Capitalism : a love story de Michael Moore***
Le monde ne va pas bien. Ce qui tourne le moins rond c’est ce décalage, cet écart, ce goufre d'injustice entre les riches qui le sont très et les pauvres qui le sont encore plus. C'est élémentaire, simple voire simpliste comme raisonnement mais un peu de pédagogie ne fait pas de tort et Michaël Moore s'y prend toujours aussi bien pour expliquer les choses. Car oui, je fais partie de ces naïfs qui continuent de penser que des gens comme Michaël Moore et ses films sont indispensables et que nous ne risquons pas grand chose à nous faire secouer le cocotier de temps à autre.
Il pourrait se contenter de faire des films. Il en a le talent, car ses documentaires sont de véritables films avec une dramaturgie, de l'humour, de la colère et de l'indignation.
Comme je vis avec un garçon qui pendant des années m'a dit quasi quotidiennement "Chirac, il va aller en prison !" et qu'aujourd'hui son discours est "ça va péter un jour, ça va péter ! Il faut que ça pète"... je lui laisse le clavier pour vous parler de ce film.
"La lutte des classes continue, mais ce sont les riches qui l’emportent, c’est inacceptable".
Depuis vingt ans Michael Moore promène sa caméra pour saisir des instantanés qui doivent nous amener à réfléchir, mais surtout à agir. Parce qu’il en a un peu marre Michael que rien ne bouge et surtout de s'agiter tout seul.
Le film s’ouvre sur des images de péplum retraçant la chute de l’empire romain. Les commentaires établissent le parallèle entre le passé et le présent de l’empire américain, pour ensuite retracer la naissance, l’age d’or, les dérives, les petits arrangements entre amis du pouvoir et de la finance et le déclin du capitalisme.
L’utilisation d’exemples concrets et précis nous permet de comprendre les rouages machiavéliques qui ont permis à ce système d’arriver au bord du gouffre.
Depuis plus d’un an, nous entendons parler d’emprunts toxiques et de produits dérivés. Qu'est-ce qu'un produit dérivé? Deux financiers, tentent de nous expliquer, en vain, le mode de fonctionnement de cette usine à gaz. A l’écran, il semble qu’ils ne comprennent, eux mêmes, pas très bien comment ça marche.
L’illustration est donnée par la détresse digne d’un couple, dont la maison, payée depuis vingt ans est saisie par la banque. Tout s'enchaîne mécaniquement pour en arriver à l'expulsion : accident du travail, absence de protection, crédit à taux progressif pour vivre, saisie de la maison.
La philosophie de ce système est marche ou crève. Admettons. Alors, pourquoi le système bancaire américain n’est il pas mort l’année dernière, comme l’avait décidé le congrès lors d’un premier vote ? Pressions sur les membres du congrès, prêts à taux dérisoires accordés aux politiques ont eu raison de la fronde.
Pour marquer les esprits au pays du « god bless you » Moore utilise même l’argument ultime de la condamnation du système par les représentants de Dieu, et illustre les dérives du « let’s make money » par l’exemple des plus grosses firmes et banques qui assurent leurs employés sur la vie en se mettant bénéficiaires des primes en cas de décès de l’employé.
La solution se trouve peut être du côté de la démocratie. Avec l’exemple de cette entreprise qui appartient à part égale à tous les employés, où les salaires sont tous équivalents, et où toutes les décisions sont prises à mains levées par tous (oui, il y en a une aux states).
En conclusion, Michael Moore regrette que Roosevelt, mort trop tôt, n’ait pas eu le temps de faire voter un amendement à la constitution qui aurait rapproché le système américain du système européen ou japonais. C’est vrai que ce n’est pas chez nous que l’on verrait une telle collusion entre les banquiers, les grands industriels, et le pouvoir politique...