pas méprisant ou péjoratif de dire que ce film ne sert à rien car il ne fait pas avancer le schmilblick mais il est drôle souvent bien qu'il empile les clichés sur les homosexuels et les juifs mais de façon tout à fait assumée et sans une once de perfidie manifestement.

    La partie finlandaise est kitsch à souhait et arbore des couleurs vives, flashy, sur-saturées qui ne sont pas sans rappeler Jacques Demy ou Pedro Almodovar. La comparaison s'arrête là car on a rarement vu un film avec si peu d'argument qui parvienne à maintenir l'attention jusqu'à son dénouement sirupeux. Les scènes et les personnages abondent et se succèdent sans véritable cohérence parfois mais permettent aux acteurs de composer dans le plus grand sérieux des numéros de clowns plutôt loufoques.

    Franchement, il serait malvenu de bouder ce petit plaisir.

  • FOOTNOTE de Joseph Cedar **

    Footnote : photo Joseph Cedar, Lior AshkenaziFootnote : photo Joseph Cedar, Shlomo Bar-AbaFootnote : photo Joseph Cedar, Lior Ashkenazi, Shlomo Bar-Aba

    Eliezer et Uriel Sholnik sont père et fils et tous les deux chercheurs philologues. En gros et pour faire simple, ils étudient le Talmud, ses origines, d'où il vient, où il va, pourquoi, comment et patin coufin ! Le père a consacré 40 ans de sa vie à cette recherche et alors qu'il atteint au but, un de ses confrères le coiffe au poteau, anéantissant cette somme de travail, et remporte à sa place le prestigieux Prix d'Israël qui couronne le meilleur de sa discipline. Aigri, boudeur et néanmoins convaincu d'être le meilleur, voire le seul, Eliezer développe aussi à l'encontre de son fils et de son travail une sorte de mépris car ce dernier est très considéré par ses collègues et étudiants. Un jour cependant, une bonne nouvelle arrive à Eliezer qui est désigné pour remporter le prix tant convoité. Sauf qu'il s'agit d'une erreur. Le prix est en fait destiné à Uriel qui dès lors fait des pieds et des mains pour que son père soit bel et bien l'impétrant. Vous suivez ? En fait, c'est très simple, mais je raconte mal.

    Etrange film, étrange thème et univers décalé. C'est le formidable "Beaufort" du même réalisateur et le merveilleux Lior Ashkenazi qui marcha sur l'eau un temps... qui m'ont attirée dans cette salle. Je ne le regrette pas car il y dans ce film bancal au moins une scène (très longue) qui vaut à elle seule le déplacement. A la fois burlesque (la pièce où elle se déroule est trop petite pour accueillir tous les participants qui se voient obligés de se lever, déplacer leurs chaises pour fermer la porte) et saisissante de tension, cette scène électrique qui finit en catastrophe est un bijou d'écriture, de suspens et d'interprétation.

    C'est d'ailleurs la caractéristique du film tout entier de mêler le comique et le dramatique. Hélas ils ne font pas toujours bon ménage. L'absurde est beaucoup plus convaincant que le drame (sauf dans la fameuse scène dont je parle ci-dessus), et il devient parfois difficile de suivre l'itinéraire de ce vieux chercheur renfrogné et taiseux, totalement misanthrope à qui le réalisateur accorde peu d'indulgence. Par ailleurs, l'acteur est le sosie incroyable de Michel Galabru (pas drôle) et l'on s'attend à tout instant à ce qu'il le devienne (drôle). Mais non. Autiste, silencieux et quasiment haineux dès qu'il ouvre la bouche, il m'est toujours difficile d'apprécier totalement un film dont le rôle principal est aussi antipathique.

    Mais il reste LA scène réellement parfaite et Lior Ashkenazi...

  • AMERICANO de Mathieu Demy **

    Americano : photo Mathieu Demy

    Americano : photo Mathieu DemyAmericano : photo Carlos Bardem, Mathieu Demy, Salma Hayek

    Si j'ai réussi à parler d'"Or noir" sans même prononcer "Lawrence d'Arabie", parler du premier film de Mathieu Demy sans évoquer Jacques et Agnès me paraît de l'ordre de la mission impossible. Voilà donc, c'est fait. Mathieu est le fils de Jacques et Agnès. Bon sang ne saurait mentir mais il faut néanmoins un sacré toupet, une sacrée dose d'inconscience ou un sacré talent pour dépasser un aussi lourd patrimoine. Mathieu réussit donc un film personnel et assez stylé qui ne ressemble ni au cinéma de maman ni à celui de papa mais qui en est pourtant totalement imprégné. En effet, dans les premières minutes, Mathieu qui s'appelle Martin tue sa mère... enfin, disons que Martin, alors qu'il est au lit avec sa femme Claire à Paris, reçoit un appel de Californie qui lui annonce la mort de maman. Tuer Agnès Varda, quel garnement ce Mathieu ! Le film sera donc parcouru d'extraits du film d'Agnès Varda dans lequel Mathieu jouait le rôle d'un enfant appelé Martin : "Documenteur".

    Martin se rend à Los Angelès pour rapatrier le corps de la défunte et vendre l'appartement dans lequel il avait vécu enfant avec sa mère avant de rentrer vivre avec son père (Jean-Pierre Mocky : FORMIDABLE !) en France. Il en veut à sa mère à qui il reproche de ne jamais s'être intéressée à lui. Sauf qu'à son arrivée dans l'appartement il retrouve tous les souvenirs qui le bouleversent et notamment une photo où il était avec sa mère et une petite Lola. Il part à la recherche de cette Lola (cf. "Lola", le premier film de papa) à Tijuana, ville mexicaine pleine de dangers où l'étranger n'est pas le bienvenu. Il la retrouve dans un bar où des filles s'effeuillent devant des clients libidineux qu'elles rejoignent ensuite dans des chambres cachées par un rideau derrière le comptoir. Lola est une pute au coeur d'artichaut qui économise pour une vie meilleure.

    La réalisation et les images sont soignées. Dès son arrivée à Tijuana, Martin se fait voler sa voiture qui contenait son passeport, son argent et toutes ses affaires. En moins de temps qu'il n'en faut pour le dire il se transforme en loser errant et hagard et le regard perdu et indolent de Mathieu Demy l'acteur, convient à merveille au personnage qui semble revenu de tout. Et Salma Hayek en Lola vaincue par la vie, porte au visage une éloquente balafre qui prouve qu'elle a dû morfler. J'ai aimé l'atmosphère poisseuse et inquiétante sous le soleil accablant du Mexique. Mais Mathieu peine un peu à tenir la distance et se prend un peu les pieds dans le tapis notamment en ratant complètement la relation de Martin et Claire restée à Paris, dénuée du moindre intérêt, et en répétant 3 ou 4 fois la même scène (oui Salma Hayek a un corps superbe) dans le club "Americano". Avec un quart d'heure de moins et en resserrant davantage son intrige autour de la recherche des traces de l'enfance, le film aurait gagné en cohérence et en intérêt.

    A suivre.

  • TWILIGHT : REVELATION 1ère Partie de Bill Condon **

    Twilight - Chapitre 4 : Révélation 1ère partie : photo Bill Condon, Kristen Stewart, Robert PattinsonTwilight - Chapitre 4 : Révélation 1ère partie : photo Bill Condon, Kristen Stewart, Robert Pattinson

    Twilight - Chapitre 4 : Révélation 1ère partie : photo Bill Condon, Kristen Stewart, Robert PattinsonTwilight - Chapitre 4 : Révélation 1ère partie : photo Bill Condon

     

    Après la Fascination, la Tentation, l'Hésitation voici le temps de la Révélation ! Le truc avec cette saga qui n'est pas si ancienne bien qu'on en soit déjà au 4ème volet c'est qu'à chaque épisode j'oublie complètement ce qui s'est passé dans le précédent. Je me souviens simplement que le premier m'avait fait l'effet d'une purge indigeste et sombre et qu'avec le temps je me suis attachée à cet enfariné d'Edward. J'en suis toujours à me demander ce qu'il trouve à sa Bella, toujours est-il que sitôt dans la salle j'étais propulsée en plein mariage. Et oui Edward épouse Bella et réciproquement. Edward est aux anges mais Bella soupire parce que Jacob n'est pas là. Pourquoi n'épouse t'elle pas Jacob ? Je ne comprends pas. A plusieurs reprises elle dit : "les choses ne sont parfaites que lorsque tu es là !" et ce n'est pas à Edward qu'elle s'adresse mais à Jacob. Elle pousse un peu non ? Jacob se meurt d'amour et veut protéger la belle parce qu'après la nuit de noces, elle va devenir vampire et plus rien ne sera comme avant.

     

    ATTENTION - WARNING - JE SPOILE A MORT

     

    Donc, les deux tourtereaux s'en vont en lune de miel dans une île déserte au large de Rio et la nuit de noces SE PASSE HORS CHAMPS, si c'est pas malheureux. En tout cas, c'est un feu d'artifice qui met la chambre sens dessus dessous. Edward est tellement énervé qu'il casse le plumard, Bella dit "c'est rien". Et le matin, quand elle se regarde dans la glace, elle est rayonnante comme Scarlett O'Hara quand Rett Butler... mais bon, on s'égare. D'ailleurs elle passe beaucoup de temps devant le miroir à observer le moindre changement. Manifestement y'a pas.

     

    Apparemment, ou j'ai rien compris, ils ont fait crac boum hue mais elle n'est pas devenue vampire. Ed a tout under control ou presque... parce qu'en découvrant les épaules de la Bella, ils s'aperçoivent qu'il a un peu dû la boxer pendant le chahut. Elle a aimé ça, mais Edward n'est pas le genre qui colle des marrons aux filles donc à partir de là c'est : CEINTURE. Sauf que la Bella a hyper chaud alors Ed la calme en lui apprenant à jouer aux échecs au bord de la mer. En deux semaines, elle le met KO aux échecs mais elle s'ennuie copieux. Au bout de 14 jours, elle vomit... elle est enceinte. La chose gigote et se développe à la vitesse du grand V. Edward est confus, honteux et demande à Bella de ne pas garder le truc. Sauf qu'en même temps que son ventre lui est poussé un instinct maternel comac et elle aime son bébé ! L'accouchement est une boucherie, c'est rien de le dire et juste avant elle aura appris à boire du sang à la paille pour nourrir le bébé in utero et elle aimera ça. Bella meurt dans d'atroces souffrances... euh, dans un sourire radieux. Enfin, j'ai déjà oublié...
    Sauf que...

     

    C'est quand la suite déjà ?

     

    Oui, j'ai bien aimé. C'est mon côté fleur bleue et comme il s'agit d'un épisode intermédiaire hyper romantique qui s'étire sans qu'il se passe grand chose (sauf dans le dernier quart d'heure)... ça ressemble plus à une comédie sentimentale qu'à une vampirologie. C'est plus lumineux et plus festif que les autres épisodes et les deux tourtereaux ont enfin l'air de prendre du bon temps. On est contents pour eux. Evidemment j'ai encore et toujours l'impression que Bella Christen (qui joue très très mal) n'aime pas Edward, qu'elle préfère Jacob, et qu'elle va lui en faire baver des ronds de chapeau. Par contre, Edward Patt est vraiment très bien je trouve.

     


    Ah oui, il faut regarder le générique parce qu'on constate que le vampire est allergique aux fautes d'orthographe. Mais je suis à peu près la seule à le savoir puisque tout le monde se tire avant...

     

    Bon,  je vais me relire pour pas énerver les Cullen.

  • LE CHAT POTTE de Chris Miller II **

    Le Chat Potté : photo Chris Miller (II)Le Chat Potté : photo Chris Miller (II)Le Chat Potté : photo Chris Miller (II)

    Il paraît que le personnage du Chat Potté a tellement plu lorsqu'il est apparu dans un des derniers épisodes de Shrek qu'il a désormais droit à ses propres aventures. Ici donc, l'hidalgo félin dont on nous conte l'enfance et les prouesses de jeunesse, part à la recherche de l'Oie aux Oeufs d'Or qui menace de détuire la ville où Potté a grandi si elle ne retrouve pas son poussin !!! En chemin il retrouve son ami d'enfance Humpty Dumpty et rencontre une minette tout ce qu'il y a de moins farouche, l'adorable Kitty.

    Je ne nierai pas que le scenario est un tantinet lourdingue et que les divers rebondissements n'ont rien de palpitant mais lorque le Minou fait les yeux doux, on craque, quand il drague la minette aussi et lorsqu'ils entament une battle dance, c'est la folie. En outre, c'est vraiment très joli et tant que j'en ai encore la possibilité j'ai pu choisir la 2D.

    Il paraît que ce film est conseillé à partir de 6 ans, sauf que moi, j'y suis allée avec ma surdouée chérie d'amour de 2 ans 8 mois et 1 jour et qu'elle a adoré. J'avais promis de l'emmener pour la première fois au cinéma pour ses 3 ans mais elle est tellement géniale ouverte et curieuse, qu'elle parle couramment le français à l'endroit et à l'envers, et le chat aussi, que je n'ai pas eu la patience d'attendre. Et je n'ai pas regretté. Elle n'a pas bougé. Elle a ri aux éclats, elle a sursauté, elle a dit "il est pas gentil lui"... et tout et tout. Le spectacle était donc pour moi davantage à ma gauche que sur l'écran. Sans doute n'a t'elle pas bien compris la subtilité de cette recherche de haricots magiques, mais moi non plus, alors !

    le chat potte de chris miller iile chat potte de chris miller ii

  • THE LADY de Luc Besson **

    The Lady : photo Luc Besson, Michelle YeohThe Lady : photo Luc Besson, Michelle Yeoh

    The Lady : photo Luc Besson, Michelle Yeoh

    En 1947 le général Aung San est assassiné quelques semaines avant l'indépendance de la Birmanie dont il était pourtant l'instigateur. Depuis, le pouvoir est aux mains de la junte militaire et les dictatures militaires parmi les pires au monde se succèdent dans le pays. En 1988 sa fille Suu Kyi qui vit en Angleterre avec son mari et ses deux enfants revient pour rendre visite à sa mère. Alors que des manifestations populaires contre le pouvoir se multiplient, la jeune femme constate que son père considéré comme un martyr est toujours célébré. Bénéficiant et profitant de cette popularité, elle crée la Ligue Nationale pour la Démocratie et participe aux élections qu'elle remporte haut la main (392 voix contre 10). Mais les généraux annulent les élections, arrêtent Aung San Suu Kyi et l'assignent à résidence. Cet emprisonnement durera jusqu'en novembre 2011. Pendant ces années, elle ne reverra son mari que 5 fois et ses enfants encore moins. Lorsque son mari atteint d'un cancer en phase terminale tente de la rejoindre, le visa lui est refusé. Les militaires proposent à Suu Kyi de se rendre au chevet de son mari, ce qu'elle refuse, sachant qu'elle ne pourrait alors plus jamais rentrer dans son pays.

    Voilà pour l'histoire vite résumée de cette femme admirable qui continue le combat au delà de ses 20 années de détention et malgré toutes les épreuves personnelles qu'elle a endurées. Elle milite pour une démocratie et que soient respectés les droits de l'homme dans son pays où les militaires n'hésitent pas à tirer sur les manifestants, souvent des étudiants voire des moines. Influencée par la non violence de Gandhi, elle fera face sans ciller aux armes des militaires pointées sur elle. Elle est considérée comme le Nelson Mandela féminin.

    S'il n'y avait qu'un mot à dire ce serait : déception. Luc Besson passe complètement à côté de ce sujet. Et même si l'on considère qu'il met en retrait le côté politique pour mettre en lumière l'histoire d'amour avec son mari, ou l'histoire familiale. Rien ne nous atteint. A aucun moment on ne ressent la brutalité de la situation de cette femme séparée des siens et empêchée d'agir. Il est évident qu'elle est une personne hors du commun, capable d'endurer cela et de sortir son plus radieux sourire lors de ces interventions, mais jamais on éprouve le poids du silence, de la solitude qui doit peser sur elle pendant ces interminables années. On ne sait rien de son évolution politique, de ce qu'elle entend faire passer comme message excepté son désir de faire respecter les droits de l'homme, de la façon dont elle compte s'y prendre. On dirait qu'en ne voulant pas en faire trop, le réalisateur n'en fait finalement pas assez. Et du coup son film manque d'ampleur, de lyrisme. On en ressort ni révolté ni ému et c'est particulièrement désagréable quand on sent combien cette femme est exceptionnelle.

    Et puis il y a David Thewlis qui manque à un point inimaginable de charisme et qui avait mal accroché sa perruque et les deux fils, deux dadais qui n'ont rien d'autre à dire que "elle me manque" et qui poussent un ouf de soulagement lorsque leur tante vient leur faire à manger... leur père se révélant incapable de cuire des fish and chips !

    Par contre, rien à dire de la composition de Michelle Yeoh investie jusqu'à l'âme dans ce rôle. Fluette et digne, elle incarne à la perfection la distinction et la volonté d'Aung San Suu Kyi. Hélas elle est bien seule pour tenter de sauver le naufrage d'un film qui ne décolle jamais.

  • CURLING de Denis Côté **

     Curling : photo Philomène Bilodeau

    Curling : photoCurling : photo Philomène Bilodeau

    Jean-François se méfie de tout et de tous, c'est ainsi que vivant seul dans un endroit très reculé avec sa fille de 12 ans Julyvonne, il ne lui a jamais permis de fréquenter l'école. Il cumule deux emplois dans un bowling et dans un motel et lorsqu'il part au travail il laisse la petite seule toute la journée. Elle se promène longuement en forêt et y fait d'étranges découvertes et rencontres, un tigre, quatre cadavres. Elle manifeste de plus en plus le désir d'entrer en contact avec l'extérieur, ce que son père lui refuse. Mais lorsque lui aussi va faire une macabre découverte et s'apercevoir par ailleurs qu'il n'est pas apte à éduquer sa fille et qu'elle a un énorme retard affectif et scolaire, il va enfin se décider à réagir. Etrangement d'abord...

    La première heure est saisissante et passionnante. Le moindre personnage de ce film semble détenir et cacher des secrets. Des plans impressionnants comme celui où Jean-François et Julyvonne sont interrogés par un flic alors qu'ils marchent en plein blizzard démontrent un talent phénoménal de filmeur. La neige où l'on peut laisser tant de traces qui finalement sont effacées comme elle étouffe les bruits participe à l'ambiance mystérieuse. L'attitude des personnages souvent insaisissable permet au spectateur de laisser libre court à toute interprétation et l'imagination est fortement convoquée ici. On tremble pour la petite en soupçonnant le pire... Et l'interprétation est à la hauteur des mystères.

    Hélas, à force d'ellipses, de silence et de secrets, le réalisateur abandonne ses spectateurs et ses personnages au bord de la route. Evidemment, on se doute qu'il a dû se passer d'étranges choses dans le charmant motel perdu au milieu de la toundra canadienne et que les gentils papys et mamys qui jouent au curling ont peut-être un peu de sang sur les mains. Mais n'est-ce pas simplement le fruit de l'imagination fertile du cinéphile qui a vu beaucoup de films ? Pourquoi la maman de la petite est-elle en prison, et pour combien de temps ? Pourquoi cet homme est-il si inquiet ? Que fait le tigre dans la prairie ? etc, etc. Dommage.

  • L'OR NOIR de Jean-Jacques Annaud **

    Or Noir : photo Jean-Jacques AnnaudOr Noir : photo Jean-Jacques AnnaudOr Noir : photo Jean-Jacques Annaud

    Pour conclure un pacte réciproque de paix entre leurs peuples, le Roi Amar confie ses deux fils encore enfants au Roi Nessib qui promet de les élever comme ses propres enfants. Le plus jeune, Auda est un enfant, puis un adolescent cultivé, avide d'érudition, constamment plongé dans les livres. Cet étrange et cruel gage d'armistice est remis en cause une dizaine d'années plus tard lorsque des américains découvrent que le désert aride qui sépare les deux tribus regorge de pétrole. Alors que le Roi Amar est plutôt conservateur et ne jure que par des valeurs telles que le courage, l'honneur, le respect des traditions et de la famille, Nessib, résolument tourné vers la modernité et l'Occident comprend immédiatement quelle mane recèle ce précieux Or Noir. Fourbe et opportuniste, Nessib n'hésite pas à rompre l'ancienne alliance, à se servir de sa fille adorée Leyla qui aime Auda (le plus jeune fils d'Amar) depuis l'enfance et à provoquer quelques sacrifices par pur appât du gain.

    Jean-Jacques Annaud situe sa belle histoire à la fois cruelle et optimiste dans un pays arabe imaginaire des années 30. Isolées du reste du monde par de grandes murailles et un désert de sable pour tout horizon les tribus se voient brusquement envahies par le monde moderne par le biais d'avions, de mitrailleuses et d'automobiles. L'une considèrera cela comme des malédictions et des offenses à l'Islam, l'autre au contraire y verra le moyen de s'enrichir et d'intégrer la modernité. C'est évidemment et hélas la guerre qui permettra de résoudre les différends.

    Je trouve le pari plutôt audacieux de la part du réalisateur de raconter cette épopée pleine de bruit, de fureur, de trahisons et d'amour en y intégrant cet élément éminemment central, moderne voire essentiel de notre monde qui fout le camp : le pétrole. Quelle révolution ce dût être lorsque le désert s'est trouvé peu à peu envahi par ces étranges constructions que sont les puits de pétrole, sous le regard étonné des caravanes de bédouins qui observaient nonchalemment cela de loin ! Et je ne vois pas de film qui ait évoqué ce bouleversement majeur. Mais cet arrière plan (légèrement) politique n'est que le prétexte à une fresque comme on n'en a pas vue depuis bien longtemps au cinéma et où les personnages vont se trouver confronter à des choix, des décisions majeurs et par conséquent évoluer, devoir choisir leur camp, aller à l'encontre de leur tempérament et de leurs convictions parfois. Ainsi lorsque le jeune Prince Auda, pacifiste et doux va devoir, contraint et forcé prendre les armes, son frère Ali lui dira : "c'est étonnant ce que tu es devenu, mais le plus étonnant c'est que tu es infiniment doué pour cela !"

    Quelques scènes de combats où évoluent des centaines de figurants et quelques explosions assurent le spectacle. Mais on se laisse également emporté par les échanges lors des moments beaucoup plus intimes. Le réalisateur n'élude pas l'éternel problème de l'interprétation du Coran dont les hommes lui font dire tout et son contraire et commettre bien des horreurs au nom d'Allah, pas plus que le sort des femmes cloîtrées bien jeunes derrière les moucharabieh et ne pouvant plus apparaître en public que voilées de noir de la tête aux pieds.

    Avec la beauté envoûtante du désert, son étendue incertaine, le mystère qu'il semble détenir Jean-Jacques Annaud réussit des images d'une force inouïe auxquelles s'ajoutent des costumes aux étoffes, aux drapés et aux couleurs absolument somptueux.

    Quant au casting international, c'est également un pur bonheur, même si Tahar Rahim soit le seul acteur d'origine arabe. Antonio Banderas l'espagnol et Mark Strong l'anglais composent de savoureux et tout à fait crédibles rois arabes et portent le khôl à la perfection. L'indienne Freida Pinto est une bien belle princesse des mille et une nuits. Et l'anglo-pakistanais Riz Ahmed en médecin et frère d'Auda tient l'un des personnages le plus touchant du film et le seul qui apporte légereté et humour.

    Mais surtout, sous le chèche, on retrouve le merveilleux, le désormais indispensable Tahar Rahim qui retrouve ici un rôle à la mesure de son phénoménal talent. Il peut être un adolescent intellectuel et se métamorphoser en chef de guerre meneur d'hommes. Et ce n'est pas uniquement le fait de passer de glâbre à barbu qui le rend crédible mais bien tout dans ses regards, ses attitudes et sa démarche qui le font passer du stade d'enfant à celui d'homme. Encore une de ces interprétations admirable.

    Si vous souhaitez en savoir plus sur ce film, je vous recommande l'interview de Jean-Jacques Annaud et Tahar Rahim à laquelle a participé Sandra. Un plan séquence de 54 minutes avec quelques moments d'anthologie.

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    NB. : j'ai réussi à parler d'Or Noir sans même mentionner "Lawrence d'Arabie"... je m'en félicite ! 

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    P.S. : si vous hésitez ce week end, n'hésitez plus, allez voir le film de Mélanie Laurent "Les adoptés" *** dont j'essairai de vous parler au plus vite. C'est un beau film, très doux et très triste.