Entre Hubert ado de 16 ans et sa mère (épatante Anne Dorval) qui l’a élevé seule, le torchon brûle. Sérieusement, gravement.
Plus un instant de répit n’existe entre eux. Il trouve qu’elle mange salement, porte des vêtements trop voyants, qu’elle oublie tout, qu’elle parle pour ne rien dire, préfère écouter des émissions débiles que de discuter avec lui... En un mot elle « l’écoeure », il ne peut plus la supporter et chaque fois qu’ils cohabitent, en voiture quand elle l’emmène au lycée, à table pour les repas, c’est l’engueulade permanente, virulente, violente.
Cependant Hubert se souvient, et regrette le temps béni où ils s’aimaient, se parlaient.
Xavier Dolan est un surdoué : bon acteur, bon réalisateur, bon scénariste, il signe de chaque côté de la caméra et à 20 ans son premier film où il développe la mémoire encore fraîche de son adolescence et de cette période manifestement clé et envahissante où il a cessé d’aimer sa mère, quoique...
Nombriliste, égocentrique, narcissique, parfois branchouille, un rien poseur et j’en oublie sans doute, « J’ai tué ma mère » avait à peu près tout ce qu'il faut pour déplaire et agacer. Par ailleurs, Xavier Dolan est beau, il le sait, il joue de sa mèche à bouclettes rebelle, filme sous toutes les coutures son joli visage en plans très serrés et son joli corps. Dans ses petits pulls à col en V ou rayés, cela ressemble même parfois à une pub pour Jean-Paul Gauthier.
Malgré, ou est-ce à cause de tout cela, ce film est tout simplement formidable.
Formidablement drôle, impitoyable, cruel et parfois cru.
Outre le fait que Hubert devienne incompatible avec sa mère, qu’il ait des velléités d’indépendance (prendre un appartement à 16 ans !), qu’il s’ennuie en classe (forcément un surdoué…), il doit aussi assumer le fait qu’il est homosexuel et très amoureux. Cela fait beaucoup, d’autant que la mère qui semble dans un premier temps ne pas prendre au sérieux les éclats et insultes de son fils, son « Lou » comme elle l’appelle, continue à jouer (inconsciemment) à la mère poule immature, multipliant les gaffes et chantages affectifs.
Ce film est épatant et étonnant car manifestement Xavier Dolan ne s’est pas trompé de moyen d’expression et son film foisonne de références insistantes et touchantes à d’illustres aînés tels que Gus Van Sant et Wong Kar-Waï, mais aussi d’abondantes trouvailles personnelles.
Le délicieux accent québécois et la précision des expressions colorées et imagées que nos « cousins » utilisent, atténuent sans aucun doute la portée agressive des échanges verbaux d’une brutalité parfois sèche et tranchante, nous obligeant à sourire ou à rire franchement.
Faites un triomphe à ce grand petit film qui au final se révèle être non pas une déclaration de guerre mais le témoignage authentique et attendrissant de l’amour d’un petit garçon pour sa maman…
Je vous ai dit que ce film est formidable ?