MÊME LA PLUIE
de Icíar Bollaín ***(*)
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de Icíar Bollaín ***(*)
Le jour où David Rousseau se rend à Mouthe (ville du Jura réputée pour être la plus froide et sans doute la plus enneigée de France) il croise la route d'une ambulance qui transporte le cadavre de Candice, jeune beauté et célébrité locale. Il est auteur de polars à succès, elle était l'effigie d'un fromage franc-comtois "Belle de Jura". En panne devant son clavier, harcelé par son éditrice, il chosit de se servir de ce fait d'hiver (ooops... pas fait exprès... divers !!) pour tenter de retrouver l'inspiration. D'emblée, il décide de ne pas croire à la thèse du suicide et aidé de Bruno jeune gendarme qui connaissait Candice, d'enquêter sur la vie et le passé de la belle, du temps où elle s'appelait encore Martine. C'est d'ailleurs la morte qui nous raconte son histoire en voix off. Selon elle, les histoires commencent toujours par la fin. Dès le générique Martine/Candice se désole donc de constater post mortem qu'il lui faut attendre d'être morte pour qu'un mec bien s'intéresse à elle. En effet, bien qu'ils ne se rencontreront jamais, et pour cause, Candice et David vont s'aimer, ou peut-être s'aiment-ils déjà ! C'est évident ce film n'est pas à un paradoxe ou une singularité près et c'est vraiment, vraiment tant mieux.
Au départ on peut imaginer s'être trompé de salle tellement les étendues neigeuses et la musique blues font penser à un film américain et plus encore à "Fargo" peut-être. Je suppose que Gérald Hustache-Mathieu ne renie aucune des références qui parcourent son film tellement elles paraissent à la fois évidentes et absolument bien intégrées au récit. Le visage livide, tuméfié et gelé de Candice découverte sous la neige et hop, on est chez David Lynch. Lynchienne encore est cette oreille (bien que toujours solidement accrochée à la tête) filmée en très gros plan pour nous indiquer que le détective amateur est atteint d'hyper-audition. Et puis il suffit qu'un adolescent un peu bas de plafond ouvre la porte vêtu d'un t-shirt jaune orné d'un taureau et nous voilà chez Gus Van Sant. Heureusement le garçon ne joue pas de piano... Evidemment ces réminiscences sont loin d'être l'atout du film même s'il est toujours séduisant de découvrir un réalisateur cinéphile et plus encore de rallumer la flamme de sa propre cinéphilie. Mais ce film est bien français et très personnel et il est enthousiasmant de bout en bout. Malgré les invraisemblances pas bien gênantes telles la facilité à pénétrer dans la morgue et dans l'appartement de la morte, le réalisateur nous trimballe avec maestria de révélations en divulgations et fait peu à peu s'éclaircir le mystère et s'encastrer toutes les pièces d'un puzzle où rien n'est prévisible.
Les parallèles entre la vie de Marilyn Monroe et celle de Candice Lecoeur qui paraissent aberrants au départ sont habilement et intelligemment mis à jour. Il s'agit d'un thriller un vrai, avec suspens et surprises à la clé. C'est également une tragédie non dénuée de sentiments et d'humour. Gérald Hustache Mathieu dont j'avais déjà adoré le premier film (que je vous recommande+++) semble être un auteur différent, décalé et je l'espère prolifique. En tout cas, j'attends impatiemment son prochain film.
Les acteurs se sont mis au service de cette histoire différente à l'atmosphère si particulière, ne serait-ce que par le climat glacial qui y règne. Jean-Paul Rouve un peu désorienté, nonchalant et finalement plutôt romantique trouve enfin un rôle qu'il endosse avec légéreté. Sophie Quinton, véritable muse du réalisateur est une merveille. Tout lui va, même un sac à patates, et ce n'est pas une image ! Elle partage avec Marilyn cette espèce de douceur et de gravité enfantines, cette douleur d'éternelle insatisfaction qui se traduit par le sourire le plus triste du monde. Et la révélation vient également de Guillaume Gouix qui en gendarme honnête et rigoureux devrait ravir aussi bien les filles que les garçons sensibles.
Ce week end, c'est "Poupoupidou" qu'il vous faut voir !
Dans la famille Canavaro, on joue au rugby de père en fils et on a intérêt à aimer ça. Le fils à Jo, jeune garçon de 13 ans plutôt délicat ne semble pas partager ce diktat. Il préfère les maths et par conséquent il est la honte de son père qui l'a élevé seul car la maman est morte dans un accident de voiture alors que le petit avait 1 an. Snif. Depuis, papa se l'ait mise sur l'oreille parce que maman c'était la plus belle et même et ben en plus c'était la seule. Heureusement une sublime irlandaise (brune corbeau car ce film ne veut pas céder au cliché de l'irlandaise rousse...) chef d'entreprise va débarquer, acheter le terrain où la famille Canavoro vit depuis plus d'un siècle, exproprier le pauvre Jo et son fils qui vont devoir aller s'installer dans une autre maison pas loin sur 7 000 m² de terrain (la taille d'un terrain de rugby non ?) avec vue sur la chambre à coucher de la belle irlandaise qui parfois fait des entrechats devant sa fenêtre !!! La vie est cruelle parfois, ça me dégoûte. Bon, c'est pas tout ça. "Le Chinois" (perso je trouve qu'Olivier Marchal a hyper pas une tête de chinois) qui était le meilleur ami de Jo dans le temps d'avant refait surface 15 ans après en tant que Conseiller Principal d'Education au collège où le fils à Jo obtient des 17 en maths et des 15 en français (le cancre). Dans sa valise, le Chinois rapporte un All blacks
et ça tombe hyper méga super bien parce que comme ça, il va pouvoir entraîner l'équipe de rugby de moutards que Jo veut reformer pour foutre la pâtée à l'autre équipe qui est à la solde de tous les pourris vendus de la région. Bouh qu'ils sont laids ! Je laisse le suspens et ne vous révèle pas quelle équipe va gagner. Pour qui me prenez vous, il y a une éthique sur ce blog !
Bon, j'y suis allée sans rien savoir de ce film "genre" j'ai vu de la lumière et je suis entrée. A vrai dire, c'était le seul film que je pouvais voir à l'heure qu'il était. Et puis bon j'ai vu Gérard Lanvin et Olivier Marchal à l'affiche et je me suis dis why not ! Je ne sais pas s'il faut être du sud ouest pour apprécier comme il fallait être du Nord pour apprécier "Bienvenue chez les Chtis" mais franchement je ne me souviens plus quand il m'avait été donné de voir (alors que Gérard Butler ne fait même pas partie de la distribution) un film aussi couillon, lourdaud, pataud, balourd, plouc, péquenaud, stupide et épais. Sûr que ce scenario a été écrit avec les coudes. En plus le Tarn, franchement ça ne fait pas rêver. C'est une région où il pleut tout le temps et où l'on patauge dans la gadoue. Mais les gens ont beaucoup de coeur avé l'assent. Seulement, le samedi soir les mecs se bourrent la gueule dans des rades sinistres ou vont au bal pour finir la soirée en baston générale. La devise de Jo qui est un mec qui en a et qui place son sens de l'honneur en étendard est que pour s'en sortir dans la vie : rien de tel que le coup de boule bien placé.
Je suis restée pantelante devant ce spectacle consternant de bêtise et de mièvrerie accentué par une musique sirupeuse et dépurative qui nous sort les violons du philarmonique pour nous imposer un lavage de cerveau et nous préciser qu'on est face au mélo du siècle ! Chaque scène plus prévisible que la précédente donne lieu à un empilement de clichés cruchons sur la générosité, l'amitié et nous assène que les garçons bourrus ont un coeur gros comme ça. Et je ne vous parle même pas du comique de répétition qui fait qu'on revoit sans cesse le même gag sans doute pour tenter péniblement de remplir une heure et demi déjà bien laborieuse. Combien de fois voit-on Pompom, le simplet de l'histoire, monter et descendre d'un train qu'il ne prendra finalement jamais ? (crotte de bique, j'ai spoilé !!!) cinq, six fois ???
Côté interprétation, Gérard Lanvin nous refait le coup (lassant !) du péquenaud un peu beauf, beaucoup bougon au coeur plein d'amour mais qui rit quand il se brûle. Vincent Moscato, le débile qui n'ose pas prendre un train (et zut, voilà que le spoilage me reprend) est exaspérant. Et Olivier Marchal, coiffé comme un playmobil qui aurait confondu shampoing et bouteille d'huile et qui semble ne pas avoir croisé une douche depuis 3 mois, imaginez qu'il est le séducteur de l'affaire auquel nulle ne résiste, de 20 à 55 ans (en gros). Quant à l'imaginer en CPE d'un collège, vous pouvez peut-être, moi pas !
En tout cas, ces trois là ont l'air de bien s'amuser. Pas moi.
alors dès que je me suis rassemblée...
promis juré je vous en parle, mais n'attendez pas mon avis : précipitez vous voir ces deux merveilles, avec de merveilleux acteurs, de merveilleuses histoires tristes et belles !!!
Cela ressemble à un documentaire filmé à l'époque où se situe l'histoire. Ce qui est impossible, nous sommes en 1528 et le cinéma, je vous assure, n'avait pas encore été inventé. De toute façon, il ne s'agit pas d'un documentaire même si l'histoire de cet explorateur espagnol est vraie de vraie. Álvar Núñez Cabeza de Vaca, explorateur espagnol est un des rares survivants d'une expédition sensée découvrir les Indes et qui fait naufrage au large des côtes de Floride. D'abord anéanti par la peur et la solitude, puis abaissé au rang d'esclave, utilisé et humilié par un être difforme, vociférant et tyrannique qui accompagne un sorcier mystérieux, il décidera, après avoir touché le fond du désespoir et approché la folie, de rester en vie. Il lui faudra 8 années de marche à travers les Etats Unis pour retrouver ses compatriotes espagnols toujours avides de conquêtes. Mais avant cela, il aura partagé la vie de différentes tribus desquelles il aura appris les rites, les traditions et quelques rudiments de sorcellerie qui lui feront accomplir des miracles...
Sortir totalement indemne de ce film envoûtant, dérangeant et unique me paraît impossible. Jamais encore il ne m'a été donné de suivre une aventure aussi sensorielle. Jamais encore je n'avais vu ainsi la représentation de l'homme au cinéma, qu'il soit prétendûment "civilisé", conquérant, belliqueux, convaincu de sa supériorité et insatiable dans ses convoitises ou soi-disant "sauvage" pétri d'un instinct de survie, d'une pureté, d'un sens aigü de la communauté, du partage et néanmoins non dénué déjà de croyances insensées, de superstition et de violence.
Les images sublimes d'un environnement tantôt désertique, tantôt luxuriant ajoutent à l'impression déroutante d'asphyxie qui rend l'homme misérable face à cette nature qu'il ne cesse de vouloir dompter alors qu'il n'en est qu'un élément mesquin.
Il faut accepter de se laisser capturer par ce film ensorcelant, déroutant qui n'a pas son égal et dont on a du mal à comprendre pourquoi il a mis 20 ans à sortir en salles ! Un cinéma originel, brut et oserai-je mot... naturaliste qui laisse décontenancé.
Cela dit je laisse à mes nouveaux amis de Critikat qui causent si bien le mot de la fin : "Un fantasme d'Eldorado, mythe d'un prosaïque horrible devenu, par le truchement du langage, synonyme d'un rêve peut-être plus pur, moins intéressé. C'est vers cet Eden sensoriel que tend le film de Nicolás Echevarría - un Eden où la bienveillance n'est pas dupe de ses chances face à la marche de la conquête, mais où le discours demeure celui d'une foi véritable en l'être humain, malgré tout."
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Le jeu du lundi devrait vous paraître limpide aujourd'hui.
MES COUPS DE COEUR
1) Aller terminer le jeu ICI sinon lundi ce sera "tintin les pruneaux" comme on disait chez moi.
Je vous ai pré-mâché le boulot.
2) Aller voir cette pépite, l'histoire d'une petite fille qui redonne le goût et le sens de vivre à son papa...
de Sofia Coppola ****
De nos jours en Calabre, le réalisateur pose sa caméra attentive et admirative et observe. A quatre reprises, les quatre fois du titre, il nous donne à voir, à contempler, à réfléchir, à nous émouvoir ou à sourire. Un vieil homme malade emmène chaque jour son troupeau de chèvres dans des pâturages en altitude, accompagné de son chien forcément fidèle. On assiste au rituel quotidien de son coucher, à sa solitude déchirante et à son agonie. Un chevreau naît, s'égare et se refugie au pied d'un arbre majestueux qui sera abattu. Ce "sacrifice" donnera lieu à une fête villageoise puisque de l'utilisation de ses cendres résultera le charbon de bois permettant au village de se chauffer...
C'est beau, c'est très beau, c'est même prodigieusement magnifique, bouleversant lorsque le vieil homme s'éteint, amusant quand le chien parvient à faire dévaler une camionnette en retirant la pierre qui la bloquait, émouvant lorsque le chevreau se perd, triste quand l'arbre est abattu, surprenant lorsque le charbon de bois est "fabriqué"... Sans le moindre dialogue et sans musique, le réalisateur nous offre un cinéma à la fois rigoureux et lyrique, forcément différent dans sa radicalité. Sans aucun doute, possède t'il une âme faite de sons, de sensations humaines, animales, végétales, minérales et on ne peut que saluer et battre des mains devant un cinéma tellement à part. Mais peut-être aussi faut-il s'assurer de ne pas perdre en chemin le pauvre spectateur (dont je suis) habitué à ce qu'on lui raconte des histoires. En effet, les intentions et le propos du réalisateur sont loin de m'être toujours apparus limpides et je doute que dans son exigence manifeste il ait voulu se contenter de nous montrer de somptueuses images.
Tous les new-yorkais ne sont pas des intellectuels névrosés qui ont un appartement avec vue sur Central Park. Il existe aussi une "middle class" qui trime et galère à trouver l'âme soeur. C'est de ces "petites gens" pas trop beaux, pas trop glamour dont il est question ici. Jack est comme son ami Clyde, chauffeur de limousine mais alors que Clyde est marié et amoureux de sa femme Lucy, Jack, timide et mal dans sa peau vit solitaire et sans amour. Clyde va lui faire rencontrer Connie, une beauté un peu abîmée par la vie aussi peu sûre d'elle que Jack.
Ce film est à l'image de son acteur/réalisateur : différent, et j'aurais aimé l'aimer à la folie... et je n'en étais pas loin. Philip Seymour Hoffman, acteur IMMENSE a quelque chose en plus que beaucoup d'autres n'ont pas, en plus de son talent infini. Ce doit être ça le charme ou le charisme. Comment fait-il, avec le physique qu'il a, à des années lumières des canons hollywoodiens ou des critètres de beauté, avec ses cheveux jaune filasses, ses tâches de rousseur, son embonpoint, sa peau qui rougit s'il fait chaud ou s'il fait froid, pour être aussi charmant et séduisant ? Il se dégage de lui douceur, bienveillance, humanité, générosité et évidemment infiniment de fragilité. Toutes ces caractéristiques dans le même bonhomme le rendent extrêmement attachant et, ainsi que lui révèlera Connie, sexy. Ce type, cet acteur et ce personnage ont l'air touchés par la grâce et c'est ce qui fait en grande partie l'intérêt de ce film doux comme une caresse, prometteur comme un rêve pour certains mais cruel pour d'autres. En effet, à mesure que le couple Jack/Connie apprend à se connaître, celui formé par Clyde et Lucie va peu à peu se lézarder. Les révélations longtemps tues, les trahisons qu'on ne peut pardonner vont progressivement devenir insurmontables, insupportables et les mener à la rupture. Jack et Connie en observateurs attentifs et terrifiés par l'avenir vont "profiter" de l'échec qui prend forme sous leurs yeux pour comprendre toutes les erreurs à ne pas commettre.
En apprenant avec son ami Clyde à nager, à se jeter enfin à l'eau (très belles, drôles et touchantes scènes de piscine), et jusqu'à un dîner qui vire au fiasco total, Jack et Connie vont tenir leur promesse de ce rendez-vous de balade en bateau à Central Park comme base de leur avenir commun. C'est simple, fort, léger et profond comme tous les obstacles que doivent franchir les émotifs anonymes... Amy Ryan et Philip Seymour Hoffman sont adorables !