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2 **** INDISPENSABLE - Page 57

  • TROIS ENTERREMENTS de Tommy Lee Jones****

     trois enterrements -

     

    Pour ceux qui ont raté cette merveille à sa sortie, il reste la séance de rattrapage en DVD. N’hésitez pas, car Tommy Lee Jones a réussi là un coup de maître. On connaissait l’acteur marmoréen, on découvre le réalisateur engagé et amoureux fou de son pays.

    Mike Norton (absolument génial Barry Pepper), garde frontière macho et bas de plafond (pléonasme ?) tue accidentellement Melquiades Estrada, méxicain clandestin devenu « cow-boy » et ami de Pete (magnifique Tommy Lee Jones) son contremaître. Devant la mollesse des autorités locales à mener l’enquête, Pete va s’en charger lui-même et offrir à son ami un enterrement digne tel qu'il le lui avait promis. Il va retrouver l’assassin et le mener, à coup de crosse parfois, vers la rédemption.

    Tout ici est absolument et simplement sublime. Au-delà des paysages grandioses qui coupent le souffle, voir un homme, très con, en chemin vers la lumière, se redresser, au prix de souffrances physiques et psychologiques certes, découvrir des valeurs modestes et pourtant fondamentales telles que l’amitié, le partage, l’entraide, le respect de la parole donnée est bouleversant. Ce voyage initiatique qui aboutit à la compréhension, à la tolérance et au pardon est un uppercut qui atteint en plein cœur. On n’oublie plus jamais ce nom : Melquiades Estrada dès qu’on a vu ce western passionnant à la fois classique, singulier et déroutant qui tire les larmes. Bien que cette histoire soit poignante, cruelle et passionnante, Tommy Lee Jones n’oublie pas de distiller l’humour avec finesse et on rit franchement à plusieurs reprises, sans oublier une scène presque onirique où une petite fille joue Chopin au milieu de nulle part sur un piano désacordé : magique. Il brosse également deux beaux portraits de femmes, magnifiques, délaissées qui prennent leur destin en main.

    Quant à l’interprétation, je l’ai dit, elle est d’une subtilité, d’une intensité et d’une justesse exceptionnelles.

     Un chef d’œuvre !

  • La flûte enchantée de Kenneth Branagh****


    Combien de fois êtes-vous sortis d’une salle de cinéma avec un sourire banane d’une oreille à l’autre cette année ? Moi, c’était aujourd’hui. J’étais étourdie et ravie.
    Après avoir revisité (avec bonheur) Shakespeare, Kenneth Branagh avec Shikaneder et Stephen Fry au livret, James Conlon à la baguette, déplace l’intrigue de « La Flûte enchantée » de Mozart pendant une guerre de tranchées. Tamino, soldat blessé à la recherche de la paix et de l’amour est sauvé par trois infirmières. Elles le conduisent à la Reine de La Nuit, belle femme déchirée depuis l’enlèvement de sa fille par le monstre Sarastro. Elle confie à Tamino et à Papageno l’oiseleur, la mission de retrouver Pamina. Or, dans cette histoire les gentils et les méchants ne sont pas ceux qu’on croit.
    Laissez-vous embarquer par la féerie et le tourbillon où l’humour et l’émotion ne sont pas absents. C’est virtuose et cinématographique. Les chanteurs sont vraiment acteurs (mention spéciale à René Pape, charismatique et étonnant Sarastro) et maîtrisent parfaitement le play-back. On rit, on chante, on s’amuse, on tremble, on pleure, on danse avec un bonheur communicatif et les « tubes » s’enchaînent avec un plaisir constamment renouvelé. La rencontre de Tamino et Pamina rappelle celle de Tony et Maria dans « West Side Story ». Tout est excessif et démesuré et c’est enthousiasmant d’entrer dans la folie de Kenneth Branagh qui rend cette épopée pleine de rebondissements, inventive et originale. Quant à la musique !!! Les mots à employer ne seront jamais suffisants mais on la savoure jusqu’à la dernière note de la dernière page du générique.
    Un film qui dit : « L’humanité aspire à la paix : Deux jeunes gens qui s'aiment parviendront-ils à influer sur le sort des nations et la vie de millions d'êtres humains ? »… c’est naïf, c’est utopique mais pendant deux heures c’est bon d’y croire.

  • Les infiltrés de Martin Scorcese****

    Bill et Colin sortent brillamment diplômés de l’école pour intégrer la prestigieuse Police d’Etat. Ils ne se connaissent pas mais tous les deux sont des taupes, des rats, des infiltrés. Bill (Léo) doit infiltrer le gang du parrain Franck Costello que la police souhaite éliminer, tandis que Colin (Mat), protégé dudit parrain, infiltre la police !

    Les deux hommes sont non seulement contraints de mener une double vie, mais aussi chargés de traquer le parrain, puis surtout de découvrir le traître caché dans leur propre camp et enfin de se traquer eux-mêmes !

    C’est simple, époustouflant, démoniaque et brillant !

    Inspiré du récent, magistral, hong-kongais et machiavélique « Infernal Affairs » de Andrew Lau (à voir ou à revoir), Martin Scorcese n’en tire pas un banal remake mais bien plus, il le restitue quasiment plan par plan ce qui me paraît être le plus bel hommage qui soit. Il est immense dans cet exercice. Pour réaliser ce divertissement violent, cruel et fascinant, Scorcese quitte New-York et Little Italy pour sonder les abysses de la pègre irlandaise de Boston.

    Si Matt Damon, trop lisse à mon avis, manque d’ambiguïté, Martin Sheen, Mark Whalberg et Alec Baldwyn composent des policiers à la fois antinomiques et complémentaires. Ils sont parfaits. A la tête du réseau de mafieux/malades, le plus « coucou » d’entre tous : le Grand Jack, le Big Nicholson qui "Jacknicholsonise" ce rôle en or brut taillé pour sa carrure et son visage de possédé. Il cabotine avec tant de maestria qu’on en redemande, on sait que c’est totalement maîtrisé.

    La surprise vient évidemment de Leonardo di Caprio, tout simplement magnifique dans ce rôle torturé qu’il porte avec une intensité bouleversante. La phrase marquante lui est adressée : « votre vulnérabilité me fait vraiment flipper ». Et c’est vrai qu’il incarne cette vulnérabilité avec beaucoup de puissance. Il est touchant et émouvant comme il ne l’a jamais été, perdu, inquiet puis terrifié.

    Au-delà du banal polar, ce film allie action et réflexion et on y trouve également la quête improbable du père qui manque tant et la recherche de sa propre identité.

    Scorcese, incapable de laisser impunis les responsables des souffrances physiques et morales infligées à Léo nous propose une fin différente (et bienvenue) de l’original pour venger son nouveau protégé (depuis trois films déjà). 

  • BABEL de Alejandro Gonzales Inarritu ****

     

     

    Un peu d’histoire pour commencer et comprendre : « La tour de Babel était selon la Genèse une tour que souhaitaient construire les hommes pour atteindre le ciel. Ces hommes étaient alors les descendants de Noé, ils représentaient donc l'humanité entière et parlaient tous la même et unique langue sur Terre. Pour contrecarrer leur projet, Dieu multiplia les langues afin que les hommes ne se comprennent plus… » No comment, c’est signé Dieu : pas de surprise !

    Venons en au film.

    Un couple de touristes américains plein de chagrin au Maroc, un coup de feu en plein désert, une nourrice en situation irrégulière, deux enfants blonds perdus dans le désert mexicain, une adolescente japonaise sourde et rebelle… Qu’est-ce qui relie ces trois continents, ces quelques destins ? Qu’est-ce qui les sépare ?

     

    La douleur, l’isolement, l’incompréhension !

     

    A l’heure d’Internet et des moyens de communication en tout genre qui permettent à l’information (souvent déformée…) de circuler quasiment instantanément, Inarritu nous démontre de façon implacable que la barrière de la langue, de la culture peut être insurmontable, que les a priori et lieux communs ont la vie dure. Que ceux qui n’entendent pas ne sont pas forcément sourds, que personne n’écoute personne et se comprend encore moins.

     

    La démonstration est efficace, féroce et accablante. C’est beau et virtuose car c’est aussi un film qui n’abandonne pas son spectateur en chemin bien qu’il franchisse les continents. C’est une œuvre triste et belle et aussi pleine d’espoir car au-delà des chocs, des blessures et des chagrins insurmontables, chacun découvre que l’autre lui est indispensable et combien il l’aime.

     

    Cadeau supplémentaire : un grand et beau Brad Pitt, tout en rides et tempes grisonnantes et admirablement dirigé. C’est beau un acteur qui grandit en vieillissant et réciproquement.

    Une vision ne semble pas suffisante pour intégrer toute la portée de ce film douloureux qui crie ou chuchote son désespoir, chaotique, virtuose et perturbant.

    Pouh !

     

    babel -

     

  • INDIGENES de Rachid Bouchareb ****

     

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    - « Ne les appelez pas les indigènes, mon capitaine !

    - Ben, les musulmans alors ?

    - Non, ils n’aiment pas non plus.

    - On doit les appeler comment alors ?

    - Les Hommes mon capitaine !!! ».

    Il y a toujours des scènes ou des répliques chocs dans les films. Ce film est un choc à lui tout seul. Des « africains » se sont engagés pour libérer la France, ici, Rachid Bouchareb s’intéresse aux algériens et aux marocains qui viennent pour la première fois fouler le sol de la « mère patrie », chanter « La Marseillaise » et libérer la France du nazisme. Le périple commence en Italie, se poursuit en Provence pour se terminer dans les Vosges puis en Alsace où quatre hommes résistent en attendant l’arrivée de la troupe… Quatre hommes dans la tourmente, transformés en « chair à canon » destinés à monter à l’assaut en première ligne ! Des hommes qu’on a utilisés, à qui on a menti et qu’on a oubliés.

    Vive la France !

    Rachid Bouchareb souhaite simplement que justice leur soit rendue en leur donnant une place dans les livres d’histoire, c’est peu, c’est énorme. Rendons dès à présent au moins hommage à son très très beau film, vibrant et bouleversant, qui alterne les scènes de bravoure militaire et les moments intimes. Mais ici, une fois encore, les soldats ne meurent pas dans des ralentis esthétisants et déplacés. Les hommes même s’ils sont solidaires et fraternels ne sont pas en colonie de vacances, comme parfois dans certains films, où entre deux combats, ils semblent être dans une fête entre potes. La guerre pue, les hommes crèvent de trouille, le temps s’étire, les injustices pleuvent (permissions pour les « métropolitains » et pas pour les « indigènes » par exemple…). Pratiquement deux ans à libérer un pays qui les ignorera, les rejettera, alors qu’ils se demandent parfois : « qu’est-ce qu’on fout ici mon capitaine ? ».

    Le film est beau, intense, puissant et la dernière demi-heure, beaucoup plus romanesque et spectaculaire est déchirante et bouleversante. Le tout dernier plan, douloureux et poignant vous laisse effondré dans votre fauteuil. Une fois encore, le public ne s’y trompe pas, qui ne peut manifester son adhésion qu’en applaudissant.

    Que dire des interprètes, sinon que Wong Kar Wai et son jury ne se sont pas trompés non plus à Cannes, même si Sami Bouajila me semble dominer cette interprétation sans faille. Il faut dire que son rôle est magnifique, et il est époustouflant d’énergie et d’obstination tranquilles ! De Samy Nacéri se dégage une force intérieure inouïe, une rage contenue impressionnante. Roschdy Zem, à la fois calme et tendu est une sorte de colosse tendre et fragile. Jamel Debbouze fait parler ses yeux comme jamais, prêt à tout pour être aimé et reconnu. Bernard Blancan, déchiré, à la fois brusque et humain est parfait.

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    Une histoire oubliée, voire méconnue, racontée par des acteurs impliqués, concernés, véritablement « habités »…

    faites-leur un triomphe car le film est magnifique !

  • MARIE-ANTOINETTE

    de Sofia Coppola****

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    Sofia, Marie-Antoinette, Kirsten ??? Trois éternelles adolescentes «fashion victims» qu’on attend systématiquement au tournant, à qui on en demande toujours plus, à qui on ne pardonne jamais rien. Pourquoi ??? Voilà les questions que l’on se pose avant d’entrer dans la salle et dont on n’a que faire en sortant. Pourquoi ??? Parce qu’on a vu un film, un vrai.

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