ABRAHAM Michel Jonasz aux RTT
Après Jules et Marcel puis le Quatuor pour notre dernière soirée aux RTT (Rencontres Théâtrales de Tomblaine) nous avons assisté à la pièce écrite, mise en scène et interprétée par Michel Jonasz : "Abraham".
Seul en scène l'acteur, chanteur, auteur nous cueille instantanément dès les premiers mots de son spectacle pour nous laisser une heure vingt plus tard, un peu sonnés de nous avoir fait vivre l'histoire de son grand-père Abraham. Juif polonais venu s'installer en Hongrie, il n'est retourné en Pologne "le pays le plus triste du monde" que pour être finalement déporté vers Auschwitz avec sa femme, sa Rose adorée et 2 de ses 7 enfants. 4 autres de leurs enfants ont aussi fini leur vie dans les camps. Il semble que seule la mère de Michel Jonasz ait survécu...
Il paraît qu'avant de mourir tout homme voit sa vie défiler en un instant. C'est donc ça l'histoire. Avant d'entrer dans la chambre à gaz Abraham se souvient... Et il se souvient de tout, de sa rencontre avec Rose, la plus belle, la plus aimée de toute, sa Rozele. De la naissance de chacun de ses enfants adorés. De son travail de "cantor" à la synagogue. De son épicerie où l'on trouve de tout. Mais aussi et surtout de son ami Yankel Weizman. Et c'est grâce à l'évocation des nombreuses conversations parfois houleuses que les deux hommes ont eues sur le banc du village que ce spectacle est drôle. Infiniment. Yankel est un tailleur juif qui discute de tout, veut toujours avoir raison, a tout le temps envie de se suicider, se plaint toujours, pleurniche autant, se sent coupable de tout mais pense aussi que tout est de la faute du monde, sa langue maternelle est le yiddish et il a tellement l'accent que même quand il ne parle pas, on l'entend...
De sa belle voix pleine et nuancée, Michel Jonasz joue tour à tour les deux personnages, tellement bien qu'on parvient à distinguer les deux hommes. Chaque "chapitre" est ponctué d'une magnifique chanson aux profonds accents tziganes pour évoquer aussi ce peuple des "gens du voyage".
On rit énormément mais il est également bien difficile de ne pas pleurer. C'est drôle et bouleversant et finalement, ça fait un bien fou.