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Cinéma - Page 303

  • J'ai bien compris

    votre manège ! Ce qui vous fait réagir, ce sont les jeux et les films...que je n'aime pas. D'accord ! Reçu cinq sur cinq.

    C'est un véritable désert de sorties en salle ces derniers temps. Je crois que j'ai vu tout ce que j'avais envie de voir. D'autres films qui me tentaient énormément ne sont pas (ou pas encore) sortis chez moi comme "A swedish love story" par exemple. Par contre, inutile d'insister, même sous la torture je n'irai voir ni "Super héros movie", ni "48 heures par jour", ni "Sex and the city" ni "Skate or die", ni "Les ruines", ni "Hannah Montana", ni "Sans Sarah rien ne va" et sans doute pas "Speed racer" (malgré la présence d'Emile Hirsch...). Et de mémoire de cinéphile je ne me souviens pas avoir eu une telle liste de films pour lesquels je n'ai absolument pas envie de me déplacer... Moche !

    Comme il risque de ne pas y avoir de films en vedette sur ce blog avant quelques jours et que je commence à vous connaître, je vais vous proposer un jeu très très moyennement cinématographique, (mais je suis chez moi je fais ce que je veux) mais après tout pourquoi pas. En fait, hier, malgré tout je me suis "fait une toile" et même plusieurs... Vous allez comprendre. Je suis allée au Musée. Ah qu'est est drôle !!!

    Souvenez-vous, dans le film de Philippe Claudel "Il y a longtemps que je t'aime" il y a ce plan où Machin montre quelque chose à Machine...

    Il y a longtemps que je t'aime - Kristin Scott Thomas et Laurent Grévill
    et nous pauvres couillons de spectateurs on ne nous le montre pas. Gros malin Philippe Claudel, mais moi hier, j'ai trouvé. Voilà ce que Kristin et Laurent regardent :  
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    Bon d'accord, vous ne voyez rien de là-haut mais c'est un tableau de Manet.
    J'ai aussi découvert ceci :
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    et ce joli garçon, c'est Louis-Simon Leborne (peint par Nicolas Van Gorp) et qui est un des meilleurs acteurs de son temps et fut aussi directeur du théâtre de l'Odéon en 1820 et 1821. Etonnant non ?
    A présent, c'est à vous de bosser.
    Il vous suffit de trouver le titre de l'oeuvre et le nom du peintre que je vous présente ci-dessous et que j'ai vu dans ce magnifique musée :
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    LA TOUSSAINT D'EMILE FRIANT
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    LA FEMME BLONDE DE MODIGLIANI
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    ... DE MAURICE UTRILLO
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    5
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    ... DE PICASSO
    Il y avait aussi cette chose assez fascinante... en fait, il s'agit d'une pièce où il faut s'enfermer seul (moi évidemment j'ai eu le vertige) et dont l'explication m'a paru pompeuse et fumeuse (comme souvent dès qu'il s'agit d'art contemporain)
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    En sortant du musée, j'ai cru qu'il y avait une émeute sur la place blanche souvent si calme... Une foule devenant de plus en plus compacte s'amassait sous les balcons de l'Hôtel de Ville. Devant les costumes étranges revêtus par les participants de ce qui commençait à ressembler de plus en plus à une fête... j'ai compris que cette joyeuse cohue était venue accueillir et acclamer les nouveaux héros : LES CHAMPIONS DE FRANCE de basket. Hors il se trouve que dans le "staff" (c'est comme ça qu'ils disent... j'y peux rien !) médical de cette équipe, il y a la chair de la chair de mon sang (devinez lequel ?). 
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    C'était une fête euphorique qui a duré jusqu'au bout de la nuit...
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  • Les insoumis de Claude-Michel Rome **

     

    Les Insoumis - Richard Berry, Bernard Blancan, Moussa Maaskri, Pascal Elbé et Aïssa Maïga
    Les Insoumis - Bernard Blancan, Moussa Maaskri, Pascal Elbé et Aïssa Maïga
    Les Insoumis - Bernard Blancan, Moussa Maaskri, Pascal Elbé et Aïssa Maïga

    Le Capitaine Vincent Drieu, flic surdoué mais brisé par un drame personnel et professionnel est volontairement muté dans un commissariat pourri près de l’étang de Berre. Il se retrouve face à une équipe démotivée, menée par une femme, commissaire, enceinte et qui ne demande qu’une chose à ses collaborateurs, qu’ils ne fassent pas de vague en attendant la démolition du commissariat prévue pour dans trois mois. C’est compter sans Drieu, cow-boy incorruptible qui entend bien ne plus laisser la mafia locale mener la ville.

    On ne peut nier que la première scène lorgne du côté de « Heat » avec l’attaque d’un fourgon qui emmène un prisonnier au tribunal. C’est nerveux, violent, radical, pyrotechnique et percutant. La suite sera (parfois) plus calme mais réservera quand même de belles surprises mouvementées et notamment la longue scène finale où tous les membres du commissariat sont obligés de s’enfermer pour résister à l’attaque d’une véritable troupe surarmée. Avant d’en arriver au dénouement qui hélas est complètement aberrant et bâclé, il convient de ne pas bouder son plaisir devant un film ambitieux et efficace.

    La partie qui évoque la vie du commissariat est particulièrement réussie. D’une part par son environnement, autour de l’Etang de Berre, le paysage est assez apocalyptique et donne un sens à cet espace de non-droit sinistré. Elle permet d’autre part à de beaux personnages de prendre vie bien qu’ils soient assez nombreux et aussi à des femmes, ce qui est rarissime, dans un film de cow-boys souvent prêts à dégainer. Si Richard Berry est idéal en flic désabusé à qui on ne la fait pas, il ne surprend pas et son « trauma » personnel (entièrement réglé par téléphone) laisse relativement indifférent. C’est dans sa relation avec chaque membre de l’équipe de bras cassés qu’il va d’abord surprendre, déranger puis séduire que son histoire est la plus convaincante. Il va rendre leur dignité et leur compétence à des flics réduits à remplir la « main-courante » sans intervenir ou à consoler les vieilles dames à qui on a volé le sac. Aïssa Maïga, toujours dynamique et impliquée se dévoue corps et âme à son chef, dès lors qu’elle peut l’admirer. Pascal Elbé, le plus récalcitrant finira par retrouver les valeurs d’un boulot qu’il a aimé grâce à un chef qu’il respecte. Bernard Blancan est un flic fatigué mais intègre qui y croit encore à condition d’être mené par un patron juste et vertueux. Sans oublier Moussa Maaskri et Guilaine Londez particulièrement convaincants eux aussi. Tout ce petit monde joue du flingue et de la réplique qui tue avec beaucoup de punch et donne au film son intérêt et son énergie. Un film efficace qui dépote !

  • Sagan de Diane Kurys *

    Sagan - Sylvie Testud

    La vie, la mort, les amours, les emmerdes de Sagan… et quelques pages d’écriture de celle qui devint un mythe et dont la carrière commença par la sortie du livre jugé scandaleux « Bonjour tristesse ».

    On ne peut que reconnaître deux atouts imparables à ce film : la performance miraculeuse de Sylvie Testud et l’envie qu’il donne de (re)lire de toute urgence toute l’œuvre de Sagan.

    Bizarrement le film laisse une impression très mitigée de malaise et de déception, comme s’il était poussiéreux, inadapté et surtout l’insondable tristesse qu’il dégage, malgré les quelques tentatives pour faire sourire, laisse complètement anéanti.

    Sagan était une femme gaie qui aimait faire la fête et ne savait que faire une chose : écrire. Elle n’attendait qu’une chose de ses amis (nombreux) : qu’ils soient heureux ! Dès la parution de « Bonjour tristesse » elle devient millionnaire alors qu’elle n’a que 18 ans. Elle passera sa vie à dilapider tout l’argent qu’elle gagne, aux jeux, dans l’achat de luxueuses voitures, de maisons et surtout en s’entourant d’une cour de pique-assiette qu’elle entretient, loge, nourrit, sort. Elle s’en fiche, elle est généreuse, elle ne sait pas compter, elle veut qu’on l’aime.

    Deux mariages, un enfant (renié… pourquoi ?), ses relations homosexuelles, ses beuveries, son accident de voiture qui l’a rend pour toujours accro à la drogue, son arrestation… tout le film n’est qu’une succession de pages people ou scandaleuses. C’est un peu comme si on feuilletait en accéléré 50 ans de « Paris Match » et c’est assez écoeurant car si on se rend compte à quel point cette femme était adorable et imprévisible, on cerne peu sa personnalité complexe et son génie d’écrivain. Les plus beaux (et rares) moments sont ceux où en voix off, elle « écrit » ses plus belles pages. Pour le reste, toute une galerie de marionnettes plus caricaturales les unes que les autres se succèdent auprès d’elle pour l’abandonner finalement.

    Mais au centre de ce tourbillon de fêtes, de séductions et de défaites, il y a Sylvie Testud à la tête d’un rôle colossal qu’elle a empoigné, petite brindille au corps anorexique, comme possédée par l’écrivain. Elle est incroyable, troublante car on ne peut qu’insister sur la ressemblance confondante avec son modèle. Sans maquillage outrancier, sans latex qui enlaidit et dénature, juste par le mystère d’une mèche blonde qui balaye le front, d’une démarche qui devient de plus en plus hésitante avec les années, d’une façon de se caresser le sourcil, de se plaquer les cheveux dans la nuque nerveusement, et d’une voix sans pareil et surtout d’un débit hypernerveux, inquiet et impatient, elle devient Sagan, gaie, excessive, timide, attachante, touchante.

    Ce film doit TOUT à Sylvie Testud mais ne rend pas hommage à Françoise Sagan réduite ici à une fêtarde désespérée.

    Il faut également remercier, féliciter et rendre grâce à Chantal Neuwirth et à Sylvie Testud encore, qui dans le « spectacle » final de l’agonie rendent, par la force de leurs regards, toute sa dignité à une scène qui aurait sombré dans un mauvais pathos sans le talent de ces deux actrices.

    Un film d’une grande, profonde et insondable tristesse !

  • JCVD de Mabrouk el Mechri ***

    JCVD - Jean-Claude Van Damme
    JCVD - Jean-Claude Van Damme

    Jean-Claude Van Damme rentre en Belgique pour tenter de se refaire le moral en berne. Aux Etats-Unis, il est en procès contre son ex femme pour la garde de sa fille, ses finances sont au plus bas, les projets ne se bousculent pas… et sitôt entré au pays, le voilà au cœur d’une prise d’otages dans une poste où il venait retirer de l’argent.

    Au centre de ce thriller parfois flippant, parfois franchement drôle, il y a JCVD, la « movie star » comme il se nomme lui-même, qui joue son propre rôle. La prise d’otages se transforme vite en show télé car des centaines de curieux veulent voir leur idole en vrai ! Quant à JC, il joue de sa notoriété pour faire l’intermédiaire entre les preneurs d’otages (dont un fan absolu) et la police qui croit que c’est lui qui est à l’origine du délit.

    C’est incroyable de croire connaître si bien un acteur alors qu’en parcourant sa filmo, je pense n’avoir vu aucun de ses films. Il faut dire que jusque là, JCVD se faisait davantage remarquer pour ses aphorismes délirants que pour ses qualités d’acteur. Mais l’ennemi de JCVD, c’est JCVD lui-même, personnage musclé et sans cervelle qui a eu ce qu’il a voulu (la gloire) mais qui apparemment n’en peut plus. Il ne renie rien, ne crache pas dans la soupe qui l’a fait vivre, mais balance deux trois vérités qui ressemblent à des règlements de compte, l’abandon de John Woo qui lui devrait d’être venu à Hollywood, son remplacement dans un futur projet par Steven Seagal et le manque d’inspiration de son agent…

    Si le film, objet hybride qui oscille entre fiction et réalité est loin d’être déplaisant avec notamment l’impayable acteur belge François Damien dans le rôle de l’inspecteur et une esthétique chébran très soignée, le grand intérêt, la grande et bonne surprise c’est évidemment Jean-Claude Van Damme himself. Loin de chercher la performance ou le contre emploi, de tenter de nous faire le coup de son « Ciao Pantin », l’acteur semble être lui-même, rien de plus, mais surtout rien de moins. Avec son regard triste et fatigué qui nous dit à chaque plan à quel point il a morflé, il parvient également à nous montrer de quelle auto-dérision il est capable en évitant toute surenchère dans les effets «actor’s studio ». JCVD est sobre, touchant, sincère et drôle. Lorsque le moment tant attendu arrive dans la dernière partie du film où il se confie seul face caméra avec son phrasé et ses tournures inimitables, il livre tout en vrac, s’épanche, se dévoile et révèle tout, son ascension, sa gloire, les femmes, les films, sa chute dans la drogue, sa descente aux enfers… et il a ces mots assez surprenants et vraiment désarmants : « voilà, ce film c’est pour moi… », c’est-à-dire pour que je m’en sorte. Mais ce n'est pas seulement dans cette belle scène qu'il prouve qu'il est un acteur. 

    Ce film sincère, oui je décide de dire et de croire qu’il est sincère, est celui d’un garçon adorable, séduisant, vraiment attendrissant et aware, qui révèle de vraies qualités d’acteur, qui prouve que le regard énamouré que son réalisateur pose sur lui peut lui permettre de déployer son talent et qui crie "aimez-moi !". Irrésistible.

  • Loin de Sunset Boulevard d’Igor Minaiev ***

    Loin de Sunset Boulevard
    Loin de Sunset Boulevard

    Au début des années 30 à Moscou, la relation d’Alexandre Mansourov, réalisateur réputé et Konstantin Dalmatov son assistant, est découverte par les autorités. L’homosexualité est légalement réprimée et pour exercer à son tour son métier de cinéaste Konstantin doit, à la mort de Mansourov conclure un pacte avec le Régime. Sitôt signé un document qui peut faire de lui un collaborateur du gouvernement « en cas de besoin », toutes les portes lui sont ouvertes. Il lance la carrière de la très talentueuse et très seule actrice Lidia Polyakova. Ils décident l’un et l’autre de vivre ensemble, de se marier pour rapprocher leurs solitudes et sauver les apparences. Ce second pacte fait de Konstantin un homme respectable hétérosexuel.

    La relation platonique impressionnante de complicité, de tendresse et de respect entre Konstantin et Lidia est au centre du film même si elle n’en est pas le thème essentiel. Ce qui en fait le cœur, c’est la création dans un pays où Lénine avait fait du cinéma le premier des arts pour sa capacité à éduquer les masses, le tournage des films dans le film toujours réjouissant sur grand écran. Le genre de prédilection de Konstantin sont les comédies musicales. Il tourne donc des films flamboyant, follement gais et optimistes qui vantent le bonheur et la chance de vivre en URSS. A l’époque tous les films devaient recevoir l’assentiment de Staline et pas un ne sortait sur les écrans sans être passé par le Kremlin. On apprend qu’Eisenstein a dû en détruire un des siens. Le contraste entre ce que filme Konstantin, vif, coloré et joyeux est en contradiction permanente avec la peur perpétuelle que ressentent le réalisateur et son actrice, peur de cesser brusquement de plaire. Toute l’équipe est d’ailleurs soumise à ce climat de doute, d’incertitude et de suspicion face à une administration tyrannique toujours prompte à remplacer, déplacer, déporter ! Konstantin et Lidia sont triomphalement reconnus dans tout le pays jusqu’à ce qu’ils ne puissent plus supporter cette chape sur leur métier et leur vie…

    Entre allégresse, tristesse et inquiétude le film voyage avec virtuosité. C’est romanesque, historique, éblouissant et douloureux. C’est russe. Et un film russe (aussi hollywoodien !) au titre aussi merveilleusement subtil, est un objet suffisamment rare pour qu’on s’y attarde, même si au final ce qui reste en mémoire est la chaste relation indéfectible des deux personnages principaux, amis, complices, alliés envers et contre tout.

  • Affaire de famille de Claus Drexel **

    Affaire de famille - André DussollierAffaire de famille - André Dussollier (photo exclusive)Affaire de famille - Miou-Miou (photo exclusive)

    Une famille de province sans histoire, le père, la mère, la fille mais sans beaucoup d’affinités et de choses à se dire découvre un sac de sport rempli de billets de banque. Jusque là, le père ressassait ses rêves de gloire footbalistique passée (il a failli entrer chez « les verts » dans les années 70 et les vieux de mon âge se souviendront « qui c’est les plus forts, évidemment c’est les verts… »), la mère s’occupe d’un magasin ringard de souvenirs dans la banlieue de Grenoble, et la fille ado ronchon, ronchonne. Tout cet argent va contraindre ce trio à faire tout et n’importe quoi. Cachotteries, mensonges, trahisons, chacun va chercher à berner l’autre volontairement ou pas, jusqu’à l’arrivée d’un policier, l’inspecteur Mort Vivant, d’un loubard à scooter et de ce fichu sac qui ne va cesser de changer de mains sans qu’on s’aperçoive de rien.

    Voilà typiquement le genre de film qui n’a d’autre ambition que de distraire (j’espère que j’ai bon !) et qui réussit parfaitement son pari. Il fait du bien et on en sort plutôt en grande forme. Car même si le scénario n’a rien d’exceptionnel : où est ce satané argent ? le réalisateur a eu la bonne idée de nous raconter l’histoire trois fois selon le point de vue de chacun des membres de la famille. Comment ont-ils découvert la chose ? Comment l’ont-ils interprétée en fonction de ce qu'ils ont vu ? Quel rôle jouent-ils vraiment chacun, ensemble ou séparément ? C’est vivant, enlevé, drôle, sans prétention et l'épilogue douloureux me fait penser qu'un tel sac tombé du ciel serait le bienvenu...

    Miou Miou et André Dussolier s’amusent manifestement sans jamais sourire car ils sont champions l’un comme l’autre dans l’art de manier le second degré avec un air parfaitement abruti.

  • Ezra de Newton I. Aduaka ***

     

    Ezra

    Ezra n’a que 9 ans lorsqu’un matin débarquent dans son école une horde de types effrayant qui embarquent manu militari tous les garçons. Ezra sera comme ses compagnons, embrigadés et entraînés au fin fond de la jungle pour commettre les pires atrocités. On retrouve Ezra quelques années plus tard. Il a réussi à échapper à ses tortionnaires sauvages et doit faire face à un tribunal international de réconciliation nationale organisé par l’ONU. Le jeune homme par ailleurs, complètement traumatisé vit dans un centre de réhabilitation psychologique. Au tribunal, qui n’est pas là pour juger, mais pour comprendre et aider les anciens enfants soldats et permettre le pardon et la compréhension, Ezra doit faire face à sa sœur. Lors d’une nuit d’enfer et de cauchemar, complètement drogué et alcoolisé, il aurait lui-même tué ses propres parents et coupé la langue de sa sœur… Ezra ne se souvient de rien.

    Le film, très beau, très bien fait réussit l’exploit d’être à la fois une fiction et un témoignage implacable sur une réalité qui frappe encore actuellement l’Afrique sans que le reste du monde s’en émeuve. Il y aurait encore aujourd’hui 300 000 enfants soldats. Ici, dans ce pays imaginaire, pas de luttes de classes, de religions ou de « races » mais simplement l’appât du gain et les réserves d’or convoitées. Les scènes de tribunal et de la vie d'Ezra et de ses jeunes compagnons dans la jungle et des actes qu'ils commettent alternent. Les premières permettant quelque peu au spectateur horrifié de "digérer" les secondes révoltantes, insupportables...

    Les deux acteurs principaux, le frère et la sœur, non professionnels, sont extraordinaires.

    Voici comment le réalisateur parle de son film :

    « Ces enfants ont connu l'enfer pour valoriser le prix des diamants, de l'huile, pour permettre à Wall Street de se maintenir à flot. Tout cela m'affecte profondément, et c'est ce qui a nourri Ezra. Le reste, c'est du cinéma".

    Je suis fasciné par la mémoire. Comment elle fonctionne, comment elle oublie ou se souvient, ses différentes strates, comment nous la reconstruisons, consciemment ou non, comment nous nous arrangeons avec elle. Ezra est porteur de tout cela. Sur un plan symbolique, je crois qu'Ezra, c'est nous. Tout le monde. Nous avons tous été effrayés par la violence institutionnalisée, drogués par les médias trop peureux. Comme Ezra, nous avons tous été trompés. Oui, Ezra est semblable à toute une génération d'enfants qui, comme lui, ont pris conscience que pendant qu'ils mourraient de faim ou à la guerre, une poignée de gens avides en profitait. Et ce qu'il y a d'ironique, c'est qu'ensuite, ce sont les mêmes gens, à travers leurs institutions, qui viennent les juger... Les guerres dans le monde peuvent être évitées, mais seulement si toutes les vies valent le même prix. »